Gérer ses émotions n’est jamais facile pour personne, même quand on est adulte. Ca l’est encore moins pour des adolescents qui se cherchent. C’est même certainement l’une des choses les plus difficiles à réaliser. Gérer ses émotions est un apprentissage, au même titre que les autres. Ce n’est pas inné!

Tout d’abord, il conviendrait de comprendre de quoi on parle quand on évoque les émotions. Elles sont parfaitement naturelles et indispensables. Certes, nous ne sommes pas forcément capables de les gérer, encore moins de les contrôler. On a surtout du mal à les identifier correctement.

Les émotions rythment notre vie quotidienne et bizarrement, elles sont mal perçues. Elles ne le devraient pas, car elles sont nécessaires à la construction des humains que nous sommes. Nous ne sommes pas des machines. En ce sens, l’écriture peut donc nous aider.

Le réflexe de tout garder pour soi

J’ai pu constater, dans ma pratique d’enseignante au long cours, que de nombreux jeunes gardaient leurs ressentis pour eux, pour plusieurs raisons. D’une part, parce que dévoiler ses émotions dans nos sociétés occidentales est mal vu. Cette attitude passe pour de la faiblesse. On n’apprend pas aux enfants ni aux adolescents à maîtriser leurs sentiments, leurs émotions, alors que cela pourrait grandement les aider à s’apaiser.

Les jeunes intériorisent leurs émotions, souvent par pudeur. C’est un peu la honte devant leurs pairs de se laisser aller à un moment de faiblesse pendant lequel on se dévoile un peu. Le jugement d’autrui est très important à cet âge-là. C’est un moment où ils peuvent se sentir fragilisés. Ensuite, ils craignent aussi de décevoir leurs parents. Ils ont peur de déranger ou n’ont pas forcément confiance dans les adultes en face d’eux.

Les humains sont des êtres sensibles et il arrive qu’à certains moments de la vie, comme l’adolescence, il soit plus compliqué d’extérioriser ce que l’on ressent. Gérer ses émotions ne signifie pas les refouler. Bien au contraire. Souvent, le sport et la pratique d’une activité artistique aident à rétablir un bien-être indispensable.

La thérapie narrative

La thérapie narrative a été développée par deux psychologues australiens, Michael White et David Epston. Elle se déroule selon 3 principes:

1. Décrire le problème: “je manque de confiance en moi, je n’arrive plus à communiquer avec mes parents…”
2. Les perspectives alternatives: déconstruire les récits actuels. Aider le jeune à créer des récits sur sa vie plus utiles et plus satisfaisants.
3. L’action: par exemple, écrire une lettre à ses parents, lister ses qualités et ses points forts, écrire des petits défis à se lancer…

Cette approche narrative permet notamment de mettre le problème à l’extérieur de soi: sur le papier. Cela peut faire toute la différence, car un jeune peut éprouver des difficultés à s’exprimer librement. Cela représente une valeur symbolique forte et permet, par la même occasion, de se réapproprier sa vie. Tout le monde n’est pas extraverti ni expansif et tout ne monde ne possède pas les mots nécessaires pour évoquer ses problèmes. On n’a pas toutes et tous en nous la capacité d’exprimer oralement ce que nous ressentons.

Il est souvent compliqué de confier oralement ce qu’on a sur le coeur. C’est plus facile de le coucher sur le papier, car on prend déjà une certaine distance avec les mots que l’on a sortis. Beaucoup d’adolescents ont du mal à se projeter dans leur vie, car ils pensent qu’ils ne méritent pas d’être aimés. Souvent, ils ne se trouvent pas beaux, pas dignes d’intérêt. Ils manquent principalement de confiance en eux, chose que l’on n’apprend pas dans le système scolaire occidental.

Certains jeunes renferment en eux beaucoup de colère. C’est une émotion très difficile à exprimer. Ecrire, ne serait-ce qu’un petit mot, pour expliquer l’objet de sa colère ou de sa frustration peut aider à dénouer certaines situations conflictuelles. On apprend ainsi à exprimer ses besoins plus facilement à la longue.

Crédit photo: welcomeaix.blogspot.com

Ecrire aide à se libérer

Aux enfants et adolescents, on peut leur demander d’écrire sur plusieurs thèmes:

• leurs rêves
• leurs objectifs
• leurs points forts
• leurs qualités
• une lettre à une personne de leur choix
• une courte fiction
• etc.

Un enfant qui se projette est un enfant qui va bien, qui peut s’épanouir, qui cherche à avancer et à se construire dans la futur. A partir de 7-8 ans, les enfants quittent le monde de l’insouciance et commencent à freiner l’expression de leurs émotions. En s’intégrant de plus en plus dans la vie sociale, notamment en imitant leurs pairs, ils se heurtent à 2 dangers:

1. se comparer aux autre et avoir une image d’eux-mêmes fragilisée
2. inhiber leurs émotions qu’ils jugent trop personnelles.

Crédit photo: espacealma.com

En couchant ces émotions sur le papier d’une façon ou d’une autre, les enfants parviennent à les exprimer, comme ils le faisaient naturellement quand ils étaient plus petits. Cela leur permet aussi de préserver leur intimité et leur pudeur, naturelles à partir d’un certain âge.

En ce qui concerne les adolescents, la comparaison avec les autres se renforce et le manque de confiance en eux s’intensifie. Le sentiment de honte, dû à la pression sociale et à la pression scolaire, apparaît plus fort. Alors, écrire sur ses doutes et sur ses angoisses à cet âge compliqué qu’est l’adolescence est vital et libérateur. Cela peut également dénouer certains conflits, notamment avec les parents.

Ecrire nos émotions

Ecrire nos émotions peut devenir une manière simple et efficace de maîtriser nos problèmes. Par exemple, demander à vos enfants de définir leur émotion du moment et de donner une explication rapide sur un petit papier (du genre post-it). Identifier l’émotion présente peut donner du sens au ressenti du moment et comprendre comment l’enfant fonctionne. Comprendre ses émotions et pourquoi elles arrivent relève d’un décrypatage qui n’est pas aisé.

Le but de ce genre d’exercice est de dédramatiser un conflit naissant à cause d’une émotion trop forte, impossible à gérer sur le moment. Cela clarifie l’esprit et l’enfant prendra l’habitude de décrypter ce qui se passe en lui. Il apprendra, par la même occasion, à mieux se connaître, à comprendre les messages de ses émotions et à en prendre soin de manière plus efficace. Comprendre et analyser ses émotions fait partie des compétences émotionnelles, dont on parle tant en ce moment. Vous rendrez sacrément service à vos enfants en prenant le temps de la aider de la sorte.

Crédit photo: apprendreaeduquer.fr

Ecrire ses émotions permet:

• d’aller mieux
• de clarifier son vécu
• de prendre conscience de ses réussites et de ses échecs
• de progresser
• de souligner ce qui est important

Exprimer par écrit son vécu aide à le clarifier. L’écriture permet d’identifier, de discriminer dans les expériences de vie les événements marquants. Écrire rend ce que nous ressentons plus concret et plus précis. Cela nous permet de prendre du recul. Même quand nous croyons ne pas savoir ce que nous ressentons, il est possible d’écrire sans réfléchir. L’écriture finit par faire sens, sans qu’on l’ait anticipé, « comme si » notre main ne nous appartenait pas vraiment et savait mieux que nous. Une autre variante possible est d’écrire comme si nous nous adressions à quelqu’un en qui nous avons entièrement confiance.

Ecrire ses objectifs de vie ou professionnels, ses difficultés, ses succès, permet de mesurer l’ampleur du chemin accompli, de faire le bilan, de se réorienter, de donner une direction plus nette à sa vie, de rechercher une certaine cohérence. Ce sont des choses qu’on n’a pas l’habitude de pratiquer et qui sont, pourtant, indispensables à notre croissance.

On peut aussi se procurer un journal émotionnel, ou en construire un soi-même. Avec le tableau ci-joint et non exhaustif sur les émotions, vous disposez d’un lexique approprié pour réfléter vos émotions. Ainsi, vous pouvez élargir votre vocabulaire émotionnel. Il convient de voir le journal émotionnel comme un guide, un compagnon de route, un exutoire. Il vous autorise à relativiser la portée de vos sentiments, de vos pensées les plus sombres, voire les moins optimistes.

Je ne suis pas une gourou ni une apôtre de je ne sais quelle secte. Mes articles de blog visent à explorer toutes les possibilités et ouvertures que l’écriture a à nous offrir. Je ne prétends aucunement apporter des réponses aux questions existentielles qui hantent chacune et chacun de vous. Que cela soit clair!

Il est normal d’avoir peur face au changement. Et on en vit plein en ce moment. Faire évoluer ses conditions de vie, quel que soit le domaine concerné (travailler sur sa timidité, changer d’orientation professionnelle, déménager à l’autre bout du monde, …) représente un sacré challenge psychologique. Sortir de sa zone de confort, c’est aussi braver ses propres limites. S’accorder le droit d’apprendre de ses erreurs est un sacré challenge.

Pour créer votre journal émotionnel, vous n’êtes pas obligé d’acheter des modèles tout faits. Un simple cahier ou un fichier de traitement de textes feront l’affaire. La démarche consiste à s’accorder du temps -pour une fois- régulièrement, pour décrire vos ressentis vos appréhensions. Bien sûr, vous oubliez le style, l’orthographe et la grammaire. Si vous parvenez à écrire le récit de vos journées en appliquant les émotions concernées, vous déchargez l’aspect émotionnel des événements.

Une fois la rédaction achevée, vous consulterez vos écrits, en respectant un délai de quelques jours. La lecture vous permettra de réaliser que votre état d’esprit du moment influence votre conception de l’obstacle qui se dresse devant vous et que vos impressions à un instant T, ne peuvent définir la réalité de votre potentiel.

Crédit photo: apprendreaeduquer.fr

Bien plus qu’un simple journal intime, le journal émotionnel est un outil favorisant la mise en relief de vos aptitudes. Quelques simples annotations peuvent devenir la base d’un raisonnement, finissant par vous pousser à prendre une décision. On a tendance à trop souvent négliger l’importance de l’écrit, de l’implication que cela représente. Le journal émotionnel, c’est une matérialisation de votre désir d’évoluer.

Si le journal émotionnel est efficace pour redéfinir vos objectifs et s’assurer que vos efforts payent, il peut aussi vous permettre d’améliorer vos compétences relationnelles et vous aider à vous départir de l’impulsivité. En cas de conflit, il sera par exemple plus utile de consigner votre hargne, votre ressentiment et votre douleur dans notre cahier que de l’exprimer ouvertement en insultant les personne en face de vous, devenant ainsi un grossier personnage.

L’écrit est libérateur, salvateur. Il nous ouvre l’esprit et le cœur. Il est selon moi le meilleur moyen pour prendre conscience de qui nous sommes et de ce dont nous sommes capables. Certes, ce ne sont que des mots qui noirciront des pages blanches avec vos émotions …Cependant, toute évolution commence par une réflexion. Il faut bien qu’elle commence d’une manière ou d’une autre…

Crédit photo: anti-deprime.com

Et pour les enfants:

Ecrire un journal des émotions peut être un outil puissant pour améliorer sa connaissance de soi.

Nous vivons dans un monde dans lequel nous perdons l’habitude d’écrire. La plupart des gens n’écrivent que ce qui est strictement nécessaire, comme des e-mails, des messages texte, des listes de tâches, des notes de réunion ou des rappels. Rares sont celles et ceux qui ont l’habitude de mettre leurs réflexions et leurs sentiments sur papier.

Cependant, écrire un journal peut être une habitude qui change la vie. D’innombrables études, notamment de la part de Gille Bolton, chercheur au King’s College of Medicine and Art de l’Université de Londres, soulignent que l’écriture sur notre vie quotidienne, nos émotions, nos idées et nos objectifs a des effets bénéfiques sur la santé physique et mentale.

Ecrire dans un journal émotionnel améliore:

• l’estime de soi
• la motivation pour la vie
• la confiance en soi
• sa connaissance des domaines émotionnels et cognitifs
• l’autoguérison du corps
• la lutte contre les processus infectieux
• la guérison des blessures
• la clarification des sentiments et des pensées
• la porbabilité d’atteindre ses objectifs
• la capacité à résoudre des problèmes
• la capacité à surmonter les moments difficiles
• améliore la santé globale.

Crédit photo: youtube.com

Ce qui est important, c’est d’accuillir le ressenti émotionnel, et ne pas le juger. Il est important aussi d’essayer de décrypter ce qui se passe dans le corps, si on a des sensations physiques particulières. Il est tout aussi important de laisser venir les images ou les pensées qui en découlent. Elles ont autant de valeur.

En guise de conclusion

Tenir un journal de vos émotions pourrait bien sauver votre santé mentale, dans un monde qui provoque de l’angoisse et de l’anxiété. Cela pourrait repousser toute forme de burn-out professionnel ou familial. On ne s’attend pas forcément à ce que ça puisse apporter autant de bienfaits. Cela aide notamment à gérer la surcharge mentale et émotionnelle.

Nous sommes toutes et tous surexposés à la surinformation permanente dans notre société où tout va à mille à l’heure. Ce mode de fonctionnement rend parfois le tri de données et la prise de recul difficiles. Il est vital de mettre en place des moments de déconnexion.

Le journal des émotions est un véritable outil de développement personnel. A la longue, notre réflexion devient plus positive, plus optimiste. On se vide le cerveau. On se libère de ses émotions et quel bien cela peut faire!

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