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Développée par la psychologie positive, cette technique de la gratitude vise à se rencentrer sur les aspects positifs du quotidien, souvent éclipsés par les tracas de la journée. Un outil pour accroître le bien-être physique et mental en cette période, source d’anxiété. La gratitude se faufile dans tous les aspects de notre vie.

La reconnaissance envers un enseignant grâce à qui on a trouvé sa voie. La chance que l’on mesure de se réveiller chaque matin auprès de la personne que l’on aime depuis tant d’années. Toutes ces situations nous procurent une émotion particulièrement agréable : la gratitude. Il est difficile pourtant de la ressentir dans le contexte actuel.

Si les interactions positives sont plus nombreuses au cours de la journée, ce sont les situations négatives que nous ressassons à l’heure du coucher : une réunion de travail qui s’est mal passée, une dispute avec un proche, des mauvaises nouvelles aux informations, etc. Dans le chaos ambiant que nous traversons, écrire la gratitude peut considérablement aider, voire nous sauver du stress, de l’anxiété et de la déprime.

Alors comment contrer cette tendance qui consiste à ne voir que les mauvais côtés de la vie ? C’est ce qu’étudie la psychologie positive. Fondée à la fin des années 1990 aux Etats-Unis, cette discipline s’intéresse aux déterminants qui permettent à chacun de s’épanouir. Expériences à l’appui, elle tente de développer des outils pour cultiver les émotions sources de bien-être, comme la gratitude.

“C’est un sentiment que l’on ressent lorsqu’on perçoit qu’on a été bénéficiaire d’un don ou d’un soutien d’une autre personne, voire même de la nature, ou de la vie plus généralement”, explique Rébecca Shankland. La gratitude procure une sensation de “chaleur” dans le corps et provoque un “mélange d’émerveillement, de surprise et de joie que l’on a envie de partager avec les autres”, ajoute la chercheuse. Elle est donc différente du “merci” exprimé automatiquement, par pure politesse.

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Pionnier des recherches sur la gratitude, le psychologue américain Robert Emmons a mis en évidence les bienfaits de cet état d’esprit sur le bien-être mental et physique à travers plusieurs expériences. La plus célèbre a été menée en 2003, avec son collègue Michael McCullough, auprès de trois groupes d’étudiants. Les deux chercheurs ont demandé à un groupe de noter une fois par semaine, dans un carnet, cinq choses qui suscitaient en eux un sentiment de reconnaissance. Le deuxième groupe a été chargé de ne relever que des expériences désagréables, et le troisième de lister les situations quotidiennes de son choix.

Après dix semaines d’expérience, les résultats ont montré que “les personnes reconnaissantes éprouvent des degrés plus élevés d’émotions positives comme la joie, l’enthousiasme, l’amour, le bonheur, l’optimisme”, écrit Robert Emmons dans son livre “La Gratitude. Cette force qui change tout” (éditions Belfond, 2008).

Robert Emmons. Crédit photo: Linkedln

En outre, ces personnes seraient comparativement plus à même de gérer le stress au quotidien et jouiraient d’une meilleure qualité de sommeil. Au cours de l’expérience, elles ont également signalé moins de troubles physiques, tels que des migraines ou des maux de ventre. “Six mois après l’expérience, les effets positifs sont toujours perceptibles. Les personnes sont toujours capables d’orienter davantage l’attention vers les aspects positifs du quotidien”, souligne Rébecca Shankland, qui a reproduit cette expérience, notamment auprès de familles ou de groupes d’adolescents.

La psychologie positive a développé plusieurs outils. Le plus connu, et le plus simple, est le journal de gratitude, qui consiste à reproduire l’expérience de Robert Emmons et Michael McCullough. Psychologue à l’hôpital privé Drôme-Ardèche, Sophie Lantheaume préconise cet exercice dans son travail d’accompagnement des malades du cancer. “Chaque jour, je leur propose d’écrire, dans un carnet, jusqu’à cinq choses qu’ils ont appréciées dans leur quotidien, en repensant à la gratitude qu’ils éprouvent envers les gens qui les entourent, la nature ou la vie”, détaille-t-elle.

“Au bout de quelques jours de pratique, on observe déjà les premiers effets, avec une capacité à repérer davantage les bons côtés du quotidien.”, dit Sohie Lantheaume dans une interview accordée à France Info. “Au début, il peut être difficile de trouver spontanément des situations pour lesquelles nous sommes réellement reconnaissants, d’autant plus dans la situation actuelle”, admet Rébecca Shankland. Pour s’exercer, la chercheuse conseille donc de répertorier des situations simples, qui génèrent au moins de la satisfaction. “Pour un parent, c’est par exemple le fait de ne pas s’être mis en colère contre son enfant pendant la journée, illustre-t-elle. Ce n’est pas incroyablement positif, mais c’est déjà très satisfaisant.”

Crédit photo: cerveauetpsycho.fr

Il est inutile également de se sentir obligé de lister chaque jour plusieurs événements. L’important est de se concentrer sur son ressenti. “Les recherches montrent qu’il est préférable d’écrire cinq phrases sur un même sujet, pour réellement s’en imprégner, plutôt que cinq phrases sur cinq situations différentes, auxquelles on se connecterait de manière plus superficielle”, analyse Rébecca Shankland.

Pour aller plus loin, les spécialistes en psychologie positive recommandent également l’écriture d’une lettre de gratitude, adressée à “une personne qui a contribué à nous pousser vers l’avant, sans qu’on ait eu l’occasion de la remercier”, indique Sophie Lantheaume. Un courrier pour expliquer à son destinataire “pourquoi il a été important pour nous et ce qu’il nous a permis de réaliser”, ajoute Rébecca Shankland“Une patiente m’a raconté qu’elle était allée dîner seule dans un restaurant, un jour où elle éprouvait de la solitude, raconte Sophie Lantheaume. Elle a écrit sa lettre à un restaurateur avec qui elle avait discuté ce soir-là et qui avait passé du temps avec elle.”

L’intérêt de la lettre de gratitude, “c’est d’abord de ressentir soi-même du bien-être”, en identifiant et en se reconnectant à des souvenirs heureux, selon la psychologue. De plus, la capacité à exprimer la gratitude, en mettant des mots sur ce que l’on ressent, accroît encore davantage la sensation de bien-être. Bien sûr, il est aussi possible d’envoyer la lettre, ou de la déposer en mains propres lors d’une “visite de gratitude”. Le destinataire aura ainsi la possibilité d’écrire à son tour un courrier. “Il ne faut pas non plus être dans l’attente d’un retour et se formaliser si on n’en reçoit pas”, explique Sophie Lantheaume, qui concède qu’“on n’est pas habitués à recevoir ce genre de courrier”.

L’exercice de la lettre met ainsi en lumière l’intérêt social de la gratitude. “Par effet de contagion, elle génère aussi du bien-être pour l’autre, qui ressent une forme d’utilité sociale”, décrypte Rébecca Shankland. Convaincue des effets bénéfiques de cet état d’esprit à l’échelle collective, Sophie Lantheaume a installé, après la première vague de Covid-19, un “mur de gratitude” dans le hall de l’hôpital où elle exerce.

Soignants, patients et visiteurs y accrochent des mots de reconnaissance. Certains remercient un soignant dont on perçoit le sourire derrière le masque, d’autres un médecin qui les a accompagnés dans une situation difficile. “Lire des messages de gratitude, même s’ils ne nous sont pas destinés, ça nous fait sourire, et ça nous pousse à faire de même ou à réfléchir à cette pratique”, avance la psychologue.

Les mots de remerciements accrochés sur le “mur de gratitude” de l’hôpital privé Drôme-Ardèche. (HOPITAL PRIVE DROME ARDECHE)

Tenir un journal de gratitude, c’est prendre l’habitude de se remémorer et de noter régulièrement les choses pour lesquelles on éprouve de la reconnaissance. Pas nécessairement de grandes choses. Ce peut être aussi simple que de voir vos fleurs préférées qui fleurissent, ou de faire réparer votre réfrigérateur. Ou encore, de recevoir un coup de fil d’un ami à qui vous n’aviez pas parlé depuis longtemps.

« Tenir un journal de gratitude, c’est prendre une pause pour réfléchir aux choses qu’on apprécie », explique le psychologue. « Cela vous incite aussi à voir le côté positif de chaque chose. Par exemple, le fait d’écrire sur un événement négatif vous permettra d’approfondir votre pensée. Cela pourrait même vous aider à voir le côté positif. »

Ecrire sa gratitude est une méthode efficace selon Nayla Chidiac, auteure de “Les ateliers d’écrire thérapeutique” et de “Les bienfaits de l’écriture”, qui raconte en avoir constaté les bienfaits : ” Le journal de gratitude peut être d’une aide véritable pour certaines personnes quant à leurs manières d’appréhender leur vie et la vie en général. Un exemple : une jeune patiente, à la suite de sept jours d’écriture de son journal de gratitude, s’est mise à relever de manière consciente que prendre son thé à la fenêtre en observant son chat jouer avec la lumière du jour la remplissait de joie et lui donnait envie de démarrer sa journée avec plus de “pep’s” que d’habitude.”

Un autre patient a signifié à Nayla Chidiac que, depuis qu’il tenait son journal de gratitude, il remarquait que sur son lieu de travail, il était toujours grognon alors que tout allait bien… Dès lors, il effectue un équilibre et arrive à être joyeux. Ce qui a nettement amélioré sa relation aux autres sur son lieu de travail.

  1. Choisissez le format qui vous convient. Le journal de gratitude peut être écrit à la main. Il peut contenir des mots, des images ou les deux. Il peut aussi être numérique. « Choisissez ce qui vous convient le mieux. Vous pouvez aussi combiner plusieurs formats », suggère Hani Kafoury, psychologue et coach canadien.

2. Soyez assidu. La constance est la clé des nouvelles habitudes. Déterminez l’heure qui vous convient. Prenez quelques minutes pour réfléchir et coucher vos pensées sur papier. Hani Kafoury conseille un jour par semaine pour commencer; vous vous ajusterez par la suite. « C’est une habitude que vous aurez peut-être pour le reste de votre vie. Commencez progressivement et savourez le processus », dit-il.

3. N’en faites pas trop. Une étude en anglais, et non traduite de l’université de Californie, a démontré que moins veut parfois dire mieux. Selon cette étude, les personnes qui avaient écrit dans leur journal de gratitude une fois par semaine ont vu leur humeur s’améliorer. Or, ce ne fut pas forcément le cas pour celles qui avaient écrit dans leur journal trois fois par semaine.

4. Suivez votre inspiration. Vous pouvez écrire quatre phrases ou quatre pages. Selon le psychologue, il ne faut pas voir la pratique comme une tâche à perfectionner ou à accomplir. « J’essaie d’être indulgent avec moi-même », affirme Hani Kafoury. « J’écris seulement ce qui me vient. Il est important de ne pas être trop critique. »

5. Savourez les surprises. Ce n’est pas tous les jours qu’on a des surprises : lorsque cela arrive, prenez un moment pour en profiter.

La tenue d’un journal de gratitude est une décision individuelle qui s’inscrit dans votre parcours personnel. Créez votre journal et exprimez votre gratitude de la manière qui vous convient. Si vous avez besoin d’aide ou d’inspiration, de nombreux sites Internet ou certains livres dont j’ai inséré les couvertures proposent des idées et des conseils.

Voici 10 astuces pour bien vous lancer dans votre journal de gratitude:

1. Il existe des carnets de gratitudes qu’on peut acheter et qu’il suffit de remplir. Il est encore plus gratifiant d’en fabriquer un soi-même, de prendre un cahier ou un carnet et de le customiser.
2. Écrire à la main ! Le geste est aussi important que l’écrit.
3. Le rituel quotidien est important.
4. Pas de contraintes ni de pression, il faut juste faire une petite liste.
5. Lister chaque jour au moins deux éléments de gratitude et essayer de monter jusque cinq points.
6. Pas plus de cinq minutes afin de pouvoir le faire chaque matin ou soir.
7. Garder le carnet au même endroit pour le retrouver facilement.
8. Si un jour on ne trouve rien à écrire, on se transforme en détective de l’âme et on cherche bien.
9. Après 15 jours, une fois bien à l’aise dans cet exercice, on s’amuse à faire dialoguer une gratitude avec une autre.
10. Si on a envie d’écrire encore et encore, alors on est prêt à passer à une autre forme et un autre carnet qui sera peut-être comme celui de Federico Fellini « Le livre de mes rêves ».
 

Chacun doit trouver l’exercice qui lui convient. Si on n’adhère pas à une pratique, elle n’aura pas d’effets positifs. Qu’importe la pratique choisie, la psychologie positive n’a pas vocation à faire disparaître les tracas du quotidien. “Il ne s’agit pas de se convaincre que tout va bien, prévient Rébecca Shanklandni de mettre les problèmes sous le tapis.” Mais “c’est comme si on se réveillait avec une nouvelle paire de lunettes, un nouveau regard, et qu’on découvrait enfin les petites choses positives du quotidien”, sourit Sophie Lantheaume.

En écrivant une lettre de gratitude ou tenir un journal de gratitude, il n’est pas question de mettre les problèmes sous le tapis ou de répéter inlassablement que tout va bien, si ce n’est pas le cas. C’est juste adopter un autre regard sur le quotidien. Le but est aussi de comprendre que le bonheur n’est pas une grande notion un peu vague. Il se pratique au quotidien et peut être fait de petites choses, de petits riens, si on accepte de changer un paramètre dans sa façon de voir la vie!

En tous les cas, c’est mieux que de passer son temps à tout critiquer, à râler en permanence, de ne jamais rien voir de positif et de penser que tout va mal, non ? On est d’accord sur ce point, n’est-ce-pas? Commencer un carnet de gratitude et le personnaliser, c’est aussi pousser les portes d’un monde enchanteur pour son développement personnel.


Passionnée de lecture et d’écriture, de voyages et d’art, je partage mes conseils sur l’écriture. L'écriture est devenue ma passion: j'écris des livres pratiques et des romans.

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  • Merci Laurence pour ce fil tendu que vous nous offrez et toutes vos belles propositions inspirantes. Ce soir, dans mon journal écrit qui démarre, vous y aurez une place. Merci. Patricia

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