A l’heure des réseaux sociaux et du tout numérique, chacun peut éprouver, à un moment donné, le besoin de se reconnecter à soi, en écrivant, pour aller mieux ou pour guérir d’une maladie.
Depuis la création de mon blog, je ne cesse de répéter que l’écriture fait du bien. Elle permet, entre autre, de clarifier ses idées, de mieux se connaître, d’exorciser un traumatisme ou d’éloigner une maladie de soi. Ecrire sur soi est une forme de thérapie, comme l’art-thérapie, par exemple, ou la musicothérapie. C’est une thérapie sans médicament, sans thérapeuthe au sens propre du terme, qui va permettre de sortir le négatif de soi.
Quand nous écrivons, notre tension artérielle et notre niveau de stress baissent. Nous nous sentons moins déprimé, plus léger. L’écriture influence aussi notre manière de nous comporter vis-à-vis des autres, mais aussi vis-à-vis de nous-même.
L’écritothérapie comme échappatoire
Bien sûr, il existe différentes façons de se soigner. Je ne ferai pas ici l’inventaire exhaustif de toutes les thérapies possibles, en dehors de la sphère médicamenteuse.
Ecrire est une forme de thérapie. Combien d’écrivains ou de poètes ont utilisé l’écriture au service de leurs émotions? Un très grand nombre certainement et forcément. Pour ne pas sombrer dans la folie, pour échapper à la monotonie de l’existence, pour fuir la mélancolie, pour ne pas croiser la panique liée au vide existentiel, pour affronter les peurs inhérentes à la condition humaine.
Nous pouvons mettre et insérer de la créativité dans notre vie pour nous réaliser, mais aussi pour nous résilier. Ecrire est une forme de résilience. L’écriture fait partie du processus de résilience. Boris Cyrulnik l’a très bien expliqué dans son livre “La nuit j’écrirai des soleils”.
Combien de femmes et d’hommes, depuis tous temps, ont combattu la perte, le deuil le rejet grâce aux mots écrits?
Je vous joins le lien de l’émission sur France 5 “La Grande librairie”, à laquelle ce célèbre psychiatre-neurologue a participé. Il raconte comment il s’est reconstruit après la perte des membres de sa famille dans les camps de concentration pendant la Seconde Guerre mondiale, mais aussi comment il s’est réinventé. L’émission est incroyable, emplie de dignité. Suffisamment rare pour le souligner!
Nous écrivons aussi pour sortir les troubles de nous, pour sauver notre peau en quelque sorte. Cela se nomme par une expression assez en vogue ces temps-ci: SOIGNER NOS MAUX PAR DES MOTS!
Il s’agit, notamment, de mettre de la distance entre la douleur et soi, pour aller vers une certaine forme de détachement. Ce n’est qu’en éloignant les problèmes de nous sur les lignes de nos pages que nous comprendrons petit à petit toutes les pensées toxiques et douloureuses que nous avons accumulées, en ressassant et ne ne digérant pas tout ce qui nous arrive.
Tout le monde peut écrire après une perte d’emploi, un deuil, une rupture sentimentale. Utiliser les mots pour nommer toutes les émotions qui peuvent nous envahir dans ces périodes douloureuses évite sans doute de nous faire sombrer.
Tout cela s’apparente à un travail intérieur, et il faut s’armer de courage pour commencer la démarche. A travers la création, la douleur s’estompe et se soumet à la volonté du créateur. L’écriture devient alors notre miroir, celui de notre vie, celui de notre âme.
Nous le faisons toutes et tous souvent lorsque l’on est jeune, mais une fois adulte, bien souvent, nous ne prenons plus le temps d’écrire quotidiennement ce que nous ressentons, ce que nous vivons, alors que c’est très utile.
L’écriture nous aide à assimiler les pensées négatives et les angoisses, et stimule ainsi la rduction du stress. Or, le stress est fatal pour un cerveau en pleine santé. Tenir un journal intime a un autre avantage de taille: lorque nous le relisons, nous voyons certains chémas se dessiner. Un journal intime nous permet de nous voir en perspective. En outre, nous pouvons l’utiliser pour établir des listes dde gratitude et d’accomplissements.
Ecrire sur sa maladie
Sophie Sabbage a écrit un livre, “The cancer whisperer” (“Murmurer à l’oreille du cancer”), après qu’un cancer des poumons lui a été diagnostiqué.
Dans son livre, elle décrit sa méthode et la façon dont elle est parvenue à transformer ce cataclysme en un voyage. Son récit n’est pas consacré à la guérison du cancer, mais à la manière dont son cancer a pu guérir sa vie.
Cette psychologue-coach raconte comment elle s’est réconcilée avec sa maladie et comment elle a dansé avec son chagrin. Elle dit que les malades ont le droit de ressentir du chagrin, ce qui, en soi, n’est pas mauvais. C’est une réponse comme une autre au regret, à la perte et à la douleur.
Pour Sophie, accepter le chagrin, c’est accepter l’amour. Elle a écrit ce livre car personne ne lui a dit comment affronter la panique face à la maladie, l’angoisse folle qui peut étreindre et vous fait entrevoir votre fin. Pour éviter d’être dans le déni. Elle voulait rester éveillée, alerte et concentrée pour dialoguer avec son cancer.
En tant que coach, elle a aidé bon nombre de personnes à se confronter à des coups durs, pouvant parfois sembler insurmontables. Elle savait, de prime abord, qu’elle ne devait pas s’enfermer dans le déni de sa maladie, car cela rend plus faible. Elle ne voulait pas être vicitme de sa situation, mais prendre le taureau par les cornes. Elle s’est beaucoup renseignée sur sa maladie.
Cette attitude lui a permis de garder confiance en elle et de se sentir libre. Il fallait continuer à vivre tout en étant malade, contrairement à l’avis de ses médecins, qui lui prédisaient une mort imminente. Dans son livre témoignage, elle explique que sa vie s’est énormément améliorée depuis qu’elle a eu son cancer. Elle s’est enfin mise à écrire, ce qu’elle voulait faire depuis toute petite.
En écrivant, elle a soigné de vieilles blessures, elle s’est occupée de sa santé, elle a examiné quelles relations étaient encore bonnes pour elle et lesquelles ne l’étaient pas. Elle s’est ainsi libérée du manque de confiance en elle.
Un exercice de Sophie Sabbage
Je vous livre un exercice d’écriture tiré du livre de Sophie Sabbage: le processus de rangement. Cet exercice est une interprétation libre tirée des travaux du Docteur Bradfort Brown.
Pour cela, vous allez devoir revivre un choc, par exemple une rupture ou une maladie grave. Bien évidemment, cela peut être très douloureux à revivre, mais il faut aussi débarrasser son esprit de toutes les toxines physiques et mentales accumulées pendant toute cette période.
Ecrivez les sentiments que vous ressentez en revivant ce souvenir. Quelles sont alors vos pensées? Que dit votre voix intérieure? Notez tout ce qui se passe dans votre tête à ce moment-là. Déterminez ensuite, pour chacune de vos remarques, si elle est ‘vraie’ ou ‘fausse’, ou écrivez derrière: ‘je ne sais pas’.
Remplacez toutes les pensées derrière lesquelles vous avez écrit ‘fausse’ ou ‘je ne sais pas’, par une autre pensée qui est vraie. Choisissez ensuite ce que vous voulez faire (par exemple, écrire une lettre à quelqu’un ou changer vos habitudes alimentaires), les choix que vous voulez réaliser à partir de maintenant et la façon dont vous voulez être. Visualisez que vous le faites et que vous êtes ainsi.
“J’ai le cancer mais le cancer ne m’aura pas”, écrit Sophie Sabbage
Cette période de traitement contre le cancer a été la période la plus créative, la plus pleine d’amour et la plus utile de sa vie de Sophie Sabbage.
Sophie Sabbage a compris une chose: le cancer n’est pas un ennemi; c’est une maladie. Au lieu d’engager le combat avec lui, et donc d’entrer en guerre contre son propre corps, elle a voulu faire la paix avec lui et l’écouter.
Le dialogue avec sa maladie est devenu la base de ce que Sophie appelle le “murmure à l’oreille du cancer”. Il est primordial d’entendre ce que la maladie a à vous dire, comprendre ses causes, même partiellement, en tirer des leçons et adapter votre réaction.
Dans son livre, Sophie Sabbage propose un plan très détaillé en étapes et clairement formulé. Elle montre, par exemple, comment, grâce à des exercices, vous pouvez ouvrir vos bras à vos sentiments au lieu de les ‘geler’, comment vous pouvez demander efficacement de l’aide, comment vous pouvez régir votre propre traitement.
Grâce à ce livre, elle s’est pardonnée, notamment ses erreurs et ses errances de jeunesse. La culpabilité est un poison. Elle termine son livre par une lettre commençant par “cher cancer”. Cette maladie a changé sa vie en bien. Elle a réussi à devenir la personne qu’elle avait toujours rêvé d’être.
Pour en savoir davantage, vous pouvez consulter le site de l’auteure (désolée, c’est en anglais!):
Un atelier d’écriture à l’hôpital pour des femmes atteintes de cancer
Sylvianne Perrat, épouse de Pascal Perrat qui tient un blog sur l’écriture, Entre2lettres.com, et dont je parle régulièrement dans mes articles, est bénévole à la Maison Rose à Bordeaux. Cette association, créée en février 2016, accueille les femmes touchées par tous types de cancers.
Sylvianne y propose deux ateliers d’écriture aux personnes malades de deux heures toutes les deux semaines, un émotif et l’autre créatif. Elle n’est pas thérapeuthe, mais elle est coach, accompagnante, écoutante et soutenante. Elle reste persuadée que l’écriture est thérapeuthique, au vu de des 20 ans d’expérience dans ce domaine.
Pour elle, écrire c’est dire, et c’est déjà beaucoup. Sylvianne croit en la force de l’écriture. Une douleur écrite fait souvent moins mal, surtout si elle est lue avec respect et bienveillance. Les personnes viennent à ces ateliers pour dire, exprimer, pour partager, pour ne pas souffrir seules dans leur coin. Pour être entendues, reconnues et aussi acueillies.
L’un des ateliers que Sylvianne anime est un atelier d’écriture créative, dans elquel tout est possible. Tout le monde peut jouer, rire, faire jaillir ses idées, rebondir. Dans l’autre atelier d’écriture émotive, elle avance à pas plus prudents et ne se permet pas tous les sujets. Malgré tout, elle y parle de cancer, de maladie, de mort, de souffrances et de peurs.
Dans toutes ces pratiques, le rire désarmorce les situations, rapproche les femmes entre elles. Certaines, après cette expérience, ont créé un blog; d’autres envisagent d’écrire un livre, ou restent dans la sphère plus personnelle, sous forme de nouvelles ou de journal intime.
Par son expérience, Sylvianne constate que l’écriture a le pouvoir de nous dissocier de nos émotions, de nous éloigner, de relativiser parfois. Les mots écrits, dits ou entendus sont un baume, dit-elle, même si écrire ne permet pas de guérir au sens large du terme.
L’écriture, dans ces ateliers, est faite de tout et de rien; cela va du futile au plus profond. Tout le monde y joue avec les mots et les idées, dans une ambiance qui oscille entre rires et larmes. Le but est d’aller aussi chercher l’enfant intérieur et joueur, qui se tapit en chacun de nous. Ces femmes écrivent leur mal, leurs peurs et aussi leurs espoirs. Elles mettent en mots leurs émotions.
Vous pouvez soutenir financièrement Sylvianne et son mari dans leurs oeuvres bénévoles en cliquant sur ce lien:
Le témoignage de Maris Pons
Marie Pons, des Sables-d’Olonne en Vendée a été atteinte d’un cancer du sein. De cette épreuve, elle a écrit un témoignage touchant, “Ma vie en rose”. C’est le journal d’une cancéreuse devenue malade du coeur.
C’est une belle leçon de vie d’une femme qui ne s’est jamais laissée abattre malgré la maladie et les difficultés.
Elle est professeure et écrivaine à la fois. Elle a déjà publié “Les dessous d’une femme de basketteur” en 2010. A 34 ans, Marie apprend qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. Dès lors, son quotidien de femme et de mère s’écroule. Son cancer s’avère plus résistant que les diagnostics annoncés au départ.
Dans son roman témoignage, Marie invite le lecteur à la suivre dans son parcours de combattante, au travers de son journal dans lequel elle confie ses peurs, ses petits bonheurs et son envie de vivre. Ce livre, c’est l’histoire d’une femme forte, qui surmonte avec courage les épreuves qu’elle subit, avec en plus, un certain sens de l’humour. Marie ne se plaint jamais; elle est juste inquiète pour ses enfants et ses proches, à juste titre.
Il faut bien du courage pour partager ainsi son histoire! Un livre qui fait réfléchir sur la vie, sur la valeur de la vie!
Voici un extrait:
“7 février 2013
C’est un jeudi matin comme les autres. Il fait beau pour la saison chez moi, à Vichy. Je pars travailler sereinement, j’ai bien rendez-vous avec ma gynécologue mais c’est une visite de routine pour vérifier si mon stérilet est bien en place. Fidèle à moi-même, je râle donc ce matin-là car ça va me faire courir encore plus que d’habitude, et ce n’est pas peu dire !
Le sein droit, puis le sein gauche tant qu’on y est. Aucun commentaire des deux manipulatrices, je leur demande si tout va bien, elles me répondent que c’est le docteur qui me le dira, qu’elles sont là uniquement pour prendre les clichés et ne savent pas les interpréter. C’est fini. Elles me disent de me rhabiller dans la cabine. Et je les entends parler… et très bien interpréter mes clichés finalement.
— Mon Dieu la pauvre !
— T’as vu ça, toutes ces microcalcifications !
— J’en avais jamais vu autant…
— À son âge, ça craint bichette…
Je me décompose et ma légendaire répartie m’abandonne, je suis sans voix, je n’ai pas le cran d’aller les affronter et les questionner.”
Le témoignage de Laurence Dintrat
Laurence Dintrat est née en 1969, vit à Royan et apprend à l’âge de 40 ans qu’elle est atteinte d’un cancer de la thyroïde.
Le 4 novembre 2011, Laurence entre à l’hôpital pour y subir un traitement radioactif de plusieurs jours. C’est à ce moment-là qu’elle se met à coucher des mots sur le papier, son “Patchwork 131“. Elle a écrit pendant des heures, sans relâche, pour exorciser la maladie, mais aussi pour faire ressurgir des souvenirs.
Son “Patchwork” rassemble des souvenirs, des moments de vie, d’instants emplis d’émotion. Cela lui a permis de surmonter la maladie, de positiver, de vaincre l’ennui et l’isolement. Son livre se décompose en 23 chapitres courts, écrits en quatre jours seulement, dans un style simple, délié, sans prétention aucune.
Elle dit que son patchwork de vie est « assez douillet pour s’y lover dedans. Je n’avais pas l’intention de le publier, je voulais simplement l’écrire pour ma famille et mes amis. Et puis ils m’ont encouragé à le faire, alors j’ai cédé. Je pense que cette expérience peut servir à d’autres personnes malades. »
Laurence est désormais guérie, mais cela lui a donné le goût de l’écriture. Sa maladie lui a révélé ce trait de sa personnalité. Elle a écrit depuis “Puis l’oiseau leur souffla de changer de chemin”.
Un exemple de résilience par l’écriture: Grand Corps Malade
Fabien Marsaud manie les mots avec émotion et intelligence. Il a été victime d’un grave accident en plongeant dans une piscine presque vide, qui l’a laissé trétraplégique.
Il a retrouvé peu à peu l’usage de ses jambes et a abandonné de fait sa carrière sans doute prometteuse de sportif de haut niveau. Il a ensuite rencontré le slam, et nous connaissons la suite. Il n’hésite pas à parler de résilience, il se reconnaît pleinement dans ce mot. Il voulait être sportif de haut niveau, il se retrouve handicapé à vie. Sa capacité d’adaptation a été mise à rude épreuve.
Il lui a fallu puiser dans toutes ses ressources pour s’en sortir. Il ne peut toujours pas expliquer d’où lui est venue cette force. Ce n’est pas qu’une affaire de mental. De survie, peut-être? Puis, GCM est un grand optimiste, cela l’a sûrement aidé.
Sa famille et sa bande d’amis ne l’ont pas laissé tomber. Ils ont toujours été présents et l’ont beaucoup soutenu pendant son année de rééducation. De ce fait, il n’a jamais ressenti une seule période de déprime. En tout cas, jamais devant personne.
GCM, dans la vie, n’est pas un grand émotif. Il gère ses émotions et ses sentiments, mais ses textes sont chargés d’émotions. Il a besoin de les mettre en mots pour les exprimer. Les chansons lui permettent alors de formaliser son ressenti.
Il a commencé à écrire en 2003, soit 5 ans après son accident. Mais, Fabien ne dit pas non plus que la poésie lui a sauvé la vie. Le slam est devenu une passion. Cela lui permet de prendre du recul face aux événements de la vie et aux comportements des uns et des autres.
Bien sûr, pour bon nombre de personnes, Fabien représente un exemple de rémission extraordinaire, tant physique que morale. Mais, pour lui, il n’y a pas de recette, chaque cas est unique.
En guise de conclusion
Il est difficile d’avancer dans la vie en portant des choses lourdes en soi. Ces choses peuvent immobiliser une personne et l’empêchent d’avancer dans sa vie. Alors, écrire permet de déposer sur le papier ce qui fait mal et ce qui empêche d’avancer.
Ecrire pour se libérer ne signifie pas forcément écrire son autobiographie ou son journal intime. Ecrire des histoires de fiction, voire un roman, permet aussi de se sentir plus léger. Tout auteur livre un peu de lui-même, souvent de façon inconsciente, un peu de ses expériences de vie ou de ses états d’âme.
Ecrire, c’est toujours livrer quelque part une part de soi. L’écriture a d’énormes pouvoirs, certes, mais on ne se débarrasse pas de ses problèmes d’un coup de baguette magique du jour au lendemain. Il s’agit d’une démarche exigeante qui demande beaucoup de travail, de ténacité et de pugnacité, qui oblige à se confronter à ses douleurs et à ses peurs!
C’est une super thérapie cette lecture personnelle. Quand on est dans une grande angoisse, elle peut aider beaucoup…
Bonjour Laurence,
Que de frissons dans mon corps lors de la lecture de ton article.
Et oui, nous sommes tous dans le même bateau, il ne tient qu’à nous de ne pas le laisser sombrer.
Merci pour ce partage, ce guidage.
Caroline