
La proposition d’écriture N° 106 était la dernière de la saison.
Comme le temps passe vite! Vraiment trop vite!
Je remercie très chaleureusement toutes les autrices et tous les auteurs d’écrire régulièrement pour faire vivre l’atelier d’écriture sur mon blog.
Je fais, depuis le début, des rencontres incroyables, de personnes qui me soutiennent, dont certaines sont devenues des amies. C’est une vraie richesse!
Vous vous faites du bien en écrivant, mais vous nous faites aussi du bien en vous lisant!Que d’imagination, d’inventivité, de créativité!
Voici vos textes. Je vous en souhaite une belle lecture.
De Jacques
Juillet
L’été, presque au milieu
Insouciance de mes douze
Partir, comme le rêve
À l’orée du petit matin
Le soleil ne pointe pas encore
Valise, valise, s’habiller en vitesse
Comme si j’avais dormi
Éveil sans réveil
Heureux, prendre la route
La 132 et ses six heures
Pour voir la mer
Le fleuve et sa marée
Les grands-parents : le 2 Caron
La forge et son indescriptible odeur
Aller à la grève, celle des Rioux
Tante Colette et son sourire
La cousine et son petit minois
Et l’air comme une sculpture
À s’en envelopper
L’immense galerie
À regarder, à compter les voitures
Les rouges, les bleus, les Volks, les Buick
Écouter venir le train
Celui de la Gaspésie
Mais repartir dans l’autre sens
Finir le mois, commencer l’août
Puis pleurer pour fuir l’école
D’Isabelle
LES POUSSETTES NOMADES
J’ai deux ans, je traine dans ma poussette, ma mère me dit ‘lève-toi et marche’. Elle me prend pour Jésus ma parole, elle m’embrasse d’un bisou baveux et reprend de plus belle, lève-toi et marche vers le banc, tu vois le monsieur et la dame en vert, ce sont tes grands parents.
Des parents j’en ai déjà deux, et ceux-là, ils ne sont pas grands. Et bien non ! Je ne me lèverai pas. De ma poussette je vois tout, j’imagine une course, une course de poussettes, évidemment ça n’est pas moi qui pousse. Toutes les mamans s’éreintent à pousser plus fort, plus vite. Les rues se remplissent de poussettes. Les papas peuvent rouler en 4 x 4, ils ne font pas le poids. Ils crèvent de jalousie à en crever les roues des poussettes. Là je dis pouce. Non mais, faut pas pousser bébé dans les orties. Un papa qui te dit ôte-toi de là que je m’y mette, des papas tout rabougris dans des minis poussettes et leurs gros derrières qui dépassent.
Me voilà adulte, marchand de poussettes hors pair et hors de prix. Des joujoux dernier cri pour gamins paresseux. Trente personnes sous mes ordres. Je mène l’affaire d’une main de maître, sans mettre la main à la pâte. Je fais trimer le petit personnel. Il me doit bien ça. Le boulot, c’est rare et cher. Il faut bien payer de sa personne.
En maison de retraite ça ne changera pas beaucoup. Je me ferai pousser. Pas en fauteuil roulant, trop laid. J’inventerai les poussettes pour vieux. Les infirmières feront la course. Les rues se rempliront de poussettes. Celles pour vieux croiseront les engins des gamins. C’est bien, l’intergénérationnel.
UN JEU D’ENFANT
Un jeu d’enfant, tu parles. Ceci n’est pas un jeu d’enfant. Ma grande sœur refuse de me le prêter. Ça me rend dingue. Elle prétend que je suis nulle en maths. Ça valdingue dans ma tête. Oui c’est vrai je suis nulle en maths, je récoltais les zéros et j’en faisais des tunnels sous ma manche, comme Monsieur Brel dans sa chanson. Mais faut pas être bon en maths pour jouer avec ce truc-là. Faut juste assembler les couleurs. Et moi je suis la reine des couleurs. Mes petites robes me l’ont dit.
Je les empile les unes sur les autres, en jouant les asymétries. Je fais dépasser un pan par ci, un pan par là. Non pas les pan pan pan de mon papa sur les fesses, ou les pans de la forêt qui résonnent sous son gros fusil. Je parle des pans de mes robes. Eh oui j’ai du vocabulaire. Je suis nulle en maths, mais je commence à lire le gros Larousse de ma grand-mère. Dommage qu’elle ne puisse pas le lire avec moi, vu qu’elle est partie au paradis des bonnes intentions un peu avant mes trois ans. Je n’ai que de tous petits souvenirs, cachés dans de minuscules poches de mon cerveau, mais je sens ses mains tourner les pages du gros Larousse pour moi. Je sens son regard au-dessus de mon épaule, comme celui d’un ange gardien. Parfois, elle se fait toute petite, elle pose sa canne, s’assoit sur mon épaule et me parle avec sa voix douce. Sa voix rentre par mes trous de nez, mais elle ne ressort pas. Je la garde précieusement avec un tas d’autres trésors et de mots savants. Rubik’s Cube, il s’appelle son truc à ma grande sœur. C’est pas un mot savant. Un rubis ben oui pour la face rouge et le cube bien sûr. Le fabricant a oublié de nommer les autres couleurs, mais c’est pas grave. Je le lui dirai si je le rencontre. Je lui dirai aussi qu’il ne doit pas noter sur l’emballage « à partir de dix ans, mais à partir de quatre ans et demi ». J’aurai cinq ans le mois prochain. Ben oui je suis nulle en calcul, mais je sais lire les chiffres.
Brigitte, c’est ma grande sœur, il ne me reste pas très longtemps à la voir, mais je ne le sais pas encore. Alors je me dispute sans arrêt, au lieu de lui dire que je l’aime. Je l’embête, lui tire les cheveux, lui donne des coups de pieds. Mes pieds sont petits, mais costauds. Elle dit que c’est un jeu d’enfant. Elle dit aussi que c’est un jeu de logique. Elle le répète sans arrêt à maman comme si maman ne comprenait rien. Je te jure. Si c’est un jeu d’enfant, il m’apparait évident qu’elle doit me le donner. Logique ! Question logique, ma sœur c’est zéro, pire que mon tunnel sous ma manche.
Alors elle va me le donner ce jeu d’enfant oui ou non ! Maman n’arrête pas de me dire « arrête d’embêter ta sœur ». Si elle ne me le donne pas je vais faire une scène, une scène pire qu’au théâtre où j’aimerais aller plus souvent. Tous les personnages seront des Rubis cubes à une couleur. Et je jouerai uniquement pour des enfants en dessous de quatre ans et demi. Comme elle a dix ans, elle ne sera pas invitée et toc.
Pourquoi j’ai jeté son Rubik’s Cube par la fenêtre ? Elle a couru le chercher, sans regarder. Et ce camion de pompiers qui roulait comme un dingue. Semer la mort pour éteindre un incendie. Et ce feu sur mes joues ! Aucune larme, aucun torrent ne le refroidira, jamais.
UNE JEUNESSE A COUPER LE SOUFFLE
Son enfance lui revenait dans toute sa pureté. Alan était assis dans sa chambre, sous les toits d’une immense bâtisse en colombages. La grande bâtisse sursautait du pas rapide de ses parents, de leurs sautes d’humeur, de leur absence aussi. Ce mouvement perpétuel lui donnait le tournis. La vie était-elle faite que de sauts d’obstacles ?
Des crayons de couleurs flânaient sur le sol. Les bleus attendaient patiemment, les bras derrière leur mine bien taillée. Les jaunes se régalaient à l’idée d’égayer un champ de tournesols. Les roses se roulaient sur le plancher, en gloussant. Le bruit de la maison les faisait rire.
Pour l’heure les crayons se doraient dans un rai de lumière qui traversait la pièce. Les carreaux étaient sales. Derrière les carreaux, des barreaux. Le tout le protégeait du monde. Mais le soleil passait toujours. Il glissait ses rayons à travers la grisaille pour se nicher dans ses cheveux bouclés, de belles boucles dorées qui lui donnaient l’air d’une poupée. Alan aimait ressembler à ses poupées. Il leur dessinait des robes. Il étalait une feuille de papier de deux fois sa taille, posait de minuscules statuettes aux quatre coins, aiguisait ses crayons et se mettait à rêver.
Certains soirs les meubles volaient. Il devenait chevalier du territoire allant de la commode à la table d’étude. Les chevaux de bois galopaient, faisant voler la poussière du parquet. Alan adorait le bruit des sabots.
Son enfance lui revenait dans toute sa pureté. Son enfance à couper le papier des pages, à déflorer les livres, à percer les abcès, à meurtrir l’innocence à coups de lames de savoir. Son enfance il la ressentait, encore, comme s’il pouvait en rester quelques lambeaux misérables accrochés au squelette de ses mémoires, comme si les cellules neuronales avaient gardé autre chose que le mal, comme si, comme si, … comme s’il jouait à On disait que.
On disait que j’avais pas mal. On disait que je voyais pas les poings. On disait que c’était quand j’étais pas tout seul, tout seul. On disait que la salle d’études était un dedans de grand bateau parti pour les Indes, les Grandes Indes si lointaines qu’on ne pouvait pas les voir. On disait qu’on arrivait sur des Îles en se Levant, qu’on sentait des parfums frais comme des chairs d’enfant entre les fleurs du mal au ventre, qu’on trouvait des petites lunes argentées enchâssées dans le charbon des nuits, on disait même qu’une étoile bleue survolait ma cabine, on disait que j’étais pas bleu de coups, mais rose de plaisir, on disait que j’étais un enfant quand même, que je faisais le portrait d’un oiseau pour Prévert et on disait – oh oui, je sais ! – on disait que l’oiseau c’était moi.
On disait que la salle d’études s’ouvrait sur les géologies primaires des anciens contes et que les animaux de l’Arche de Noé sortaient avec moi au soleil, on disait que j’étais la girafe et que j’attrapais des réponses aux questions de mon précepteur, des réponses là-haut sur les feuilles, dans les branches mathématiques. Je n’avais plus peur des chiffres dans le jardin des lettres entre mes côtes, entre mes lèvres, entre mes paupières sans tain, le jardin j’y courais comme un fou derrière les papillons dans les herbes parfumées entre les lignes d’une histoire sans fin, on disait, on disait – attends ! On disait que j’étais devenu musique en plein n’importe où et dans ce plein n’importe où rempli de douceur il n’y avait plus de père, il n’y avait plus de mère, il n’y avait plus que du bon temps et je faisais de l’aigle à voile avec mon ours, avec mes fusiliers marins, mes cosmonautes et mon garage. Je conduisais la voiture de James Bond et partout j’en sortais indemne comme un qui vient de naître, et alors Zorro arrivait avec Monsieur Henri dans le sillage d’une chanson douce et les copains arrivaient, celui qui a les cheveux longs comme une fille, tous les garçons et les filles derrière Françoise et Sylvie, et on prenait le train des neiges en route pour Star Wars.
On disait qu’il fallait surtout pas regarder en arrière parce qu’en arrière c’est le futur. L’anticipation. Il ne faut pas laisser la mémoire des coups envahir sa planète sinon, c’est comme les baobabs, ça mange toute la terre et il n’y a plus de place pour une rose. Il faut prendre soin de sa planète. On disait qu’une rose ça pouvait bien venir un jour dans ce jardin extraordinaire, ce jardin d’où l’on regarde la mer danser sur une chanson de Trenet, avec un sourire à décrocher la lune, à bouffer des haubans. Allez, allez, on disait que Jeff était content, battu, courbatu mais content. Battu comment ? Ben battu quoi, comme un rocher battu par la vague – quel rocher a jamais été triste d’une vague ? Pas de vague à l’âme pour une côte solide comme un rock de Buddy Holly, tout va bien, on disait tout va bien, on faisait tout va bien, on rêvait tout va bien, on vivait le tout va bien du presque rien héhé, eh, tu m’entends ?
Dis, qu’on était heureux comme des enfants. Que j’avais pas mal. Que je voyais pas les poings. Que c’était comme quand j’étais pas du tout tout seul. On disait pas que la salle d’études était un dedans de grand bateau parti pour les Indes, les Pâtîtes Indes, ou alors un ventre de baleine à dormir debout, on arrivait sur des Îles du Couchant, on sentait des parfums frais comme des chairs d’enfant entre les fleurs du mal au ventre pas chouettes, et j’avais trouvé une petite lune argentée dans le charbon de la soute au grand large à minuit, vous ferez ce que vous voudrez, une étoile bleue, même qu’une étoile bleue survolait ma cabine, et tu sais quoi ? Dis, écoute, mais allez, tu sais quoi ? On disait que j’étais pas bleu de coups, pas rouge de honte sous la lame de savoir plantée où il faut pas.
Comme si j’avais pas joué à On disait que, comme si cette pureté me revenait dans toute son enfance, par magie. Et je courais encore pour qu’on ne m’attrape pas.
De Claude
ANNEAUX AMOURS ! (liaison obligatoire)
Un souvenir de vacances, vous dites ? Il y en a plus d’un qui m’a marqué, mais celui-là…
L’été sur la plage de Cannes, il fait un soleil radieux. Mais quand le soleil cède sa place à la lune, les baigneurs cèdent la leur aux chercheurs. Aux chercheurs d’or, j’entends, armés non de la pelle et de la traditionnelle poêle à frire comme lors de la ruée vers l’or aux Etats-Unis, mais d’un détecteur électronique qui émet un son strident en présence de métaux.
Jamais l’idée, ni l’envie d’aller explorer le sable de la plage ne m’avait effleuré l’esprit avant que des amis (précieux, il faut le dire) nous suggèrent, à mon épouse et à moi-même, de participer à une « chasse au trésor ». Il paraît que quand on le leur propose, les gens qui aiment ce genre de chasse accourent.
Je me lance alors un défi : trouver un objet de valeur à l’endroit même où nous avions planté notre parasol cet après-midi-là.
Et, bien que n’étant pas sur le sable, je compte bien revenir avec un trésor d’orpailleur chanceux.
Las, au bout d’une demi-heure de recherche intense, l’aiguille de mon détecteur n’a quitté son zéro de départ que pour me signaler une barrette, pas de diamants mais à cheveux, un bracelet de pacotille et un trombone gisant dix centimètres sous le sable, perdu, j’imagine, par un étudiant préparant son examen de rattrapage de septembre ou un homme d’affaires parcourant ses dossiers.
De son côté, mon épouse a déjà un smartphone, certes d’un modèle ancien, et un joli collier à son tableau de chasse. C’est la fête des perles !
Vais-je, pour ma part, rentrer bredouille… ou avec mes trouvailles ridicules ?
J’enrage, grommelant entre les dents le mot « butin », mais en le faisant commencer par une consonne plus explosive, quand, miracle, mon détecteur se manifeste brusquement. Je me baisse pour ramasser un petit objet circulaire qui, dans la lumière crue de ma torche, s’avère être une belle alliance en or !
C’est alors que je constate, horrifié, si j’ose dire, qu’il s’agit de mon alliance : les inscriptions gravées à l’intérieur le confirment et d’autre part, mon annulaire gauche n’est plus bagué. Sans bague !
Je l’enfile aussitôt à mon doigt. Je cache ma joie, j’évite le groupe et je m’isole pour reprendre mes esprits. Moi qui me moquais du tiers comme du quartz de ce genre de chasse, je mesure soudain l’importance de l’incroyable découverte que je viens de faire et que je ne peux révéler à personne. Surtout pas à mon épouse. Je repense au serment que nous avions fait ensemble il y a quelques années, et cela s’accompagne d’un serrement de cœur et d’une larme furtive.
J’ai l’impression d’avoir échappé à un désastre : on ne platine pas avec l’amour. Bien sûr, malgré ma passion pour les pierres précieuses, je n’espérais nullement tomber sur des gemmes (à la folie), mais, bague à part, je me sens soulagé, et soudain gai comme un poinçon.
Cette chasse au trésor fut pour moi une révélation. Un simple anneau (fût-il en acier, en cuivre ou en laiton) me faisait réaliser à quel point j’étais attaché (et même pieds et poings liés) à ma bien-aimée. Un anneau ni mat ni brillant, fait d’or dur, inaltérable comme notre amour. Un anneau au pouvoir plus puissant qu’une chaîne !
Jamais je n’ai osé dévoiler à mon épouse cet épisode, finalement heureux, de cette fameuse chasse au trésor. Mais il m’arrive parfois de me demander avec angoisse ce qu’il se serait passé si je n’avais pas retrouvé ce jour-là ce symbole de notre union. Une autre alliance, même identique, aurait-elle eu la même valeur sacrée que la première ? Notre amour aurait-il duré ?
Dès lors, j’ai fait réduire la taille de mon alliance qui désormais enserre mon annulaire fortement.
Et je suis devenu un inconditionnel de la bague-attelle !
De Françoise V
J’avais 10 ans. En classe de Cm1, les vacances de printemps se profilaient ; il ne me restait plus que quelques heures d’attente pour les commencer. L’évènement tant attendu arriva plus vite que prévu puisque mes parents vinrent me chercher à l’école avant l’heure de la sortie. Oh ! Miracle mon père était du convoi… du jamais vu. Quelle surprise quand la maîtresse m’appela dans la cour de récréation pour m’avertir de leur venue. Je n’en croyais pas mes oreilles. Ces vacances-là n’avaient pas été anticipées. Le voyage en question s’est décidé en quelques heures dans l’après-midi. Mon père adorait l’imprévu, les surprises, le mouvement, les inattendus ! Sa chère tante Zette avait suggéré de rejoindre son époux coiffeur dans le sud, à Argelès sur Mer, avec notre petite famille. Nous étions 6 personnes concernées pour ce voyage impromptu. Toutes ont voté oui ! Il ne restait que moi, à qui bien sûr, on ne demandait jamais l’avis du fait de mon âge et de ma position de dernière de la fratrie.
Nous voilà partis d’abord en réunion familiale chez la tante Zette pour mettre au point ce périple qui devait se faire dans la nuit. L’avantage de rouler en nocturne était l’absence de pique-nique. Tout le monde était supposé plonger dans le sommeil durant ces quelques heures, mis à part le chauffeur connu pour sa résistance nerveuse et ses capacités à avaler des kilomètres de route.
La tante, d’une assez grande originalité, savait mettre de l’ambiance et de la bonne humeur au sein du groupe. Assise par terre dans sa cuisine, elle argua son projet d’arriver par surprise chez son conjoint au petit matin. En encourageant son neveu, en le flattant pour qu’il accepte et valide ses idées, celle-ci faisait avancer ce projet de printemps. Tout le monde riait de ses blagues, de ses jeux de mots. Ma mère aimait cette ambiance car elle sentait mon père aux petits ognons. Mes sœurs savouraient l’idée de partir au bord de la mer Méditerranée pour profiter de la plage et des garçons qui les regarderaient. De mon côté, je rêvais à la mer, au sable, aux jeux de plage, aux paysages que j’allais découvrir avec des personnes enthousiastes de partir. Bref, toute la famille y trouvait son compte.
Le voyage se fit de nuit comme prévu dans la Peugeot 403, en direction de la nationale 7. Mes sœurs et Zette étaient sur la banquette arrière. On m’avait placée sur leurs genoux et j’alternais l’assise en fonction de…. ! Ce manque de confort m’amena à évacuer tout mon dîner sur la place de la ville de Sète, mon père ayant dû faire quelques arrêts intempestifs et contrariants auparavant. Je finis donc sur les genoux de ma mère, devant, à la « place du mort » dit-on, la ceinture de sécurité n’existant pas encore, je pouvais être projetée contre le pare-brise à souhait en cas de coup de frein. Ah mes parents avaient un drôle d’humour !
Au petit matin, apercevant une bande bleue azur au loin, je compris que nous étions arrivés. La plage immense au sable doré annonçait de belles vacances sous les palmiers. Cela me fit rêver quelques secondes.
Mon père gara la Peugeot dans la rue jouxtant la maison de l’oncle René.
La tante Zette se déplaça dans la cour et commença à lancer des petits graviers en direction de la fenêtre du premier étage contre les volets en bois de l’oncle René. Il était 4 heures, le jour commençait à pointer. Le temps était clément et je me souviens des odeurs d’une végétation particulière…d’arbres, de buissons fleuris que je ne connaissais pas. Cette température était d’une douceur peu commune pour moi…je n’avais pas l’habitude de ces senteurs marines que je découvrais, là dans l’instant, et cette lumière du début du jour me ramena à une réalité : j’étais en vacances ! Vite je sortis de mes rêves car la tante Zette n’hésita pas à chanter tout fort avec mon père : « Meunier tu dors…. » pour réveiller l’oncle. Au bout de quelques minutes, les volets s’ouvrirent et la surprise était devant ses yeux. Avec ses cheveux gris hirsutes, il n’en croyait pas ses yeux. Les éclats de rire s’en suivirent. Quelle équipe ! En replaçant le « sketch » à aujourd’hui, je peux dire que les voisins auraient râlé, et peut-être fait intervenir les forces de l’ordre. Mais dans cette petite ville des années 68, le voisinage était de bonne compagnie et rien de tout cela. Et puis le coiffeur avait bonne réputation….
C’est ainsi que commencèrent mes vacances à Argelès. Cette première nuit de voyage fut la plus originale, la plus surprenante. J’allais découvrir les joies du sable, de la mer, les balades en soirées chaudes le long de la côte… et l’ombre des palmiers où j’ai pu déguster une glace à la fraise.
Le retour en voiture fut moins agité. Nous sommes repartis sans la Tante, dans « l’attente et l’espoir de revenir peut-être sous la tente ». Nous étions tous bronzés et ravis que cet « interlude » ait égayé notre vie citadine en immeuble. Cette fois-ci, j’avais ma petite place à l’arrière du véhicule…. Mais je ne voyais pas la route, alors…. Mon père dut faire quelques arrêts !
Poème de Delphine de Girardin, « Le bonheur d’être belle », proposé par Françoise T
À MADAME RÉCAMIER
Quel bonheur d’être belle, alors qu’on est aimée !
Autrefois de mes yeux je n’étais pas charmée ;
Je les croyais sans feu, sans douceur, sans regard ;
Je me trouvais jolie un moment par hasard.
Maintenant ma beauté me paraît admirable.
Je m’aime de lui plaire, et je me crois aimable…
Il le dit si souvent ! Je l’aime, et quand je vois
Ses yeux avec plaisir se reposer sur moi,
Au sentiment d’orgueil je ne suis point rebelle,
Je bénis mes parents de m’avoir fait si belle !
Et je rends grâce à Dieu, dont l’insigne bonté
Me fit le cœur aimant pour sentir ma beauté.
Mais… Pourquoi dans mon cœur ces subites alarmes ?…
Si notre amour tous deux nous trompait sur mes charmes :
Si j’étais laide enfin ? Non… il s’y connaît mieux !
D’ailleurs pour m’admirer je ne veux que ses yeux !
Ainsi de mon bonheur jouissons sans mélange ;
Oui, je veux lui paraître aussi belle qu’un ange.
Apprêtons mes bijoux, ma guirlande de fleurs,
Mes gazes, mes rubans, et, parmi ces couleurs,
Choisissons avec art celle dont la nuance
Doit avec plus de goût, avec plus d’élégance,
Rehausser de mon front l’éclatante blancheur,
Sans pourtant de mon teint balancer la fraîcheur.
Mais je ne trouve plus la fleur qu’il m’a donnée ;
La voici : hâtons-nous, l’heure est déjà sonnée,
Bientôt il va venir ! bientôt il va me voir !
Comme, en me regardant, il sera beau ce soir !
Le voilà ! je l’entends, c’est sa voix amoureuse !
Quel bonheur d’être belle ! Oh ! que je suis heureuse !
De Bernard
Il y a tant de voyages déformant mes bagages
Des beaux, d’autres que j’enrage, depuis mon plus jeune âge.
Des péages, des orages, certains en équipage,
Régions de passage ou pour un échouage, écrire quelques pages.
Multiples pays, certains qui m’ont conquis ou qui tombent dans l’oubli
Des contrées où unit ce qui m’a bien permis de refaire ma vie.
Villages et prairies où je me suis endormi et trouvé des amis
Ne pas faire le tri, se trouver bien ici, y passer mille nuits.
Savoir agrémenter, pouvoir s’installer oubliant le passé,
Vacances rallongées et puis re-travailler dans un nouveau métier.
Prendre toujours congé et puis re-voyager en ayant tout laissé
Où le vent m’a porté j’ai toujours trouvé des moments de liberté.
Ma vie est une chance, je la vis sans prudence, parfois avec errance
Ma vie est en vacances.
De Nathalie
Croisière au “FIL DU NIL”
Dimanche 29 Août 2004, 23h55, c’est parti pour une croisière sur le Nil. Depuis longtemps, je rêvais de faire ce voyage et j’ai profité de mes 40 ans pour m’envoler vers ce pays inconnu. Quatre heures après mon arrivée à l’aéroport St Exupéry de Lyon me voilà dans les airs. Le décollage fut impressionnant mais maintenant la peur s’est envolée avec l’avion. Je suis assise à côté d’un couple qui fait la même croisière que moi. Nous engageons la conversation. Lui s’appelle Jean-Marie et, elle, Chantal. Je lui dis que je fais mon baptême de l’air et que j’ai un peu peur. Elle me rassure. Nous resterons ensuite ensemble tout au long de la croisière. Eh oui, je suis près du hublot. Tout me paraît petit en bas. Certes, il ne s’agit pas d’un avion premier luxe mais à quoi bon si mon voyage se passe bien. Pas de film. Il y a trois sièges de chaque côté soit six par rangées. Il doit y avoir environ 200 places. L’avion est un AIRBUS A320. Le ciel est découvert, cela me permet de voir quelques lumières. Je somnole quelques instants mais l’avion n’est pas très confortable donc difficile de dormir. Vers 2h30 du matin, petit-déjeuner (jus d’orange, café, petits pains, beurre, confiture, fromage etc…). Cela me permet de me réveiller un peu bien qu’un mal de tête m’envahisse. Je ne sais pas à quelle heure exactement nous arriverons à Louxor mais j’ai besoin de mettre les pieds sur terre car je sens mes jambes gonflées.
Lundi 30 Août 2004, 6h30 du matin, nous arrivons à Louxor. Avant l’atterrissage, j’ai pu admirer le lever du soleil. Cette étendue de sable et de roche. J’ai l’impression d’être sur une autre planète. Comment décrire ce paysage. Une immensité d’étendue de sable et plus nous nous rapprochons du Nil et plus il y a de petits lopins de terre et des palmiers, le long des routes. Du ciel, c’est magnifique. Je me rends compte que je n’ai pas si peur que ça en avion. Débarquement, visa Égyptien, douane, récupération des bagages et direction le bus 1 où nous attend notre guide accompagnateur, Sam. Nous nous rendons au bateau. Plusieurs sont accostés là, les uns à côté des autres. En fait, les bateaux font partie d’une chaîne d’Hôtel, Isis Hôtel Louxor. Notre bateau s’appelle le Vittoria. Direction le restaurant pour le petit déjeuner d’arrivée. Ensuite je regagne ma cabine (206). Après avoir défait ma valise et pris mes repères, je vais faire une petite sieste jusqu’à 11h. Un rendez-vous nous est donné avec Sam à 12 h pour parler de l’organisation de la croisière. Nous naviguons en direction d’Esna. Nous avons pris le repas à 13 h. Nous devrions arriver aux alentours de 16h30 à l’écluse. La descente du Nil est magnifique. Il fait chaud 30 à 40°. Tout le long du Nil il y a des palmiers, quelques bananiers. Les maisons sont à peine construites. “Tiens des enfants se baignent dans le Nil », tout me paraît pauvre mais si beau à la fois. Il est 23h45 et nous naviguons en direction d’Edfou. Comment expliquer cette première journée. C’était idyllique, grandiose, magnifique. Je fais la connaissance de plusieurs personnes. Jean-Marie et Chantal que j’ai rencontrés dans l’avion. Estelle, célibataire comme moi, Seda et Georges. Nous passons l’après-midi ensemble. Un petit bain sur le pont supérieur et ensuite un petit jacuzzi, puis repos sur les transats. Quel bonheur ! À 16h30, nous partons boire le thé (buffet: petit gâteau égyptien, karkadé : boisson à base de fleur d’hibiscus). Retour sur le pont supérieur car nous passons l’écluse. Des marchands égyptiens s’approchent du bateau pour nous vendre des serviettes, des tapis, des djellabas. C’est effrayant. Les militaires sont là. Nous restons un moment sur le pont avant de redescendre dans nos cabines pour nous changer pour le repas du soir (buffet : les repas ne sont pas très variés mais peu m’importe). Après le dîner, nous montons au salon car ce soir il y a une soirée disco. Estelle nous fait une démonstration de danse du ventre. Moi je monte finir ma soirée sur le pont. C’est féerique, je ne me suis jamais sentie aussi bien. Un petit vent. Ici je ne pense à rien.
Mardi 31 Août. Aujourd’hui, visite du Temple d’Horus (Dieu à tête de faucon) à Edfou. Départ à 8h30 en calèches. Notre guide Mahmoud nous explique qui était Horus. Notre visite dure 1h15. Il y a beaucoup de monde. C’est grandiose. Le mur extérieur du temple est orné des figures d’Horus et d’Hator. Les pylônes ont une forme de papyrus. Nous continuons la visite. Rendez-vous est donné à 11h-1/4 près des calèches. Lorsque nous sortons du site, nous sommes accostés par les vendeurs. Ils nous tirent par le bras, nous entraînent sous leur tente. C’est un peu stressant. Mais bon, ils vivent du tourisme. C’est leur vie de tous les jours. J’essaye de récupérer Estelle, Chantal et Jean-Marie afin de rejoindre notre calèche. Nous ne pouvons pas faire un pas sans être accostés. Nous devons faire attention. Problème ensuite pour retrouver notre calèche. Elles sont toutes là, difficile de retrouver la nôtre. Enfin, nous rentrons sur le bateau. Promenade sur le pont, un petit bain dans le jacuzzi et je descends me préparer pour le déjeuner. Après-midi, repos dans la cabine, un peu de frais apporté par la climatisation me fait du bien car la température extérieure est à presque 40°. Ensuite, je retrouve Estelle sur le pont. Nous discutons toute l’après-midi. Nous faisons la connaissance du capitaine du bateau. Il nous propose de boire un vrai café. Nous parlons de l’Égypte. Nous finissons ensuite notre après-midi sur les transats entre la piscine et le jacuzzi. Nous accostons à Kom-ombo. Visite du temple à 18 h. Il s’agit du temple consacré à Sobek, tête de crocodile, Dieu symbolisant la force des pharaons et Haroëris, Horus le grand, Dieu solaire, guerrier à tête d’épervier. Du temple, nous profitons d’un magnifique coucher de soleil. Ce soir, nous avons droit à un repas typiquement égyptien. C’était très bon. Toute la famille « RAMSÈS » (c’est le nom que chaque guide donne à son groupe) avait joué le jeu. Il s’agissait d’une soirée déguisée. Nous avons pris des photos, c’était génial. Il y avait une super ambiance. Il est 23h45, je me couche après une soirée encore bien animée. Nous naviguons maintenant en direction d’Assouan.
Mercredi 1er Septembre. Aujourd’hui, matinée splendide. Départ 8 h, en Felouques pour la visite de l’île kitchner. Il s’agit d’un jardin botanique. Je suis accueillie par une multitude de chats. Ils apparaissent de tous les côtés. C’est merveilleux, inoubliable, inexplicable. Nous avons une vue magnifique sur le dessert de Nubie. Après avoir fait le tour de l’île, nous prenons un bateau à moteur pour faire le tour de l’île Eléphantine. Nous devons aller dans le désert Nubien. J’aperçois au loin une caravane de chameau. Nous faisons escale dans une petite casbah pour déguster du pain, du fromage de brebis, une pâte au sésame, du thé à la menthe. Nous fumons le narghilé. C’est une autre vie. A 12h15, nous retournons au bateau. Cette après-midi, à 14 h nous sommes allés visiter le Temple de Philae. Il célèbre Isis, la douce déesse, sœur et épouse d’Osiris. L’après-midi est très dure en raison de la chaleur. Mais tout est si merveilleux que le reste n’a pas d’importance. Le temple est situé sur une île. Notre guide nous explique que les fresques sur le temple relatent la naissance et l’enfance d’Horus, fils d’Isis et Osiris. Il a été déplacé du fait de la montée du Nil. Nous visitons le Musée du papyrus. On nous montre la fabrication des feuilles de Papyrus. Je finis mon après-midi dans le jacuzzi jusqu’à 18 h et j’admire le coucher du soleil sur la ville d’Assouan. Il est 20h30, le repas a été avancé car demain nous devons nous lever à 3h du matin pour partir en direction d’Abou-Simbel.
Jeudi 2 Septembre. Nous partons à 4h30. Chaque car est escorté par un militaire. Le paysage est désertique. Du sable, des dunes. Nous arrivons à Abou-Simbel à 7h15 après avoir parcouru 290 km dans le dessert. Temple dédié aux dieux Harmakhis, Amon et Ptah ainsi qu’au pharaon Ramsès II. Nous visitons le temple de Néfertari, épouse préférée de Ramsès II (c’était une figure importante de cette époque. Elle a eu une grande influence sur le monarque qui tint compte de ses remarques et de ses conseils. C’était l’« Épouse du Dieu »). Le temple est divin et petit à la fois. Ensuite nous visitons celui de Ramsès. C’est grandiose. Une façade de 38 mètres, 65 m de profondeur sculptée dans une unique masse rocheuse. À l’entrée, quatre statues de Ramsès II sont représentées. Elles sont toutes identiques, seule l’expression du visage est différente. Des sculptures magnifiques, certaines inachevées, d’autres détruites par l’ancienneté. La visite dure une heure. J’essaie de penser à leur vie. Étaient-ils heureux ? Comment vivaient-ils, à quoi pensaient-ils ? J’aimerais tout décrypter, tous ces hiéroglyphes, pour savoir ce que ces hommes pensaient. Enfin après avoir fait le tour de ce temple majestueux nous retournons au car, en passant par les boutiques, comme à l’accoutumé dans les croisières. Le rendez-vous avait été donné à 10h14. La route du retour nous paraît plus longue. Quel désert, rien à l’horizon qu’une route et du sable. Nous rigolons bien dans le car. Je fais plus ample connaissance avec Léon et Isabelle, Djamel, Salvatore qui est venu avec sa mère. Nous nous racontons des blagues. Nous prenons en photo de Mamhoud, notre guide, qui dort. On dirait le sosie de Ramsès. Nous arrivons enfin au bateau à 13 h. Nous déjeunons car nous devons repartir à 14h30 pour la visite de l’obélisque inachevé (carrière de Granite). Chaque obélisque mesure environ 41 m de haut et pèse 1267 tonnes. Il fait pratiquement 40°. La visite est courte. Ensuite nous continuons en direction du barrage du lac Nasser, à Sadd-al-Ali. Il est gardé par des militaires. Il s’agit d’un endroit stratégique pour l’envahisseur. En fait toute l’Égypte serait engloutie par les eaux si le barrage devait être détruit volontairement. Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons dans magasin de parfums. Nous avons eu une démonstration de verre soufflé. Nous avions toujours à côté de notre car des enfants qui nous vendaient leurs babioles. Arrivée au bateau, je me dirige vers la piscine afin de me rafraîchir. A 19 h, nous partons pour le son et lumière au Temple de Philae. C’était magnifique. Il s’agissait de retracer la légende d’Isis. Nous rentrons au bateau à 21h30. Nous prenons le repas et ensuite nous nous dirigeons au salon bar. Démonstration de danses locales, chants. Ces gens sont magnifiques, d’une extrême beauté quand ils dansent. Je monte sur la piste de danse avec Estelle, Chantal et Djamel et subitement, je me suis retrouvée par terre. J’ai raté la marche de l’estrade. Tout le monde est autour de moi. J’ai très mal à la cheville. La fin du séjour est compromise. Djamel et Jean-Marie me redescendent dans ma chambre, accompagnés de Chantal et Estelle. Je suis choyée comme une petite princesse.
Vendredi 3 Septembre. Il est 10h14, le bateau navigue en direction de Louxor. Navigation toute la journée. Ce matin, Chantal et Estelle sont venues voir comment j’allais, accompagnées de Seda. J’ai mal quand je marche. L’entorse est bien là. Chantal avertit Sam, notre organisateur de croisière. Il était un peu furieux que personne ne l’ait averti de mon accident. Mais à quoi bon, il n’aurait rien fait de plus. Sachant que j’ai souvent eu des entorses à la cheville, j’avais tout prévu au cas où. Tout le monde sur le bateau est aux petits soins pour moi. Petit-déjeuner dans ma cabine. Ensuite à 10h30, je monte sur le pont. Chantal, Jean Marie, Djamel Estelle et tous les autres m’accompagnent. J’ai l’impression d’être la Cléopâtre d’un jour. On me sert le déjeuner sur le pont. Nous nous retrouvons tous sur le pont l’après-midi. Je passe une superbe après-midi. Nous sommes informés, par Sam, que le dîner serait servi sur le pont ce soir.
Samedi 4 Septembre, 10h44 du matin. Je suis sur le pont. Le bateau est vide. Ce matin tous les membres de notre groupe sont partis visiter la Vallée des rois et des reines. Étant donné l’état de ma cheville, je préfère me reposer afin de visiter le temple de Karnak, l’après-midi. A 13 h, direction le temple de Karnak. C’était magnifique, gigantesque, titanesque. Ces hommes semblaient si forts. Je me sens si minuscule devant ces immenses colonnes. Je finis l’après-midi avec Salvatore, Léon et Isabelle. Je me fais tatouer un scarabée sur l’épaule (henné). Dernier dîner à bord, je finis ma soirée au bar avec Estelle, Djamel, Jean-Marie, Chantal, Léon, Isabelle, Salvatore, Seda et Georges. Djamel a aminé la soirée, il nous a bien fait rire.
Dimanche 5 Septembre. Dernière journée à bord du bateau. Nous avons la matinée libre. Je décide de partir avec Estelle, Seda et Georges faire un tour au Souk de Louxor. Nous prenons une calèche pour y aller. C’est impressionnant. Nous nous retrouvons accompagnés par un petit guide qui porte le nom de Mohamed. Il nous emmène dans des endroits où apparemment, il reçoit une petite commission. Nous faisons le tour du souk mais ma cheville commence à me faire mal. Nous rentrons au bateau après avoir fait quelques affaires, il est 12 h. A 13 h, nous déjeunons tous ensemble, c’est triste car il ne reste pratiquement plus personne à bord. Après le déjeuner, nous décidons d’aller sur le pont profiter des derniers moments qu’il nous reste. Une petite baignade, un petit tour dans le jacuzzi à 15h45, je retourne dans ma cabine pour prendre une douche avant de partir pour l’aéroport. Derniers instants à bord. À 16h30, nous sommes tous là à la réception, direction l’aéroport. À l’aéroport, nous enregistrons nos bagages et attendons 1h30 avant que l’on vienne nous chercher pour monter dans l’avion. Voilà que nous atterrissons à Hurgada. Nous n’étions pas avertis de ce changement de vol. Nous devons passer à la douane, pour faire tamponner notre visa. Nous décollons de nouveau à 20 h. Il est 21h45 nous volons en direction de la France et de Lyon. Nous sommes tristes de nous quitter, mais nous échangeons nos adresses. Je ne sais pas si nous nous reverrons un jour, mais je n’oublierai personne.
En conclusion, je ne pourrai jamais oublier cette croisière. J’ai fait des rencontres fantastiques, vu des choses magnifiques. Mon rêve s’est réalisé.
Poème de Anne-Marie Oudard, « Les sep couleurs de l’arc-en-ciel », proposé par Françoise T
Je remplirai vos cœurs,
je remplirai vos vies
de mille couleurs.
Je tendrai dans le ciel
les sept couleurs de l’arc-en-ciel,
rouge pour l’amour,
l’orangé pour les fleurs,
le jaune pour le cœur,
le vert pour l’espoir,
le bleu indigo pour la mer,
le violet du printemps.
Je remplirai vos cœurs,
Je remplirai vos vies,
de belles couleurs !
De Marie-Claude
Vacances 1978
43 degrés à l’ombre, pas un souffle d’air, le macadam luit, déformé par le soleil de plomb.
Marie-Lou plisse les yeux pour embrasser l’étroite sente qui s’enfonce sous les branches entremêlées des noisetiers. Elle sent ses tempes palpiter dans la brûlure du soleil d’août. Des gouttes de moiteur roulent au creux de ses reins. Son regard suit le jeune couple qui attaque la montée d’un pas allègre, ployant sous leurs volumineux sacs à dos ventrus, gros hannetons harnachés rampant au flanc de la côte aride.
« Tu vois, c’est l’un des treize sentiers qui sillonnent le massif du Pibeste-Aoulhet, la plus grande réserve naturelle régionale française ». L’adolescente fronce les sourcils et les lèvres, feignant l’intérêt. Elle remarque le vieil homme en treillis posté au pied de la sente. Trop tranquille pour être honnête.
L’oncle Gilles continue, tout à sa mission d’enrichir les connaissances lacunaires de sa nièce de treize ans dans ses matières de prédilection, lui l’ancien prof d’Histoire-Géo n’ayant jamais lâché son désir d’éclairer les jeunes esprits de son savoir. Tatie No s’est éclipsée après le déjeuner gastronomique clôturé par un vacherin pour aller fouiner dans une dernière brocante avant le départ vers Lourdes. Marie-Lou, les yeux mi-clos, sent monter en elle une nausée irrépressible, aggravée par la voix docte soulevant la vague au creux de son estomac.
L’oncle poursuit le cours : « Tu vois là le début d’une voie pavée par les Romains. Sais-tu ce que tu y croiserais si tu l’explorais ? » La voix se fait pédagogique. Marie-Lou regarde le sbire à demi dissimulé derrière un tronc. Il plonge la main dans la poche de son short kaki. Un malaise la trouble. « Des biches ? » « Tu pourrais y croiser vingt-sept espèces de mammifères, cent-douze espèces d’oiseaux dont vingt-deux de rapaces, sans compter la richesse florale due aux trois climats de ce site. Je t’ennuie, là… ».
Marie-Lou sent peser sur son épigastre meurtri le fardeau de la liste encyclopédique. Elle inspire à fond, oublier le vacherin, et s’imagine harponnée, fendant l’air dans les serres d’un faucon sinistre, audacieuse comme Harry Potter. « J’ai vraiment chaud… ». Le tonton s’éponge le front à l’aide de son vaste mouchoir blanc à la Pavarotti. « Ah, Lourdes au mois d’août, idée saugrenue de ta dévote de tante. Moi, je préfèrerais arpenter ces chemins au printemps et te nommer toutes les fleurs multicolores qui les ornent. Un vrai arc-en-ciel floral… ». Gilles le poète…Un couteau brille dans la main de l’homme de l’ombre. Cueilleur de cèpes ou trancheur de gorge ?
« Alors les trois climats ? ». Une déferlante océanique gronde en elle. « Euh, Océanique ? Méditerranéen ? ». « Bien ! Et montagnard ! On ira chercher un guide en arrivant à Lourdes. On fera l’itinéraire pour demain. » Voyant l’œil gourmand de l’oncle, Marie-Lou abandonne tout espoir de rémission et court derrière la Citroën pour laisser exploser le tsunami qui lui tord le ventre.
Résigné, Gilles soupire. Cette petite risque de le décevoir. Susciter en cette enfant vive et curieuse le goût de la nature, l’envie d’explorer des mondes inconnus, y compris les civilisations du passé et les découvertes scientifiques, l’extirper de ce quotidien insipide où croupissait sa sœur, mère célibataire étriquée et apathique. Lui transmettre la passion de la littérature, l’aspirer vers le monde exaltant que lui-même n’avait pas connu.
Médusé, Gilles vit la petite silhouette titubante bondir sur un homme en treillis et effectuer un Ura Zuki magistral. Un poignard vola, le jeune homme attaqué par le vieillard s’agenouilla, le menotta et marmonna dans son portable pour appeler les secours. Le tout en cinq secondes.
L’adolescente revient vers la Citroën. Humble karatéka auréolée par le soleil. Petit être sensible et vulnérable ? Future espionne ? Chi lo sa ? Tout espoir n’est pas perdu. Serein et fier, Gilles sourit. Déterminée, Marie-Lou s’installe et se carre dans le siège baquet. Confiante.
De Nicole
Un texte de Julos Beaucarne, chanteur belge
Ton Christ est juif
Ta pizza est italienne
Ton café est brésilien
Ta voiture est japonaise
Ton écriture est latine
Tes vacances sont turques
Tes chiffres sont arabes
ET
Tu reproches à ton voisin d’être étranger.
Et le mien
1981. Une vieille Peugeot 204, les portières grincent, moteur en bon état.
Vacances de Pâques, envie d’un petit voyage.
Dans cette guimbarde elle emmène trois enfants de 8 à 11ans1/2 et une jeune fille en rupture de famille.
La Normandie par le chemin des écoliers.
Des bagages, des bottes, un réchaud de camping, et que vive la petite aventure, une étape par jour.
Trouver où dormir chaque soir s’avère être une galère, malgré l’argent disponible.
Au bout de deux jours, notre allure pas toujours nette inquiète les hôteliers et nous ferme des portes.
Le midi, pique-nique, baguettes, boites de conserves réchauffées.
Le soir resto, les menus planchers et baguette et/ou dessert en cas de faim.
A Etretat, refus partout, pas assez chicos.
Ils trouvent refuge chez une mercière qui loue deux pièces garnies à des travailleurs repartis chez eux.
Ils dorment sur des lits de fortune dans une odeur prégnante de tonte de mouton. La dame file la laine et confectionne des pulls. Très en vogue le retour du tissage à l’époque.
La pluie, l’eau de mer qui passe au-dessus des bottes, nous sommes toujours humides.
Et merveille, le Mont-Saint-Michel, un hôtel libre au-dessus d’escaliers tourmentés.
Dernière soirée, les enfants boivent un peu de cidre et chantent à tue-tête en rentrant dormir.
C’est la seule fois où j’ai pu admirer le Mont sans la foule habituelle.
Le lendemain, retour en une étape.
Les meilleurs souvenirs : les rires, les sourires des enfants, les chaussettes et les tee-shirts mouillés que l’on accroche aux vitres remontées de la voiture, un séchage naturel.
Un petit vent de liberté.
De Marie-Josée
Jour de chance.
La voiture filait en direction de Noirmoutier, une excursion non prévue au programme de leurs vacances sur la côte de Lumière. Ils avaient choisi St Jean de Monts comme pied à terre mais les plaisirs nautiques et les séances de bronzage ne faisaient pas partie des activités favorites d’Anne et de son compagnon Marc.
Ils appréciaient la grande plage surtout le soir où, sandales à la main, ils l’arpentaient les pieds dans l’eau en admirant le coucher du soleil. Ils avaient déniché un petit bistrot où ils aimaient prendre le café même s’il faisait également office de débit de tabac ce qui était une torture pour Anne qui avait arrêté de fumer depuis qu’elle savait qu’elle était enceinte. C’était le moment idéal pour faire des photos, le dada de Marc, au grand dam d’Anne qui s’impatientait de ses arrêts incessants et de ses essais pour choisir le meilleur angle et trouver le bon éclairage. Il trimbalait toujours deux appareils, parfois un trépied et chaque sortie se transformait en chasse à l’image. Les innombrables clichés, une fois triés et étiquetés, se transformaient en soirées diapos interminables à leur retour.
Pont ou passage du gois ? L’un s’avérait être plus pratique, l’autre plus pittoresque. La discussion a failli tourner au vinaigre ; ils avaient souvent du mal à accorder leurs violons quand il s’agissait de faire un choix à propos de l’itinéraire à emprunter. Chacun défendait âprement ses positions : Marc ne jurait que par les autoroutes alors qu’Anne préférait le réseau secondaire. Elle aimait traverser les petits villages, les routes sinueuses bordées d’arbres, s’arrêter quand un endroit lui plaisait, flâner dans les ruelles. Marc, par contre, avait une toute autre vision, il voulait atteindre la destination choisie le plus rapidement possible et n’empruntait les petites routes que s’il n’y avait pas d’autre possibilité. Finalement, ils avaient trouvé un compromis pour accéder à l’île, ils prendraient le pont pour l’aller et le passage du gois pour le retour. Ils firent une halte à Fromentine avant d’emprunter le pont. Marc était aux anges, le ciel azur parsemé de nuages blancs, le sable blond, la végétation et le bleu profond de l’océan rendait cet endroit magique. Impressionné par cette barre métallique qui relie le continent à Barâtre, il ne put s’empêcher de le mitrailler avant de le franchir.
A l’arrivée sur l’île, une vaste forêt de grands pins maritimes attire le regard. Décidément, c’était leur jour de chance. Ils trouvèrent immédiatement une place de parking malgré les nombreux touristes. Adeptes de randonnées pédestres, ils ne purent résister à l’appel de cette étendue ombragée qui longe la plage. Il faisait déjà chaud et ils se dégourdirent les jambes sur les sentiers jonchés d’aiguilles de pins qui craquaient sous les pieds.
Une agréable odeur de sous-bois leur chatouillait les narines mais ils ne s’y attardèrent pas trop longtemps car l’île offrait de multiples endroits à découvrir. Les boutiques de Noirmoutier furent un passage obligé pour Claire. Elle dénicha dans l’une d’elles un superbe chapeau de paille qu’elle troqua illico contre sa vieille casquette délavée. Elle acheta également quelques cartes postales, notamment du fameux passage du gois avec ses balises, ultime refuge pour les inconscients qui l’empruntent sans prendre les précautions nécessaires. Elle s’extasiait devant les tableaux des galeries d’art mais Marc ne le voyait pas du même œil et l’entraîna faire le tour de l’île sans plus tarder.
Faute de temps, Anne se contenta de la visite extérieure du château fort-musée qui domine le centre historique au grand soulagement de Marc. Par contre, il regretta de ne pas pouvoir gravir le donjon de 20 m de haut qui promettait une vue imprenable sur l’île. Ils entrèrent néanmoins dans l’église St Philibert à proximité, seul vestige de l’abbaye bénédictine. Le chœur roman et la nef gothique témoignaient des différentes restaurations dont elle avait bénéficié. Anne alluma deux bougies et profita de la quiétude et de l’agréable fraicheur qui y régnaient pour un bref moment de recueillement.
A la sortie, le soleil les inonda et ils tentèrent de trouver de l’ombre dans le dédale des vieilles ruelles aux noms loufoques comme la Venelle des Trois-Ivrognes de Banzeau. Ce quartier avec ses façades à la chaux blanche ornées de roses trémières et aux portes et volets bleus a su garder son authenticité. Sur les coups de midi, ils se régalèrent de moules dans un des nombreux restaurants du port de l’Herbaudière avant de se reposer sur la plage de la Guérinière en observant les pêcheurs à pied ramasser huitres et coques. Ils tombèrent sous le charme des nombreux moulins à vents présents sur toute l’île, témoins d’une activité, abandonnée depuis longtemps. Ils poursuivirent leur périple en direction du Bois de la Chaise réputé pour sa végétation, ses plages aux cabines blanches et le phare de l’Anse Rouge. Ce fut également le lieu de rendez-vous de poètes et peintres illustres comme Auguste Renoir qui y trouvèrent leur inspiration. La journée passait à une vitesse folle et il était malheureusement temps de quitter cette île dont il restait encore tellement d’endroits à découvrir. Ils regagnèrent avec regret la voiture et se dirigèrent sans plus tarder vers le passage du gois. Une foule de spectateurs s’y était rassemblée et ils s’y engagèrent sans se rendre compte qu’ils étaient les derniers.
Ils roulaient à vitesse modérée tandis que l’eau commençait à monter et envahissait le passage petit à petit. Après deux à trois kilomètres, le moteur pris l’eau, cala et refusa de redémarrer. Le rivage ne paraissait plus très loin, Marc sortit de la voiture et tenta de la pousser. Claire était maintenant au volant et essayait tant bien que mal à maintenir la trajectoire. Seul un miracle pourrait les sauver et leur éviter d’attendre la prochaine marée basse sur une de ces balises qui lui paraissaient maintenant hideuses et qu’elle n’était pas sûre de pouvoir atteindre. Prise de panique, elle adressa une prière intense au ciel, implorant de l’aide. Son cerveau déconnecta, il n’y avait plus que l’eau, cette immensité et une peur incommensurable qui l’envahissait. Elle revint à elle, quand Marc ouvrit la portière et lui ordonna de changer de siège. Le miracle s’était produit, une voiture qui semblait surgir de nulle part, les enfourcha et les ramena jusqu’à Beauvoir sur mer. A leur arrivée, une foule de badauds les attendait et les prenait en photo. Encore sous le choc, Claire parvint néanmoins à plaisanter en disant qu’ils feraient sans doute la « Une » du journal local du lendemain. Ils ouvrirent le capot de la voiture pour permettre au moteur de sécher et invitèrent leurs sauveurs à boire un verre dans le bar « Au relais du Gois » en guise de remerciements. Au fil de la conversation, ils apprirent qu’il s’agissait de deux ostréiculteurs qui, suite à un problème, avaient pris du retard. Ils estimaient qu’Anne et Marc avaient eu de la chance, car sans cet incident, ils ne se seraient pas trouvés sur le passage à une heure aussi tardive. Quand ils sortirent du bar, la mer avait repris ses droits et Claire éprouva un immense sentiment de gratitude en regardant les nuages blancs filer dans le ciel. La nuit fut agitée, elle fit un rêve étrange, elle vit son père décédé au mois mars lui sourire et se réveilla en sursaut. Etait-ce lui qui avait envoyé les ostréiculteurs ? Etait-ce la Divine Providence ? Etait-ce son ange gardien ? Etait-ce tout simplement la chance ? Elle ne le saura jamais, en tout cas, quand elle raconta sa mésaventure à sa copine à son retour des vacances, celle-ci s’exclama admirative : tu en as de la chance! Moi, il ne m’arrive jamais rien !
De Catherine
Une course contre la montre
Milan- Nous avons tant apprécié cette ville, et surtout son Duomo, si fascinant par son architecture exceptionnelle. Trois jours à Milan, c’est très court, mais nous avons profité de chaque instant.
Notre retour est prévu pour le lendemain : notre avion décolle très tôt de Bergame, à plus de 30 kms de là. Nous avons donc décidé de boycotter notre dernière nuit d’hôtel pour nous rendre en fin de soirée à l’aéroport. Une douche vers vingt heures après une bonne journée à arpenter la ville, nous voici prêts pour le départ. Notre plan est établi : tram jusqu’à la gare, bus réservé par internet pour la liaison avec l’aéroport à 23h00, puis de longues heures d’attente avant le décollage…
L’arrêt du tram est à proximité de l’hôtel situé un peu à la périphérie de la ville : ce détail est important pour la suite… Attente du tram qui ne vient pas, ou en tout cas, qui se fait attendre. Pas de souci : nous avons pris maintes fois le tram dans la journée, il ne devrait pas tarder… L’attente se prolongeant, je me souviens de petites affichettes aperçues dans certains arrêts sans qu’on y prête attention : j’avais cru vaguement comprendre qu’il y aurait moins de rames ce jour-là. Mais comme nous avons circulé sans problème, il n’y a pas d’inquiétude à avoir !
Un jeune homme arrive et attend lui aussi (c’est rassurant, non ?), puis il commence à s’inquiéter, et, par un effet boule de neige, nous aussi. Et la révélation nous apparaît soudain: nous sommes le 1er Mai ! En France rien ne marche, on le sait, mais pas ici tout-de-même ?! Pourtant, cette vérité s’impose, et nous voilà partis au grand galop vers une gare inter-urbaine, deux stations plus loin, car là devait être la solution. Fermée ! Panique à bord ! Le métro alors ? Fermé !
La pendule avait bien avancé, au contraire de nous, et la gare où nous devions retrouver le bus était éloignée de quelques kilomètres. C’est le début d’une longue course à pied avec handicaps multiples : une tenue inadaptée, une valise chacun à traîner, des trottoirs à sauter, des passants à éviter ou à doubler, sans parle de la carte de la ville à consulter de temps en temps pour ne pas se tromper de direction !!! Et toujours aucun taxi à l’horizon !
Les passants nous regardent bizarrement : deux affolés suivis de valises dont les roulettes ont du mal à rester en contact avec le sol, lancés dans une course contre la montre. Parmi les handicaps, n’oublions pas les pollens qui volent autour de nous et me font tousser et m’étouffer. Mais pas le temps de s’appesantir, on mourra plus tard, à l’aéroport !
Je ne sais combien de kilomètres nous avons parcourus ainsi, pas moins de trois, c’est sûr ! Nous sommes arrivés haletants et exténués, légèrement en avance finalement, mais aussi affamés et assoiffés. Tous les taxis sont sagement garés tout autour de nous. Grrr! Et aucun magasin ouvert alentours pour acheter n’importe quoi à avaler !
Doux repos dans le bus ! Arrivés à l’aéroport, nouveau plan : manger, boire et se reposer. Le hall est rempli de gens vautrés sur des bancs ou par terre, assis ou allongés. Des envies de meurtres à l’encontre de ceux qui roupillent en prenant 3 places ! On se croirait dans un film catastrophe où les gens seraient tous morts, terrassés par un nuage toxique.
Faim ! Soif ! Seul un bar est ouvert ! Pas une place assise, mais de quoi manger et boire… debout ! C’est déjà ça ! Ça fait du bien de se restaurer, mais impossible de se poser. On guette un potentiel départ des clients du bar, traquant le moindre mouvement. Enfin, des gens se meuvent et on peut s’asseoir. On commandera plusieurs thés de suite pour garder le droit de rester à nos places et tenter de sommeiller un tantinet, sachant qu’après l’avion, nous aurons une longue route en voiture.
Ah ! Milan : on se souviendra de cette belle ville !
De Karine
Que j’aimais cette journée ! Oncles, tantes, cousins, cousines, se retrouvaient chez mes grands-parents. Le voisin Henri nous prêtait le tracteur. Un rendez-vous incontournable pour nous les enfants, on montait aux champs tous assis sur la remorque, en charge des outils, des sacs vides et de la ficelle et nous redescendions à pied, car les sacs bien remplis avaient pris nos places. Nous étions fiers, car nous étions transportés par notre grand-père. Les adultes montaient en voiture ou à pied, une fois que tout le monde était là, chacun avait sa tâche. Il y avait ceux qui bêchaient et arrachaient, ceux qui nettoyaient et ramassaient ces superbes pommes de terre qui nous nourriraient tout l’hiver. Il y avait ceux qui entassaient les fanes, ceux qui chargeaient les sacs remplis de patates sur la remorque. À nous tous, nous formions une petite PME familiale, le temps d’un week-end. Quand il faisait beau, nous mangions dans les champs, quand le temps était moins clément, nous retournions manger à la maison. Quand tout était fini, on rentrait tous les sacs, nettoyait les outils et le tracteur avec sa remorque et quand tout était bien rangé, c’était l’heure de l’apéro rapide avant de manger le bon repas que ma grand-mère et mes tantes avaient confectionné. Voilà comment se passait la journée “corvée de patates” chez nous. Mais entre nous, c’était loin d’être une corvée !
J’aimais cette journée, car elle annonçait les grandes vacances, les retrouvailles avec mon cousin Cédric qui a trois ans de moins que moi. Plus tard, il y aura Rodolphe, un autre cousin et ma cousine Anne So. Onze me suivront, je suis donc l’ainée de la douzaine ! Nous avons tous été en vacances chez mes grands-parents, plus certains que d’autres, mais nous avons tous des souvenirs !
Les grandes ou les petites vacances, je les passais chez mes grands-parents. J’y avais vécu pendant presque trois années quand ma mère avait divorcé. Alors, quand je revenais pour les vacances, j’avais l’impression que c’était chez moi.
C’est une grande maison de village, que mon grand-père a modifié au fur et à mesure du temps. En crépi beige, avec des entourages de fenêtres blanches et des volets peints, une grande porte de grange avec des petits carreaux en forme de losange. Juste à côté de la maison se tenait le ruisseau, rempli de truites.
Au début, on rentrait par les trois petites marches d’escalier en pierre qui donnaient dans la salle. Une cuisine, salle à manger, salon, les trois en un. Au bout, il y avait une porte qui menait dans la chambre de mes grands-parents, lieu interdit sauf si on y était invité. En haut, il y avait deux grandes chambres avec 3 à 4 couchages par pièce. Une avec vue sur la rue et l’autre sur le jardin, celle-ci c’était la mienne. Les enfants d’aujourd’hui seraient perdus, car dans les chambres, on y allait uniquement pour dormir, on jouait dans la salle, dehors, dans la grange, mais pas dans la chambre. L’hiver, on adorait aller se coucher, car avant, on allait voir mon grand-père qui nous donnait une brique bien chaude envelopper dans un vieux morceau de flanelle, provenant d’une de ses vielles chemise, on la mettait dans le lit pour nous réchauffer. Même mon fils de 23 ans a connu les briques, d’ailleurs quand ma grand-mère est décédée, il a demandé en souvenir une brique. Le matin, quand il faisait froid, il y avait des marguerites de givre sur les carreaux, on s’amusait à souffler dessus pour les faire fondre. Les murs de la maison étaient tellement épais que l’été, il faisait frais comme s’il y avait eu une clim.
Sur la droite de la maison, il y avait une grange, une écurie, une bergerie, les clapiers à lapins, et les greniers sur 2 ou 3 étages, ou était entreposés la paille, le foin, les vieux objets et trésors divers. Sur la gauche, il y avait une remise au début, puis par la suite, mon grand-père avait fait des travaux. Il en a fait une entrée qui faisait office de petite salle à manger pour le petit-déjeuner, puis dans la longueur, la cuisine, la douche, le lavabo qui a remplacé la cuvette dans l’évier que l’on remplissait avec l’eau de la bouilloire, et pour finir les WC et le papier toilette, qui ont remplacé la chiotte en bois, et les feuilles de journaux. Tout au bout, la véranda, avec la fosse septique que mon grand-père, mes parents et oncles ont installée en dessous. La cave est en dessous de la maison. Le tout, dans un immense jardin, où il y avait un poulailler, un parc pour les pintades, les canards, la volière pour les pigeons et la deuxième partie de clapiers à lapins. Des garennes, c’est plus vif, mais c’est meilleur. J’ai eu la chance, de ne manger que du bon, du frais durant toute mon enfance.
Certaines vacances, j’étais seule, d’autres avec mes cousins, mais elles étaient rythmées. Je me levais de bonne heure, 6h30 / 7h00, grand max. Je déjeunais, me préparais. Ensuite, je m’adaptais suivant les occupations, de mes grands-parents, des récoltes, du temps ou autre.
Certains jours, j’allais avec ma grand-mère au champ, à la chènevière ou au jardin, pour arroser, bêcher, biner, arracher les mauvaises herbes ou simplement jouer. Parfois, c’était le dédoublage des carottes, ou la cueillette des haricots, des petits pois, des carottes ou des groseilles. Jamais de pesticide, juste de l’amour et du travail. Hé oui, le BIO ne s’appelait pas comme ça, Messieurs les Bobos bio, mais on en faisait déjà. Il ne coûtait pas cher celui-là et pourtant, il était 100 % naturel. Les récoltes annonçaient l’allumage du feu de bois pour les conserves. Dans les bouteilles, quand j’étais plus jeune. Par la suite, la tâche fut simplifiée avec l’arrivée des bocaux “Le Parfait”. Une fois les conserves prêtes, démarrait la cuisson durant des heures dans la chaudière, sorte d’immense chaudron avec un couvercle, où l’on mettait les bocaux calés avec des linges et que l’on remplissait d’eau. La chaudière se trouvait dans un abri en bois avec un toit de tôle que mon grand-père avait fait uniquement avec de la récup.
Certaines fois, c’étaient les confitures, gelées ou sirops de fruits. Je me souviens d’avoir fait mes muscles des bras avec les gelées ou le sirop. On mettait les fruits et on tordait, on tordait, on tordait encore les torchons pour ne laisser échapper que le jus. Je me souviens que ma grand-mère retirait la mousse qui se formait à la surface des fruits et du sucre porté à ébullition. Elle m’expliquait qu’il était important d’écumer les confitures, c’est parce que les impuretés contenues dans la préparation risquaient de faire moisir les confitures. Moi, j’adorais, car pour notre quatre-heures, on mangeait cette écume avec du pain. Un vrai régal! Je l’entends encore quand j’écume mes confitures !
Certains jours, il fallait tuer des volailles, les plumer et les vider. Pour ce genre de tâches, j’étais toujours présente avec ma grand-mère.
Elle aimait nous transmettre les choses, elle aurait voulu aller à l’école pour être institutrice, mais il y avait la ferme, alors elle a travaillé. Petite bonne femme énergique aux cheveux blancs et toujours vêtue d’une blouse.
Quand elle commençait à parler de ménage, de poussière, de tricot ou de couture, j’essayais de m’enfuir. C’était plus facile quand Anne So était là, car elle adorait faire tout ce que détestait…on se complétait.
J’arrivais toujours à m’éclipser pour voir si mon grand-père n’avait pas besoin d’aide. Sachant mon non goût pour les tâches ménagères, il trouvait toujours un truc pour que je le rejoigne, et prévenait ma grand-mère comme quoi il avait besoin de moi. Merci, pépère !
Je préférais mille fois rentrer le bois que mon grand-père sciait en tronçons de 30 cm pour qu’il rentre dans le poêle ou dans la cuisinière à bois. Je préférais mille fois faire des trucs avec mon grand-père, comme construire des murs, des abris, poser du grillage, ramasser le regain, retourner le foin, passer le motoculteur, aller faire des courses, ramasser les escargots ou cueillir les champignons.
Certains jours étaient plus physiques comme lorsqu’il fallait rentrer le foin ou la paille. Cela durait plusieurs jours non-stop ou presque, et il y avait le voisin, la famille qui venaient prêter main forte. On rentrait le nôtre et celui du voisin en même temps, car il nous prêtait le tracteur.
Tous les soirs, j’étais remplie de joie, quand il fallait remplir les jerricans d’eau, prendre la pierre de sel, les grains et mettre le tout soit dans la 4L soit la remorque du motoculteur. Direction le parc à moutons, où mon grand-père avait aussi des biquettes. Dès qu’ils entendaient le moteur, ils arrivaient en courant, nous faisant des câlins, des léchouilles. J’adorais ce moment, avec les moutons et les biquettes, les calinoux, le contact avec eux.
Mais surtout, j’adorais être seule avec mon grand-père dans la vaste plaine. Nous n’avions pas besoin de parler beaucoup, mais nous nous comprenions. C’était un grand bonhomme qui n’avait pas un pet de gras, toujours en bleu de travail et croquenot, avec le sourire. Il avait été résistant, il avait fait le maquis. Il était fils de cultivateur. Nous prenions nos bâtons faits dans du noisetier, et nous allions nous balader un peu dans les bois ; il me montrait les traces des animaux. Il m’a appris à reconnaître les traces de chevreuil, de sanglier, de biche. Il m’a également appris à reconnaître les baies qui se mangeaient ou pas, les différentes sortes d’arbres. Comment reconnaître un charme, d’un frêne, d’un chêne, d’un hêtre et autre ? Il m’a appris à siffler avec un gland et par la suite à siffler simplement comme une grande, sans rien.
Mon grand-père n’a jamais crié, ni mis une calotte (sauf une fois à Cédric et une fois à Julien, c’étaient les plus terribles des douze). Il n’avait pas besoin de hausser le ton, tous les petits-enfants et arrière-petits-enfants lui obéissaient. Il n’avait qu’à dire quelque chose, et des fois même pas, juste avec le regard, tout le monde filait droit. Certains parents d’aujourd’hui diraient que mon grand-père était une sorte de magicien. Un magicien, non, par contre il était toujours présent, à l’écoute, répondant à nos questions de suite, dans le partage, la transmission de la connaissance, dans la vie quoi ! Pas comme beaucoup de parents actuellement qui sont constamment sur leur portable, connecté H 24, physiquement présents, mais l’esprit absent, ailleurs…
En début de soirée, on donnait à manger aux lapins, aux poules, coqs, pintades, canards, oies, pigeons, cochons. Je connaissais les proportions et les habitudes de chacun de nos pensionnaires. Je savais par exemple qu’il ne fallait surtout pas donner du mouron rouge aux lapins, c’était mortel pour eux.
J’aimais renter le grain, et glisser dedans dans la remorque tout en faisait très attention, car ça pouvait être dangereux. Mon grand-père avait toujours un œil sur nous dans ces quarts d’heure-là.
Une fois de temps en temps, on nettoyait les cochons. Ça par contre, ça puait, ce n’était pas forcément drôle, mais bon, on s’y fait. On vidait la bergerie et les clapiers à lapins. On faisait sans se plaindre, on aidait, il y avait de l’entraide, on ne vivait pas chacun pour soi, voir incognito comme maintenant.
Quand j’étais petite, j’avais un carton dans la grange, où je mettais mes amis les orvets que j’avais le droit de ramasser après l’aval de mon grand-père. Il vérifiait toujours avant, il avait toujours peur que je les confonde avec les vipères. Ils ont été mes amis, jusqu’à mes 13 ans et depuis ce fameux jour où je suis devenue femme par la force, j’ai une vraie phobie envers tous les reptiles. C’est comme ça, c’est la vie !
Quand il n’y avait rien à faire de précis, les après-midi, j’allais chez Lydie, la petite fille des voisins, Germaine et Henri, c’étaient des cultivateurs, eux. Mon grand-père était ouvrier dans la coutellerie à Nogent en Bassigny, la journée, et après le travail, il enchaînait une deuxième journée avec les animaux, la culture. Ma grand-mère était à la maison, s’occupant des enfants de la DASS, de ma tante, qui avait 6 ans de plus que moi, et de nous, ses petits-enfants, à tour de rôle ou ensemble…
Avec ma copine Lydie, nous passions une bonne partie de l’après-midi à jouer au papa et à la maman avec des poupées, dans la grange. Quand j’étais seule, je faisais du vélo dans le village, ou je montais au parc à moutons, j’allais cueillir des mûres. Avec mon cousin, nous jouions au foot sur la place, à côté du bief. On avait une certaine liberté, du moment que l’on disait où on allait pour que mes grands-parents ne s’inquiètent pas. J’adorais aller avec Lydie rentrer les vaches, les traire et les ramener au pré. Avec mon short, tee-shirt, mes bottes en caoutchouc et mon bâton, on aurait dit une vraie gamine de la campagne !
La famille se retrouvait le temps d’une journée ou d’un week-end, en juillet pour la fête du village qui était sur la place, à côté de la maison. Mes cousins et moi, on adorait, car on faisait du manège gratuit. Cela était dû au fait que mon grand-père autorisait les forains à se raccorder au compteur électrique. Merci encore pépère, on s’est bien amusés. Autre fête de l’été incontournable, le 14 juillet, avec le défilé aux lampions, et la fameuse pêche à la truite, le tir à la carabine avec remise de lots, organisée par les pompiers du village, sans oublier le feu d’artifice qui était tiré la veille. Et sans oublier la journée du cyclo-cross où les cousins éloignés de la Haute-Saône venaient nous voir. J’aimais ces moments de repas partagé, de relations familiales, de joie de vivre.
Je me rappelle que j’allais quelques fois avec mon oncle pêcher au canal ou dans la Marne. J’adorais ces moments passés tous les deux. En rentrant, on vidait les poissons avant de les faire frire et de les manger.
Avec ma petite tante, nous allions changer les fleurs à l’église, pour que tout soit nickel, pour l’office du dimanche ; où je n’allais jamais, car je restais à la maison avec mon grand-père au grand désespoir de ma grand-mère.
Avant de manger, j’allais chercher le lait dans le bidon, que l’on faisait tourner sans en renverser, sinon, on se faisait engueuler en rentrant.
Après manger, certains soirs, nous écossions ou équeutions les haricots sur les grosses pierres qui nous servaient de banc, dans la petite courette que mon grand-père avait construite. Munis d’un tablier, de passoires et de nos petites mains, nous vidions les paniers que l’on avait remplis le matin. Parfois, un voisin, passait et nous discutions un instant, des choses de la vie, des problèmes, des récoltes ou du temps… Nous avions du lien social, même si on n’avait pas conscience de ce mot à l’époque, car c’était naturel ! Nos amis étaient faits de chair, d’os et de sang, pas des tamagotchis humains.
Certains soirs, nous jouions aux volants, dans la rue, il n’y avait quasiment jamais de voiture, quelques tracteurs, ou moissonneuses, mais on les entendait de loin.
Certains soirs d’hiver, on regardait un peu la télé, les actualités, la météo, et quelques fois un film, sinon on jouait au tarot, à la bataille, aux dominos. Mais l’été, c’est la télé qui nous regardait passer. Elle était en mégas grandes-vacances. Nous savions nous occuper, communiquer, partager des moments, vivre-ensemble, quoi !
Je me souviens aussi des bons petits plats concoctés par ma grand-mère. Les gaufres, les crêpes, les petits gâteaux aux flocons d’avoine, les gâteaux de l’arrière-grand-mère avec trois fois rien, mais super bons. Le mironton, les boulettes de viande, les tomates farcies, les œufs mimosa, les haricots verts à la tomate qui avait collé à la casserole qui était vieille de 50 ans et qui avait appartenu à mon arrière-grand-mère, mais que l’on ne jetait pas, car rien ne se jetait. Les bouchées à la reine maison, le riz aux oignons, que seule ma grand-mère faisait de cette façon. Les tartes aux fraises, aux mirabelles, aux mûres et framboises du jardin. La poule en sauce avec son jaune d’œuf inachevé, le poulet pour qui l’on se battait presque pour avoir le gésier, le foie, les pattes, et le cou, car la tête était pour mon grand-père comme celle du lapin. Chose qu’il n’y a plus dans les poulets ou lapins du commerce…
Pour les quatre heures, on avait le droit aux REM, aux Princes chocolat. Mais la plupart du temps, on prenait un morceau de grosse baguette avec du beurre et du chocolat noir, ou du poulain en poudre que l’on saupoudrait, ou un morceau de fromage. Un fruit et de l’eau ou du sirop de cassis que ma grand-mère faisait elle-même et le tour était joué. Nous repartions à nos occupations.
Le soir, les repas étaient simples, une soupe de légumes, une soupe à l’oignon ou à la farine, une salade, du fromage ou du fromage blanc aux fines herbes. Hé oui, chez nous, on le mange salé ! Un peu de pain, de la confiture, ou un fruit suivant la saison. Parfois, quand la dépense physique était plus grosse, on mangeait des pommes de terre sautées, l’omelette aux pommes de terre ou aux herbes fraîchement cueillies au jardin, avec un filet de vinaigre, ou des œufs aux herbes poêlés, un vrai régal… Les repas étaient équilibrés même si à l’époque, on ne parlait pas de cela, c’était fait naturellement, et par économie.
Mes grands-parents n’avaient pas beaucoup de sous, mais nous n’avons jamais manqué de rien. On faisait avec les moyens du bord. Ils étaient écolos bien avant l’heure. Ils me font rire, ces Bobos écolos de nos jours, avec leur grande découverte du ” y a cas “… Ne pas utiliser de sacs plastiques, consommer des produits frais, ne pas prendre de bain, économiser l’eau, nous, on faisait déjà comme ça. On mettait un peu d’eau dans la cuvette, mais pas à ras bord, juste le nécessaire. Quand on lavait la salade, l’eau, on ne la jetait pas, on la gardait pour le lavage des mains dans la journée, et le soir, on la versait pour arroser les plantes. Les draps usés se transformaient en torchons pour la cuisine. Une poêle qui colle se transformait en soucoupe pour les fleurs dehors. Tout ce qui se mangeait finissait aux poules, aux cochons ou sur le tas de fumier, et non dans la poubelle, et oui le compost, on en faisait déjà, on ne vous a pas attendus, messieurs dames… On allumait la lampe que pour manger et uniquement s’il faisait trop noir. Quand on quittait une pièce éclairée, on éteignait la lumière, systématiquement. Quand on se levait la nuit, on prenait une lampe électrique, on n’allumait pas à tout-va. Quand on allait chercher quelque chose dans la cuisine, on ne partait jamais les mains vides, mais ça, c’était pour être rentable…
Parce qu’ils avaient connu la guerre, et par économie certes, mes grands-parents vivaient dans le respect de la nature et faisaient avec peu plein de choses, sans consommer à outrance. Les boites de fromage blanc, ou autre contenant en plastique ou en verre, n’étaient pas jetés, tout comme les sacs. Ils étaient gardés pour servir et resservir encore et encore. Car oui, le plastique, c’est fantastique ! Il avait raison avec ce slogan ! Ça a simplifié la vie, à l’époque, mais mes grands-parents avaient bien compris que ” plastique ” ne rimait pas forcément avec “écologique” mais ils avaient surtout compris que ” surconsommation ” rimait avec ” pollution ” et ” moins de pognon ” !
Quand je pense à un souvenir de vacances ancien, je pense à ces vacances d’enfance chez mes grands-parents, qui sont ma madeleine de Proust ! Ces jours heureux que j’ai vécus durant toute mon enfance, avec Jeanne et André, mes grands-parents. J’en profite pour leur dire, MERCI ! Merci, de m’avoir aimée, de m’avoir appris plein de choses, d’avoir fait de moi ce que je suis. Merci de m’avoir appris ces valeurs humaines, de m’avoir enseigné la nature et la respecter. Merci de m’avoir montré que le bonheur n’a rien avoir avec l’argent. Que le bonheur est plutôt en lien avec le partage, l’amour, la fraternité, l’entraide, l’amitié, la liberté, l’honnêteté, la confiance, la transmission. Merci pour tous ces plaisirs simples découverts et partagés avec vous. Merci pour ces choses que j’ai vécues et qui n’existent plus que dans les musées ou les livres. Merci de m’avoir permis de grandir, heureuse et en sécurité. Merci de m’avoir prise en vacances et d’avoir passé du temps avec moi, de m’avoir appris des chansons, raconter des histoires, de m’avoir aimée.
Aujourd’hui, vous êtes partis, depuis plus de 16 ans pour toi pépère et depuis plus de 2 ans pour toi mémère, mais vous êtes toujours dans mon cœur. Il ne se passe pas un jour sans que vous ne soyez dans mes pensées, dans mon cœur, pas un jour sans revivre un moment passé avec vous.
Pépère, Mémère, je vous aime.
De Laurence
Londres, juillet 1997
C’était en 1997, l’année de ma séparation d’avec le père de mes enfants et l’été de la mort tragique de la Princesse Diana. Mon fils aîné avait neuf ans et demi et mon dernier allait fêter sous peu ses quatre ans. Je leur avais promis en nous installant dans notre nouvelle demeure de les emmener à Londres voir mes amis anglais pendant deux semaines.
Hop, nous voilà à la gare d’Angoulême : direction Lille Europe pour attraper l’Eurostar. C’était la première fois qu’ils partaient à l’étranger. La grande aventure !
Le voyage en Eurostar les a fascinés, car ça va très vite. Le temps de dire ouf, on est dans le noir comme dans un tunnel et hop, on voit des moutons dans des prairies bien vertes; on sait alors qu’on est en Angleterre. Je ne vous raconte pas l’excitation du petit dernier. Il ne tenait pas en place.
A l’époque, on arrivait à la gare de St Pancras. Mais le chemin pour nous rendre chez mon ami Eugene (que je connais depuis l’âge de mes 18 ans) résidant dans le nord de Londres était loin d’être terminé. Il nous fallut prendre le métro et deux bus pour arriver à destination. Je vous passe l’écarquillement des yeux de mes enfants parce qu’on conduisait à gauche. Vous savez bien que les Anglais ne font pas les choses comme nous !
Nous voilà installés chez mon ami, sa femme et ses quatre enfants, dont la dernière avait à l’époque juste six mois de plus que mon dernier. Dans la famille de mes amis, personne ne parle français ; ce détail est très important. Je passais donc mon temps à faire la traduction pour les uns et les autres. Mes amis n’avaient pas encore fait la connaissance de mon deuxième fils.
J’avais concocté pour eux un programme à leur dimension : zoo de Londres, le Muséum d’histoire naturelle où un tyrannosaure en taille réelle était exposé, les jeux dans les parcs, la relève de la garde devant le palais de Buckingham, manger au McDonald’s, inexistant dans notre ville à l’époque (les temps ont bien changé !!) et grande aventure pour mes fils à manger avec les doigts. Ils ont pris l’habitude à midi de manger comme les Anglais : sandwiches à l’anglaise, c’est-à-dire avec du pain de mie et petit paquet de chips et une canette de coca. C’était la fête, alors j’étais moins regardante sur la nourriture pour cet été si particulier.
Bien évidemment, ce que mes enfants ont préféré, c’est voyager dans les ‘double-decker ‘ ou autobus à impériale pour nous rendre dans le centre de Londres. C’était la grande affaire de la journée : s’assoir en haut au niveau supérieur pour voir le spectacle, le ‘pestacle’, comme disait mon dernier à ce temps-là. Ils refusaient de prendre le métro : ils voulaient voir, même si cela nous prenait plus de 90 minutes pour nous rendre à destination dans le centre de la capitale.
Il est fascinant à Londres de constater le nombre incroyable de bus à impériale, notamment dans la rue commerçante par excellence, Oxford Street. On ne voit que des bus, ce qui faisait trépigner mes fils de plaisir.
Il est aussi incroyable de voir la facilité d’adaptation des enfants dans un nouvel environnement. Ils vivaient dans cette ville sans aucun problème, malgré toutes les nouveautés qui s’offraient à leurs yeux ébahis.
La barrière de la langue n’était pas un problème non plus, contrairement aux adultes. Une après-midi, mon deuxième fiston se mit à jouer avec la fille de la maison avec les petits jouets qu’on avait amenés dans la valise. Il lui expliquait les règles du jeu en question en français, elle répondait en anglais. Ils jouèrent ainsi jusqu’au repas du soir. C’était fascinant à observer. Je n’en revenais pas !
Mes fils adoraient aussi la maison où nous logions car les enfants de mon ami avaient une console de jeux. Ce fut une initiation en bonne et due forme, plutôt pour l’aîné.
Je me souviens de cet été-là comme si c’était hier. Mon aîné a bientôt 33 ans, et le cadet va fêter sous peu ses 28 ans. Que de temps a passé sous les ponts !
Mon cadet, au terme de notre séjour, a bien résumé la situation : « j’adore l’Angleterre et les Anglais mais ils parlent trop anglais » ! C’est beau à 4 ans comme philosophie ! On a bien rigolé à cette boutade qui clôturait notre séjour britannique et dont je me souviens encore après tant d’années !
Quel rendez-vous chaque samedi de lire les textes publiés! C’est un pur bonheur!
Alors, pour cette dernière newsletter avant l’été, je vous souhaite de passer de beaux moments, en famille ou avec vos amis, de profiter de moments joyeux…qui sait ce qui adviendra à la rentrée?!
Portez-vous bien pendant ces 2 mois et surtout prenez soin de vous pour que je vous retrouve en pleine forme début septembre…comme convenu!
Si vous désirez écrire pendant les vacances estivales, vous êtes les bienvenus. Envoyez-moi vos histoires ou vos poèmes à l’adresse suivante:
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Je vais profiter de ces quelques semaines pour me vider l’esprit, pour me reposer et surtout pour écrire. Je vais publier certains chapitres de mon roman, tout au long de l’été. J’ai changé l’organisation de l’intrigue et le style.
Mais, j’ai aussi d’autres projets à venir…Vous allez me manquer, mais je penserai à vous tout au long de ces semaines!
Bel été à vous
Créativement vôtre,
Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE
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Je vous remercie par avance de votre geste.
La version papier de “299 Conseils pour mieux écrire” arrive en juillet
Profitez de l’été pour acheter la version papier de mon guide si pratique!
Que dire de mieux que de profiter de vos instants libres pour vous former et oser écrire! La plage, c’est bien! Faire des siestes, c’est bien!
Mais, apprendre, réfléchir, dépasser ses peurs, c’est encore mieux!
Mon livre version papier sera à moins de 20€ pour 299 CONSEILS et 637 pages!



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