Joyeux anniversaire
Pour mon vingt-cinquième anniversaire, soit presque deux mois après mon mariage et mon super voyage de noces sur l’île d’Oléron, je m’attends à un chouette cadeau de la part de mon mari. Je n’invite personne pour l’occasion, surtout pas la famille Berneuil. Je désire rester en tête-à-tête avec mon mari.
C’est bientôt la fin de mes vacances et mon mari travaille toute la journée. Je lui réserve un bon repas à son retour. Je me doute qu’il ne m’invitera pas au restaurant, seul à seul. Il n’aime pas ça. Beaucoup de ses amis sont en vacances. Il s’ennuie.
J’imagine recevoir une paire de boucles d’oreille en cadeau d’anniversaire. C’est le genre de cadeau que je préfère. Ça me fait quand même un quart de siècle ! Ça se fête !
En guise de cadeau de ma belle-mère Ghislaine, j’ai entendu des allusions à peine voilées :
« J’espère que tu n’attendras pas trop longtemps pour donner un petit à mon fils chéri. Ça ne se fait pas dans la famille Berneuil de donner un héritier des années après le mariage. C’est la tradition. Une épouse doit accomplir son devoir rapidement ! ».
« Belle-maman, dois-je vous rappeler qu’on n’est plus au Moyen-Age tout de même. Je viens juste d’être titulaire de mon poste, ce n’est pas pour arrêter tout de suite. Tradition ou pas, je déciderai avec Max quand on voudra avoir un bébé. »
Je ne suis pas au bout de mes surprises.
« Je me suis dit que t’aurais envie d’un livre, toi qui aimes tant lire, ma puce », Max commence sur un ton doucereux, qui en dit long sur ses intentions de la soirée. « Voilà, c’est pour toi : BON ANNVERSAIRE. Tu m’excuseras, mais je n’ai pas eu le temps de t’acheter des fleurs. »
Je suis impatiente : c’est la première fois que son mari m’offre un livre depuis deux ans que nous nous connaissons. Un livre, c’est du temps de perdu pour lui. Le paquet est original et ne laisse pas du tout présager du contenu. Le fameux Kamasutra !
J’affiche un air de surprise, il y a de quoi. Je reste ébahie, le temps pour moi de comprendre le sens caché d’un éventuel message.
Max s’approche alors moi, m’enlace, et d’une voix câline, me murmure à l’oreille :
« Au moins deux fois par semaine, chérie, c’est un minimum, tu le sais bien… »
Aucun mot ne sort de ma bouche pour protester. Je suis saisie et je me sens prise au piège, comme dans un engrenage que je ne peux contrôler. Ça fait beaucoup d’allusions pour mon anniversaire.
Ma belle-mère est-elle de connivence avec son fils ? Je l’entends, malgré moi, déverser son fiel à mon sujet, dans mon dos quand son fils rend visite à sa mère sans moi – ce qui arrive souvent quand il travaille. C’est comme une musique de fond agaçante. En dehors de me faire des reproches, Ghislaine est incapable d’avoir une vraie conversation avec moi, sa bru.
Sans même me regarder, Max renchérit :
« Tu mets une nuisette affriolante pour ce soir, ma puce ! On va fêter dignement ton anniversaire. Ça va mettre un peu de piquant à la soirée, après le repas que tu nous as préparé. Va falloir que tu apprennes à cuisiner avec ma mère ».
« Pardon ? Je ne vais pas passer ma vie avec ta mère, sûrement pas ! »
« T’énerves pas Pupuce, pas un jour comme aujourd’hui…Viens, on va regarder un film coquin…j’ai trop envie de toi ma puce d’amour… »
Je cache que j’enrage. C’est pratique la colère, pour camoufler ce qu’on pense, mais il faudrait au moins pouvoir la déverser sur quelqu’un. Ce soir-là, ce n’est pas le bon timing. Max est empressé auprès de moi.
Il obtient toujours ce qu’il veut.