Crédit photo: boutique.cdip.com

Après 2 ans d’une pandémie particulièrement sévère, l’été 2022 nous tend les bras. L’envie d’évasion se retrouve jusque sur les tables des librairies où le genre littéraire du carnet de voyage tire son épingle du jeu. Cela fait plusieurs années que la littérature de voyage a le vent en poupe.

Sylvain Tesson, figure emblématique, a propulsé ce genre littéraire qui lui a permis de trouver un nouveau souffle. Les éditeurs se sont d’ailleurs engouffrés dans la veine. Ils font paraître des nouveautés et rééditent des classiques de manière constante.

Les récits d’ermitage ont été une tendance lourde de l’été 2021. Faut-il y voir une conséquence de la pandémie? Cela peut néanmoins paraître paradoxal après des mois de confinement et de mesures restrictives de nos libertés. “Into the Wild” de Jon Krakauer connaît un succès durable. Ce livre est un marqueur de ce que les gens recherchent aujourd’hui: la nature et la sobriété.

Pour écrire cet article, je me base sur Lire Magazine littéraire, N° 498, publié en juillet-août 2021.

Un mélange des genres

Il existe autant de récits de voyage que d’envies de lecteurs. A la Fnac, par exemple, on distingue les livres qui relatent une expérience de voyage, de ceux, comme “Mange, prie, aime” d’Elizabeth Gilbert, qui veulent donner des ‘leçons de vie’, et sont rangés, à ce titre, dans le rayon développement personnel.

Il existe 2 grands courants dans le récit de voyage: le grand reportage à, la manière d‘Albert Londres et Joseph Kessel, et le récit déguisé en roman, basé sur l’expérience de l’auteur, comme “La voie royale” d’André Malraux.

Vous pourrez aussi trouver, dans ce genre littéraire, des ouvrages classiques tels que les écrits de Robert Louis Stevenson ou Isabella Bird au XIXe siècle, ou les habituels écrivains de voyage que nous connaissons au XXe siècle, tels que Alexandra David-Neel ou Nicolas Bouvier ou Maurice Herzog.

Albert Londres- Crédit photo: wikipedia.org

Alaxandra David-Neel-Crédit photo: wikipedia.org
Robert Louis Stevenson-
Crédit photo: wikipedia.org
Elizabeth Gilbert-Crédit photo: wikipedia.org

Un bon récit de voyage est bien écrit, avec du souffle, de la sincérité et du vécu. Et le maître du genre est Nicolas Bouvier, affirme Tristan Savin.

Nicolas Bouvier – Crédit photo: larevuedesressources.org

Tristan Savin – Crédit photo: lavie.fr

On apprend en voyageant, sur les autres, mais aussi sur soi. Le récit de voyage contemporain part souvent d’un désir individuel d’aventure et de connaissance. Néanmoins, le genre est né du besoin de cartographier et de documenter le monde. Ainsi, “Le Livre des merveilles” ou “Le Devisement du monde” rédigé par Marco Polo en 1298, relatant ses aventures à travers la Chine, apparaît comme le véritable texte fondateur de la littérature de voyage.

Marco Polo- Crédit photo: nationalgeographic.fr

Des grandes expéditions jusqu’au XIXe siècle, obnubilés par l’irrésistible expansion coloniale européenne, on assite à l’émergence de nombreux écrivains de voyage qui retracent leurs périples dans des revues spécialisées comme National Geographic. Ce courant persiste aujourd’hui avec des récits d’exploration de Mike Horn, Elisabeth Revol ou Nicolas Vanier, qui connaissent un franc succès avec leurs ouvrages.

Mike Horn – Crédit photo: francebleu.fr
Elisabeth Revol-
Crédit photo: alpinemag.fr

Nicolas Vanier –Crédit photo: francebleu.fr

Le récit de voyage est aussi devenu, pour certains écrivains, un passe-temps qui relatent leurs escapades pour consigner des sensations ou deviser sur le monde. Laurence Sterne, René de Chateaubriand, Stendhal, Théophile Gautier, Alphonse de Lamartine et Gérard de Nerval, entre autres, se sont pris de passion pour l’Orient. En lisant des grands écrivains, on pourrait presque faire le tour du monde sans bouger de chez soi.

Même si elles paraissent quasi invisibles, les écrivaines voyageuses existent bien et occupent une place importante dans les catalogues des maisons d’édition spécialisées. Nellie Bly avec son “Tour du monde en 72 jours” a ouvert la voie.

Alexandra David-Neel a été la première Occidentale à entrer au Tibet en 1924, alors interdit aux étrangers. Elle a écrit “Voyage d’une Parisienne à Lhassa”, “A pied et en mendiant de la Chine à l’Inde à travers le Tibet”.

De nos jours, Mélusine Mallender a fait le tour du monde à moto sur les traces de pionnières. Elle a publié en 2020 “Les voies de la liberté”.

Ces nouveaux écrivains voyageurs écrivent sur leurs pérégrinations, mais partagent aussi sur les réseaux sociaux ou font l’objet d’émissions télévisées. Cela permet de relier leur épopée à une cause écologique, ou à un combat pour l’émancipation des femmes comme Mélusine Mallender. Chez les auteurs, le voyage n’est qu’un baromètre de l’état de nos sociétés , mais il sert aussi de catalyseur aux questionnements personnels.

Les écrivains voyageurs forment désormais un courant à part dans le paysage littéraire français. Sylvain Tesson a reçu une récompense prestigieuse en 2019, le prix Renaudot pour “La panthère des neiges”.

Un salon dédié au carnet de voyage

Tous les ans en novembre, pendant 3 jours, se tient à Clermont-Ferrand le salon du carnet de voyage.

C’est mon amie Catherine du Berry qui m’a fait découvrir cette pépite. Je n’y ai jamais assisté, mes obligations professionnelles ne me permettant pas encore de m’y rendre. C’est une vraie immersion dans le monde du voyage, un partage d’aventures, de belles rencontres. Il y a des carnets de toutes sortes: des minuscules, des moyens, des gros, en format livre ou en accordéon, achetés ou faits maison.

Crédit photo: tourmag.com

Crédit photo: rendezvous-carnetdevoyagecom
Crédit photo: clermont-ferrand.fr

Lors de l’édition 2020 du salon, Catherine raconte l’histoire suivante: “Cet homme, qui a traversé l’Ouzbékistan, fabrique lui-même ses carnets, avec des feuilles de papier Canson pliées en deux, insérées par cinq les unes dans les autres et attachées sommairement, le temps de les investir pleinement. Il remplit ainsi plusieurs livrets au cours de son périple, puis les rassemble en un seul livre qu’il fait relier définitivement par un artisan local, avec une peau de chèvre qu’il aura choisie sur place. Cet artiste peint, et écrit aussi beaucoup dans ses carnets, plus que tous les autres, mais en plus, il fait écrire dedans les gens qu’il rencontre.”

Crédit photo: ulule.com

“Cette autre carnettiste est peintre de la Marine, c’est-à-dire qu’elle a rejoint le groupe de quarante artistes qui ont le privilège d’avoir accès à tous les bateaux de la Marine Nationale, pour une traversée inoubliable. Ainsi, elle a reçu un grade et un uniforme, et peut partir sur un porte-avions, ou dans un sous-marin (116h dans le sous-marin), avec son paradoxal mal de mer qu’elle perd quand elle est dans les profondeurs de l’océan. Elle peint pendant tout le voyage et fait une expo à bord avant de débarquer.”

Crédit photo: amazon.fr

Pendant ce salon du carnet de voyage, il y a aussi des ateliers avec des carnettistes, un coin bibliothèque, des conférences, des expositions, des films de voyage, des spectacles, des débats, des rencontres avec des écrivains. En un mot, ce salon est d’une richesse culturelle incroyable. Le carnet de voyage ne demande qu’à être partagé, pour voyager en vrai ou dans sa tête.

Des lauréats sont aussi récompensés chaque année. Voici certains des lauréats de 2021:

Bien évidemment, il y a des invités prestigieux. Pour l’édition 2021, étaient invitées plus de 110 personnes. Les invités d’honneur étaient Olivier Weber et Eric Fottorino.

Olivier Weber- Crédit photo: lanouvellerepublique.fr
Eric Fottorino – Crédit photo: abelio.com

En guise de conclusion

Le récit de voyage est avant tout une carte postale adressée à des inconnus. C’est une forme de littérature qui s’épanouit dans sa complicité avec le lecteur. C’est en se confrontant aux autres qu’on apprend qui on est soi-même.

Voyager, c’est aussi devenir quelqu’un d’autre. Dans notre environnement habituel, nous sommes façonnés par le regard des autres. Quand on part seul, on arrive vierge dans un endroit et on peut être qui on veut. C’est ça aussi qui fait la richesse de cette littérature de voyage.

Créer un carnet de voyage, sur papier ou en ligne, c’est aussi laisser une trace, c’est donner vie à une aventure qu’on a aimée, choisie et préparée des semaines à l’avance. C’est garder un lien avec le plaisir éprouvé pendant la préparation et le vécu de ce voyage.


Passionnée de lecture et d’écriture, de voyages et d’art, je partage mes conseils sur l’écriture. L'écriture est devenue ma passion: j'écris des livres pratiques et des romans.

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  • Bonjour Laurence,
    J’aime beaucoup vous lire,
    Je trouve toujours des phrases clé qui me font réfléchir et évoluer dans mon quotidien, et souvent me font sourire.
    J’ai beaucoup voyagé. J’aimerai encore le faire mais peut-être d’abord reprendre des éléments de mes voyages précédents pour en sortir l’essence et le plaisir que j’ai eu. Et pourquoi pas en écrire quelques petits textes.
    Je vous souhaite beaucoup de courage pour les semaines à venir.
    Bien à vous.
    Janelyse

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