
Avec un peu de retard ce matin, je vous envoie les textes de la proposition d’écriture N° 136 avec des expressions contenant des chiffres.
Cela m’a amusée de relire certaines expressions que j’avais oubliées ou qu’on utilise peu.
Voici vos textes. Je vous en souhaite une belle lecture.
De Patricia
Ce matin-là, elle avait le moral à zéro.
Elle devait s’occuper du jardin de sa maman, mais les deux femmes n’étaient pas d’accord sur le procédé à adopter. La mère voulait remettre du gazon sur son modeste bout de terrain, tandis que la fille, elle, préférait y déposer de jolis cailloux blancs décoratifs.
Certes, le petit espace d’à peine vingt mètres carrés devant la maison ne demandait pas trop d’entretien, mais c’était la première chose que l’on voyait en arrivant et la jeune femme souhaitait que l’ensemble soit attrayant et bucolique.
Elles décidèrent donc de couper la poire en deux et la partie proche de la baie vitrée, sur laquelle reposeraient une petite table ronde et deux chaises, serait recouverte de cailloux tandis que le reste de l’espace recevrait une charmante pelouse synthétique.
Avec ses deux mains gauches, la fille se disait que c’était plus simple, pas besoin de tondre !
Sitôt dit, sitôt fait, prenant leur courage à deux mains, les deux femmes se mirent au travail, à la quatre six deux, pressées de voir le résultat. On dit bien que les deux font la paire et ces deux-là n’étaient pas mère et fille pour rien.
La jeune femme se mit en quatre pour aller chercher les gros sacs de cailloux, le gazon textile, ratisser, aplanir, déposer…
En moins de deux, le modeste jardinet fut aménagé et les deux parentes purent enfin s’asseoir tranquillement, sur les deux chaises autour de la petite table ronde, et boire un thé bien mérité.
Les chiens ne font pas des chats, dit-on, et ces deux-là se ressemblaient vraiment comme deux gouttes d’eau !
De Claude
Alexandra, une fois le défilé terminé, s’engouffre dans un taxi. À peine arrivée à son hôtel elle monte les escaliers quatre à quatre, le souffle court. Une fois dans sa chambre d’hôtel, elle balance, d’un coup de pied maîtrisé, ses escarpins dorés aux talons vertigineux. En deux temps trois mouvements, elle se défait de tous les artifices que lui impose son métier de mannequin.
Sous la perruque blonde apparaît alors un crâne rasé lisse comme la peau d’un bébé. Elle aperçoit furtivement son reflet dans le miroir. Un léger sourire se dessine sur ses lèvres. Elle aime ça Alexandra : avoir la boule à zéro, se sentir libre comme l’air. N’en déplaise à certains. De toute façon, elle se fout du tiers comme du quart et puis ce n’est pas son style de couper les cheveux en quatre. En cinq sec, la voilà qui se démaquille. Elle efface minutieusement les couches de fards qui obstruaient tous les pores de sa peau. Peu à peu elle retrouve son vrai visage.
Un visage encore juvénile malgré ses trente printemps. D’un geste vif, elle fait glisser sa robe noire en lamé sur le sol. Elle est nue comme un ver. En un tour de main elle enfile un tee-shirt blanc, un jean sans forme. Pour finir, elle chausse des santiags et endosse un perfecto au cuir usé. Elle n’a pas de temps à perdre car elle a rendez-vous avec le Commissaire Vaillant à la PJ de Lyon. Alexandra est « profiler ». Le mannequinat, c’est juste un passe-temps. Ensemble, ils doivent dresser le profil psychologique d’un meurtrier en série qui sévit dans la région depuis plusieurs années. Cette collaboration ils ne l’ont pas voulue. La décision émane d’en haut, ils doivent s’y plier malgré leurs réticences.
Tout en se dirigeant vers le parking de l’hôtel où l’attend sa moto, Alexandra se remémore tous les aspects de ce dossier sensible. Elle a passé une partie de la nuit dernière à l’éplucher, à traquer le moindre indice. Elle est désormais prête à communiquer ses conclusions au Commissaire Vaillant. Elle a hâte de faire sa connaissance bien que sa réputation de flic « borderline » l’ai précédé. En réalité, ce n’est pas trop pour lui déplaire. Alexandra n’aime pas les personnes sans aspérité, sans envergure. Alors peut-être que cela « matchera » entre elle et lui, qui sait ?
Tandis qu’elle roule à vive allure dans les rues de la ville, Alexandra jette un œil inquiet dans son rétroviseur. Elle a l’impression qu’une berline noire aux vitres teintées la suit depuis un moment. La jeune femme n’a pas le temps d’aller au bout de sa réflexion que le véhicule la percute violemment. Fort heureusement, grâce à sa dextérité, elle parvient à maîtriser son engin et éviter l’accident. Dès lors elle n’a qu’une idée en tête : se sortir au plus vite de ce traquenard. Il est plus que temps de remettre les compteurs à zéro si elle veut rester en vie. Elle n’a qu’une seule alternative : mettre fin à cette course poursuite avant qu’il ne soit trop tard. Aussitôt elle effectue une rapide accélération qui lui permet de mettre un peu de distance entre elle et le véhicule.
Le but de la manœuvre est de lui laisser le temps de faire volte-face et de foncer sur l’automobile. Malgré un scénario pour le moins scabreux, Alexandra a réussi son coup. Sa moto roule à vive allure tout droit vers la berline dont on imagine aisément que le conducteur n’avait pas prévu une telle issue. Au moment de l’impact, Alexandra dévie au dernier moment sa moto sur la gauche, envoyant son assaillant dans le Rhône sous les yeux médusés des badauds. Ouf ! il était moins une !
Quelques rues plus loin Alexandra gare sa moto. Vaillant doit être furieux à l’heure qu’il est. Elle doit lui expliquer ce à quoi elle a réchappé. Tout en composant le numéro de téléphone du commissaire, elle réfléchit à ce qu’il vient de se passer. Qui pouvait être au courant de sa présence ici si ce n’est une personne proche de la sphère policière. Une taupe ! Désormais, Alexandra va devoir traquer non pas un, mais deux ennemis.
Le commissaire Vaillant fait les cent pas dans son bureau tirant nerveusement sur sa cigarette électronique. Voilà plus de quarante-cinq minutes qu’il attend cette nana. Cette « Alexandra » que sa hiérarchie lui impose afin de mettre la main sur ce criminel qui hante ses nuits. Comme si son équipe et lui n’étaient pas capables de faire le « job ». On les prend pour qui, lui et sa brigade ? Des amateurs ? Il ne décolère pas. Vaillant, en rage, transpire abondamment sous son costume en lin. Depuis quelque temps, il a tendance à l’embonpoint, ce qui n’arrange pas les choses mais les régimes trop peu pour lui. Il aime la bonne chair et le bon vin et ça se voit. De toute façon, il n’a que faire de son apparence physique et du regard des autres. Tout à coup, il aboie un ordre à François, son lieutenant, dont le bureau jouxte le sien. L’homme, toujours le doigt sur la couture, se présente à lui en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.
– Oui, Chef. A vos ordres, Chef.
– Je t’ai déjà dit cent fois de ne pas m’appeler Chef mais Commissaire – hurle Vaillant.
– Trouve-moi le numéro de téléphone de cette « Alexandra », appelle-là et demande-lui si elle se fout de ma « gueule ». Ça fait une heure que je l’attends ! Si elle croit que j’ai que ça à foutre.
– D’accord Chef heu… Commissaire, je l’appelle tout de suite.
François s’éclipse sur la pointe des pieds laissant Vaillant seul dans son bureau. Le Commissaire s’apprête à aller déjeuner lorsqu’il tombe nez à nez avec Alexandra, son casque de moto sous le bras. Sans même prendre le temps de s’excuser, la jeune femme referme la porte derrière elle, obligeant Vaillant à changer ses plans. Soudain, l’homme sent la situation lui échapper.
« Bon Dieu que cette fille est belle » songe-t ’il tout en l’observant du coin de l’œil. Alexandra, elle, n’a pas l’air le moins du monde impressionnée par son interlocuteur. Elle a pris place dans le fauteuil du Commissaire sans y être invitée, ses longues jambes négligemment posées sur le bureau. Vaillant en perd ses mots. Il écoute, bouche bée, Alexandra lui relater les derniers évènements d’un ton incisif. Il n’en croit pas ses oreilles. Comment une fille aussi délicate a-t ’elle pu se sortir de ce piège sans aide extérieure ? Une certaine admiration commence à poindre dans son regard. Finalement, au diable les préjugés, autant faire contre mauvaise fortune bon cœur après tout. Et sans faire ni une ni deux, le policier sort d’une armoire un volumineux dossier qu’il pointe sous le nez d’Alexandra. Puis, sans même lui laisser le temps de réagir, il lui propose, d’un ton mielleux :
– Avant toute chose, si on allait se restaurer ? Vous êtes mon invitée Alexandra. Nous pourrons ainsi faire plus ample connaissance vous et moi. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Un brin surprise Alexandra accepte néanmoins la proposition de Vaillant.
– Je ne dis pas non. Toutes ces émotions m’ont creusé. D’autant plus que j’ai toujours les idées plus claires une fois le ventre plein.
Ravi de la tournure des évènements, Vaillant se réjouit d’avance de traquer l’ennemi public numéro un aux côtés de cette créature de rêve. De quoi rompre la monotonie d’un flic solitaire, une fois n’est pas coutume. Et advienne que pourra.
De Nicole
Des chiffres et des lettres
Il arriva à la réunion comme un cheveu dans la soupe, enfin si l’on peut dire, Valentin avait la boule à zéro, vêtu à la six quatre deux, toujours en retard, toujours pressé. Il restait le mouton à cinq pattes.
Il participait à une réunions des anciens de l’Athénée, trois pelés et un tondu.
Ils attendaient le cador de la classe, Ludo. Celui-ci arriva, à son habitude, tiré à quatre épingles, il s’était mis sur son trente-et-un.
Débutèrent les bavardages d’usage « qu’es-tu devenu ? Et ta famille, marié, des enfants et ton boulot? »
A toutes ses cases, Valentin avait tout faux. Il s’en foutait comme de l’an quarante.
Valentin brûlait la vie par les deux bouts, la picole, la drague et de plus, question travail, il avait deux mains gauches, pas de quoi couper les cheveux en quatre. Très vite il en eut assez, de plus, ils étaient treize à table. Avant de boire le bouillon de onze heures, il n’allait pas attendre cent sept ans. Il mit ses bottes de sept lieues et quitta l’assemblée.
« A un de ces quatre ! »
Quatre à quatre, il regagna son appart, son canapé et regarda le match des onze tricolore,
peinard…
De Lucette
Il était « moins une » que l’on gagne à la belote. Mais nos « adversaires » nous ont mis un capot en toute fin de partie que nous menions haut la main. C’est ce fameux « dix de der » d’en face, qui nous l’a fait perdre. Mais on va remettre ça dans quelques temps, ils vont voir de quel bois on se chauffe.
La partie finie, on se désaltère sur la terrasse, il fait une chaleur « à avoir la boule à zéro ». Je commence à servir les rafraîchissements, mais « ayant deux mains gauches », j’ai renversé un verre, il s’est cassé en étalant le breuvage sur ma voisine qui n’était pas contente du tout.
Je me serai bien « mise à six pieds sous terre », tellement j’étais vexée. Devant tous mes invités, j’ai voulu parader en sortant un joli service, du coup, il me manque un verre. Ce service sera dépareillé à tout jamais. Là, pour le coup je m’attribue « un zéro de conduite ».
Mes invité partis, je fais du rangement, et mes yeux tombent sur une pile de livres pour enfants. J’adorais quand ma mère me les lisait, blottie dans ses bras. Je rêvais aux princes et aux princesses. La « Belle au bois dormant » me fascinait. Ma petite-fille de cinq ans, elle, adore « Blanche Neige et les sept nains ». Imaginer les sept nains au service de leur fée, qui travaillent en chantant. C’est sûr que les enfants nous posent des questions auxquelles on n’avait pas pensé.
Ils sont très pertinents, c’est drôle d’essayer de comprendre ce qu’ils veulent nous dire dans un langage approximatif.
« Neuf fois sur dix, » je m’endors devant un film. On arrive dans la salle de cinéma, il y avait « trois pelés et un tondu ». Pour faire plaisir, j’accompagne mon amie, qui me recommande ce film. C’était un navet comme on en voit rarement, bâclé, ficelé à « la six quatre deux ». Nous avons quand même ri, tellement les gags étaient lourds. Les spectateurs ont cru à la propagande. Mais ils ne nous y reprendront plus…
Je rentre chez moi, je vais regarder le programme de ce soir, bien calée dans mon fauteuil, enfin là, je regarderai la télé que je reçois « cinq sur cinq » et la journée, riche en rebondissements, se terminera en attendant demain qui se profile déjà dans quelques heures…
De Lisa
Tiens ! Notre mentaliste qui est de retour au kasino sur la même scène, en espérant d’avoir la paix avec les « invisibles » comme il prétend.
Il a conçu un nouveau one man show sur les chiffres qu’on retrouve dans la vie de tous les jours. Je ne vous en dis pas plus car même moi-même, j’ignore la suite vu que j’écris au fur et à mesure.
Le jour J…
« Bonsoir, Bonsoir , Mesdames et Messieurs, oh ! quel joie ! d’être nombreux et Bonsoir, Bonsoir , Mesdames et Messieurs, soyez prêts pour ce moment merveilleux.
Alors, pour les personnes qui me connaissent, je suis le célèbre Mentaliste qui vous montre le classique de chez classique, mais aujourd’hui nouveau show. Qui veut bien être mon assistant ou assistante ? Non ! Non ! Je rigole ! On ne va pas faire un spectacle sur mon métier, vu les émotions de l’autre fois. Cette fois-ci, je ne vais appeler personne. J’adore la solitude sur scène. Bon ! On va jouer avec les chiffres de 1 à 10. Vous allez me souffler une expression où le numéro est dedans.
Allez ! Je démarre le 01 comme « il était moins une », vous avez compris la règle du jeu ;
La suite le 02 comme… personne oui ! Vous ! »
La dame dit : « avoir deux mains gauches »
-Bravo ! Elle a tout compris. Le 03
Et le public crie : les trois mousquetaires
-Allez musique ! Le 04 Le plus simple
Et le public crie : Le 4 quarts
Puis il ne s’attend pas à qu’il entend : on vous entend cinq sur cinq.
-Ah ! On veut me surprendre, si je vous dis : avoir zéro de conduite ! Je vous ai bien eu. Car un peu de désordre ne fait pas de mal.
Le 07, non et là une dame annonce la route nationale 7.
-Trop facile si vous parle d’un simplet et le public reprend en cœur, Blanche-neige et les sept nains
Encore un petit effort le 08 . Personne !
Ah ! Je vois le compteur est en train de finir et je vous remercie car l’autre fois je n’ai pas fait le spectacle mais cette fois-ci, aucune surprise ! Rien de Neuf !
À la prochaine !
Il quitte la scène
De Francoise V
Ce n’est pas l’histoire de Blanche Neige et les sept nains que je vais vous raconter. Vous la connaissez déjà. Quand vous étiez petit, on vous lisait des histoires, et je pense que vous les receviez cinq sur cinq. Ce n’est pas non plus trois pelés et un tondu qui les écoutaient… vous étiez des milliers d’enfants à raffoler de contes et neuf fois sur dix, vous réclamiez votre conte préféré. J’me trompe ?
Moi, c’était les histoires de Jules Vernes qui me passionnaient : « Vingt Mille Lieues sous les Mers ». Quand je réclamais le livre, je disais : « Tu me racontes l’histoire « A cinq pieds sous terre » s’il te plaît ? A tous les coups, on me riait au nez : « T’es une gosse, toi, tu as le temps de lire… moi je fais les trois huit à l’usine, alors prends ta lecture en main, et fiche moi la paix. »
Ce genre de réflexion était faite par mon père qui voulait toujours avoir le dix de der. Un grand gaillard costaud ; il avait la boule à zéro. Ses cheveux étaient tombés très jeune à la suite d’une grosse peur. Vous voulez savoir quelle fut cette peur ? Il était sur un toit de hangar pour réparer une antenne, et comme il a deux mains gauches, il a glissé sur les tuiles, s’est raccroché à la gouttière et a failli faire une belle chute mortelle. La peur de sa vie ! Pauvre père qui avait grimpé Vingt Mille lieues au-dessus d’la Terre ! Moi je lui aurais donné zéro de conduite ! Il n’avait pas pris de précaution, n’était pas organisé, faisait les choses à la six quatre deux. Sa maladresse légendaire était bien connue. Son salaire ne lui permettait pas de payer un ouvrier pour une quelconque réparation, alors il était capable de brûler la chandelle par les deux bouts…
En tout cas, pour en revenir à mon histoire préférée, je peux vous dire que c’est moi qui ai raconté « Vingt Mille Lieues sous les Mers » à mon père…. Et cela l’a fait rêver, le transportant dans l’Univers des Étoiles de mers !
De Marie-Laure
Le baccalauréat
Depuis plusieurs semaines déjà, l’ ambiance est tendue à la maison. Les parents tempèrent comme ils peuvent, mais ils ne réprimandent pas lorsque les portes claquent ou que les noms d’oiseaux fusent à tous les étages.
Le fils redouble sa terminale, sur l’insistance des parents. Lui se voit déjà musicien et au fond, il se moque du baccalauréat comme de l’an quarante. Les parents ont posé le cadre : révisions entre neuf heures et midi, puis de quatorze à dix-sept heures et aucune négociation n’ est recevable. André doit s’y plier, bon gré mal gré, mais à dix-sept heures tapantes, il se met sur son trente et un, enfourche sa mobylette, guitare à l’ épaule pour rejoindre ses potes. Dans la famille, il a l’image de l’artiste, joyeux fêtard, il a la réputation de brûler la chandelle par les deux bouts et personne n’y trouve à redire !
La fille est plus besogneuse et elle n’est pas franchement ravie d’avoir son frangin en terminale comme elle. Pour tout dire, avec seulement une petite année d’ écart, tout au long de leur scolarité, les deux enfants se sont suivis et Laurence a toujours entendu des louanges sur son frère qui avait de bons résultats, sans trop bosser pour autant.
Elle ne sait pas encore vers quel métier se diriger, mais elle veut aller à la fac et si possible en changeant de ville, pour avoir sa petite piaule et son indépendance. Faut dire qu’avec les filles du quartier qui se refont les épisodes d’ « Angélique marquise des anges », elle se sent comme le mouton à cinq pattes. Elles sont copines car elles prennent le bus ensemble, mais à peine les portes du lycée franchies, leur univers se sépare. Alors oui, Laurence a le stress, tous les soirs, elle est à deux doigts de pleurer lorsque sa mère lui demande d’ éteindre sa lumière.
Le jour J arrive avec l’ épreuve de philo : « Dire de l’art qu’il n’est pas utilitaire, est ce dire qu’il est inutile ? » A la lecture de l’énoncé, Laurence a le sentiment de s’enfoncer au troisième sous -sol, tout s’embrouille dans sa tête. Elle est comme là mais pas là. Pourtant, elle remarque le sourire d’un candidat installé dans la diagonale vers la fenêtre. Elle ne le connaît pas, mais il est plutôt beau gosse. Ce sourire lui est-il seulement adressé ?
Il n’empêche que la magie opère et en deux temps trois mouvements, elle commence à gribouiller un plan, avec une énergie dont elle ne soupçonnait plus l’existence ! De temps à autre, elle jette un œil vers Monsieur Sourire, voir qu’il planche la rassure, peut être sortiront- ils de la salle en même temps, qui sait ? Attention, rester concentrée, ne pas perdre de temps à rêvasser. Laurence se ressaisit et s’ organise, une gorgée d’eau avec un petit coup d’œil dans la diagonale et de suite replonge dans sa dissertation. Si l’ art l’inspire, il y a un petit quelque chose qui lui donne des ailes !
Elle en est à peaufiner sa conclusion lorsqu’elle s’aperçoit que Monsieur Sourire vient de franchir la porte. Il y a dans sa tête comme une sorte de Gimini Criquet qui lui intime l’ordre de ne pas bâcler et relire posément sa copie avant de sortir. A cette injonction, elle s’y conforme, même si ça grouille un peu dans son ventre.
Dans la cour du lycée, des groupes se forment de tous les côtés, une certaine tension est encore palpable, mais progressivement l’humeur devient plus joyeuse, avec l’énorme sentiment d’avoir franchi le cap le plus dur pour plus d’un élève !
Quelqu’un semble l’appeler depuis sous le préau, à contrejour, elle ne reconnaît d’abord personne, puis son escogriffe de frangin sort du lot et l’interpelle encore. Ils vont boire un coup pour fêter cette fin de première épreuve, elle pourrait se joindre à eux, plutôt que de reprendre le premier bus pour encore réviser la suite. Laurence s’ apprête à affûter ses arguments, lorsqu’elle s’aperçoit que Monsieur Sourire est dans le groupe. Énorme dilemme, en deux coups de cuiller à pot se positionner et donner une réponse la plus naturelle possible. Rebelote, elle a de nouveau le trouillomètre à zéro, quelle journée, décidément !
Elle prend son courage à deux mains et se joint au groupe, mise à part deux copains d’André, elle ne connaît personne. Ce n’est pas dans ses habitudes d’aller comme ça taper l’incruste dans un groupe, mais l’enjeu en vaut bien la chandelle, aujourd’hui elle a décidé de faire un effort.
De fil en aiguille, elle se sent plus à l’aise et se met dans l’ambiance, lorsqu’ une super gonzesse sortie de nulle part se jette au cou de Monsieur Sourire. Elle se liquéfie sur place, c’est comme si elle venait d’avaler un bouillon de onze heures !
Tout de go, une nouvelle épreuve, ne pas perdre la face, sembler détachée au possible et continuer à rire de bon cœur. L’ année du baccalauréat est et restera un grand tournant dans sa mémoire.
De Claudine
A toi,
Ce que la vie nous a donné la chance de vivre est inespéré ; enfin devrait être inespéré si tu n’avais pas cette manie de couper les cheveux en quatre les trois quart du temps.
Avec toi, il faut vivre en permanence à cent à l’heure.
Oh ça c’est sûr tu n’es pourtant pas du genre à faire les quatre cents coups ni à brûler la chandelle par les deux bouts.
Lorsque nous nous sommes rencontrés, il y avait une flamme qui brillait au coin de nos yeux. Et pourtant, j’ai failli passer à côté de toi sans te donner la moindre chance, il était moins une que je continue, dans cette gare à faire les cent pas, sans t’accorder le moindre intérêt.
Le hasard, ou tout autre chose, nous a réunis sur un banc où nous avons échangé sur divers sujets. Nous nous recevions cinq sur cinq.
Tu étais, comme tu l’es toujours, tiré à quatre épingles, ce qui pour moi neuf fois sur dix, me fait craquer chez un homme.
Mais voilà, tout n’ait pas aussi rose dans la vraie vie. Quand je t’ai mieux connu, j’ai réalisé que pour toi, c’était une de perdue dix de retrouvées.
Si je prends le temps de t’écrire aujourd’hui, de mettre des mots sur mes émotions, c’est pour évoquer un sujet qui me pèse beaucoup et qui remet en question nombre de mes projets avec toi. Depuis huit mois, je vois bien que tu ne sais pas ce que tu veux. Tu fais trois pas en avant pour en faire quatre en arrière.
Ta peur de t’engager est communicative, comment être sereine, ne pas douter de l’avenir quand on est seul à y croire ? Parfois en t’écoutant, j’ai l’impression de voir trente-six chandelles ; pas les étoiles que nous avions dans les yeux au départ de notre aventure, non mais de celles qui nous envoie six pieds sous terre pour échapper à ce que tu appelles « tes quatre vérités ».
Tu en souffres aussi mais tu ne réagis pas, tu n’essayes même pas de me réconforter.
Huit mois que je subis ce comportement changeant par amour pour toi, huit mois que je supporte tes craintes. Comment dans ce cas ne pas avoir le moral à zéro ?
Je suis à deux doigts de lâcher prise.
Je pense que tu peux comprendre qu’il est normal que je me préserve ; je ne désire pas me lancer tête-bêche dans une relation à sens unique. J’aimerais tant te faire réagir, d’autant plus que j’ai conscience de tes sentiments envers moi mais, neuf fois sur dix, tu t’éclipses en deux temps trois mouvements pour éviter la discussion. Ou alors tu m’accuses de chercher midi à quatorze heures.
As-tu vraiment envie de me perdre ? Si tu te poses cette question, c’est qu’il ne sert plus à rien d’espérer.
Je ne vais pas y aller par quatre chemins, je ne peux pas attendre toute ma vie et passer à côté des plus grandes joies qu’elle pourrait m’offrir si tu ne veux rien avec moi. J’ai besoin de savoir où tu en es, ce que toi tu veux, ce que toi tu imagines lorsque tu regardes vers l’avant.
Être entre deux n’est pas mon fort.
C’est avec toi que j’imagine ma vie, présente et future. Mais, j’ai parfois l’impression que tu te moques de moi comme de l’an quarante.
Je suis prête à beaucoup pour toi, mais j’ai besoin de savoir où tu en es dans tes sentiments et je ne vais pas y aller par quatre chemins : souhaites tu construire en avenir avec moi ?
Et souviens toi, un tien vaut mieux que deux tu l’auras.
J’espère obtenir des réponses à tous mes doutes… Je t’aime
De Catherine
L’heure des comptes a sonné.
Oh! Purée ! Le réveil n’a pas sonné! Ou alors il ne l’a pas entendu… De toutes façons, ça revient au même. Pas le moment de tergiverser, il faut foncer. S’habiller en deux temps trois mouvements et surtout ne pas mettre les deux pieds dans le même sabot.
Ni une ni deux, Tony saute dans son pantalon, enfile un tee-shirt propre et fonce dans la salle de bain. En deux coups de cuiller à pot, le peigne tente d’assagir ses épis et la brosse à dents effleure ses molaires, juste ce qu’il faut pour rafraîchir son haleine.
C’est qu’il joue gros aujourd’hui. Son agent de probation doit venir aujourd’hui au travail pour valider sa conduite avec son maître de stage. S’il arrive en retard, il va couper les cheveux en quatre et n’ira pas par quatre chemins. Et comme un homme averti en vaut deux, Tony ne pourra pas dire qu’il ne savait pas.
De deux choses l’une : soit son stage est validé et il peut continuer sa formation en étant libre, soit il n’est pas validé et retour à la case prison. Et ça, il ne peut pas l’envisager. Et puis, il l’aime, son apprentissage en menuiserie. Il a appris à travailler le bois et ça lui plaît énormément. Son maître de stage semble satisfait de lui, mais on ne sait jamais. Si en plus , il arrive en retard, et précisément ce jour-là, ça va être sa fête. C’est clair comme deux et deux font quatre. Et c’est sûr qu’il n’y aura pas deux poids et deux mesures rien que pour lui. Il doit faire ses preuves et montrer qu’il veut s’en sortir.
Le voilà sur le palier du centre, clopinant pour rentrer son pied en toute hâte dans sa basket. Bon, aujourd’hui, il ne sera pas tiré à quatre épingles, mais tout vaut mieux qu’être en retard. Il court dans la rue. C’est le moment de montrer ce qu’il a dans le ventre. Comme un dératé, il grignote les trois kilomètres qui le séparent de l’atelier. Il arrive essoufflé, mais à l’heure, juste à l’heure. Enfin, c’était moins une ! Le patron est déjà arrivé, mais pas l’agent de probation. Ouf !
— Salut, Patron !
— Salut, Tony ! Qu’est-ce qui t’arrive ? T’as une drôle de tête ce matin ! T’as fait les quatre cents coups hier soir ?
— Non, ça va ! J’ai juste fait un peu de jogging, alors je récupère mon souffle.
— C’est bien, mon gars, de faire du sport ! Tu sais que c’est aujourd’hui qu’on a de la visite, alors il faut te mettre au boulot dare-dare pour montrer ce que tu as dans le ventre !
— Reçu cinq sur cinq, patron !
Il se change en cinq sept et se concentre sur sa planche de merisier qu’il doit finir de raboter avant de lui insérer tenons et mortaises qui solidifieront efficacement le futur dressing de Madame Javert.
A peine a-t-il commencé que le dit agent probateur se présente à l’entrée de l’atelier. Il se dirige vers le patron, sans omettre de saluer Tony et de lui glisser :
— Bonjour, Tony ! Je discute d’abord avec ton patron et ensuite on se parlera entre quatre z’yeux tous les deux. J’espère que tu n’as pas fait le con depuis ma dernière visite !
De Joëlle
Il s’avança, pas peu fier de son nouveau look. Boule à zéro, lui, qui, à quarante ans était qualifié de soixante-huitard attardé par ses amis. On ne pourrait plus lui reprocher son look « négligé », on ne pourrait plus lui reprocher de ne pas faire d’efforts. Envolées les longues boucles châtain, plus de chignon, plus de queue de cheval. Le crâne lisse, nouvel aspect, changement radical. Il trouvait que ça ne lui allait pas si mal.
Il accéléra le pas. Il était moins une. Il attrapa au vol le bus. Ce dernier était presque vide. Il s’assit vers le fond, côté ombre. Pendant le quart d’heure que durait le trajet, il repensa à sa métamorphose. En deux mots, cela avait commencé lundi dernier quand il était tombé sur la petite annonce. Le job proposé était exactement ce que recherchait Luc. Il avait beau être rationnel, il fut troublé devant les mots écrits. Un coup de téléphone fut suivi d’un rendez-vous pour un entretien fixé au vendredi. Il savait qu’il lui fallait mettre toutes les chances de son côté. Il le voulait ce poste et s’il devait passer par un changement de look, il était prêt. Il se doutait bien que son stylet actuel ne jouerait pas en sa faveur alors, oui, Luc décida de passer outre ses principes et tant pis si son moi extérieur devait un peu faire grincer son moi intérieur, l’enjeu en valait le coup.
Il se décida le mercredi et opta pour le coiffeur plutôt que pour le fait maison. Son crâne se révéla bien plus blanc que son visage buriné par le plein air dont il raffolait. Le coiffeur lui assura que d’ici le vendredi, le début de la pousse des cheveux colorerait le crâne, ce qui s’avéra exact. C’est aux premiers mouvements de tête auquel évidemment ne répondirent pas ses cheveux qu’il réalisa que le changement était plus qu’un changement d’apparence.
Son costume trois pièces, encore une nouveauté, allait bien avec ce crâne rasé. Un nouvel homme, quoi !
Luc sourit à son reflet dans la vitre. Il remarqua le coup d’œil de la femme qui venait de monter dans le bus et le jugea appréciateur. Cela ne pouvait pas faire de mal à son ego quand même un peu déboussolé par ces transformations.
Arrivé à sa station, Luc sortit, marcha une centaine de mètres puis prit l’escalier et descendit les marches quatre à quatre mais là encore, sa nouvelle apparence eut des conséquences sur sa démarche. Loin de se jeter sur les marches tel un marathonien, il prit l’allure rapide d’un homme d’affaires qui sait que si le temps est précieux, le « paraître » l’est aussi. Son esprit, tel les cinq doigts de la main était uni à son nouveau look comme quoi, parfois, « l’habit fait le moine ».
Le mur adjacent à l’entrée de la petite entreprise était orné d’une peinture du jeu qui avait rendu célèbre l’entreprise : « Le six qui prend ». La porte donnait sur un vaste hall, décoré de tableaux colorés qui participaient à l’harmonie du lieu dans lequel Luc se sentit tout de suite à l’aise.
« Ne pas oublier de tourner sept fois sa langue dans sa bouche, » se répéta-t-il lui le bavard, le spontané.
Le recruteur le reçut rapidement et il fut directement conclu que Luc commencerait son nouveau job vendredi en huit. Il lui fit alors visiter les locaux et lui présenta ses nouveaux collaborateurs. Il fut d’emblée bien accueilli et ne put s’empêcher de sourire devant le dilemme qui s’annonçait. Neuf sur dix de ses collègues arboraient jean et baskets et l’un d’eux, cheveux longs en queue de cheval, lui dit: « Tu sais, ici, le costume trois pièces n’est pas obligatoire… »
De Jacques
Oltre la luce
Dos vouté
il marche à petit pas
ses longs doigts comme des serres, tiennent
un cigarette éteinte
la portant pourtant à la bouche
la tirant à petite touche
il marche, il marche sur un pas de deux
villageant chaque jour
surtout le matin dès dix heures
Mil et un « paraît-il »
parlent de lui en six-huit:
il pourrait voler, mais ne le veut pas
la tête enfumée
hors des données mathématiques
par les cris de PI
la main et le couteau
une lame de fond
elle se saignait aux quatre veines
pour lui, pour eux
pourtant, pourtant
fauteuil assise
lui, le fils derrière, face à la télé
tire la vie, sa vie, l’autre puis la sienne
malgré lui, ils se mirent à voler
pour ne faire qu’un
la folie du moment, un moment de folie
encore sous le choc, il grimpe l’escalier
deux par deux, pressé de se coucher
le matin, il y en a eu un
l’hiver encore, malade de la veille
il s’engouffre sous la douche
en moins de deux
enfin, peu importe, qui s’en préoccupe
les voix se sont calmées
elles ont eu le premier sang
par-delà la lumière
De Dominique
Six pieds sous terre.
Ilan, mon petit-fils de neuf ans, est très curieux de nature. Il observe une de mes photos en militaire.
— Dis papy, tu as fait la guerre toi ?
— Ben non mon gars, je n’ai pas vécu une telle horreur, fort heureusement.
— C’est quoi la photo de toi en soldat, posée sur la commode ?
— Ah oui cette photo… C’est parce qu’autrefois, les jeunes se devaient de donner un an de leur vie à la défense de la patrie. C’était le temps du service militaire obligatoire.
Ilan, intrigué par cette déclaration s’interroge…
— C’était quoi le service militaire ?
— Les jeunes de mon époque passaient le conseil de révision puis, si nous étions déclarés aptes, nous recevions une feuille de route. J’ai reçu la mienne pour partir en Bretagne servir la France dans l’infanterie de marine. C’était un grand dépaysement pour moi car je n’avais jamais voyagé. En deux temps trois mouvements, tous les gars de ma “classe” se sont retrouvés chez le coiffeur du régiment pour une coupe réglementaire… C’est-à-dire la “boule à zéro” ou presque. Quelle cruelle désillusion pour notre génération de cheveux longs qui marquait ainsi sa différence pour contrarier nos parents que nous traitions de vieux “ringards”. Nous en avions marre du modèle social tiré à quatre épingles en costume cravate. Ici, chez les militaires, nos principes de contestation n’ont fait ni une ni deux et nous nous sommes retrouvés dans la même tenue et avec la même coupe de cheveux.
— Tu as tiré en vrai avec ton fusil ?
— Nous n’avions pas le choix, ça faisait partie de l’instruction militaire obligatoire. Au début, j’avais deux mains gauches et neuf fois sur dix je ratais la cible. Mon sergent se fichait de moi —‘J’espère ne pas aller à la guerre avec toi, me disait-il ! Continues de tirer aussi mal et tu vas vite te retrouver six pieds sous terre.’
— Ça veut dire quoi “six pieds sous terre” papy ?
— Ça veut dire qu’on est mort mon bonhomme…
Je n’ai pas perçu immédiatement le trouble envahir mon petit-fils et j’ai continué mon récit heureux d’avoir un auditoire attentif.
— Par une nuit noire, toute ma section est partie en forêt pour tendre une embuscade au groupe qui nous suivait. Quand nous sommes arrivés à la clairière bien dégagée qui était notre objectif de planque, le sergent s’est mis à nous haranguer ; vous me recevez tous cinq sur cinq… OK, on va se mettre en position d’attaque… À peine avait-il terminé sa phrase que nous nous sommes retrouvés sous le feu de la section que nous devions piéger, elle nous avait devancés et nous arrosait de tirs nourris ; pistolet-mitrailleur, grenades, fusils. Un vacarme assourdissant envahit la forêt, tous les gars de la section étaient en panique, ils détalaient comme des lapins. De mon côté, j’avais le trouillomètre à zéro et je n’en menais pas large…
— Tu as failli te retrouver six pieds sous terre ?
— Rassure-toi mon bonhomme, tout ça n’était qu’un exercice et les munitions étaient à “blanc”, sans danger pour les hommes.
— Papy, je ne veux pas que tu ailles six pieds sous terre…
Ému, je pris mon petit gars dans les bras pour lui faire un gros, un très gros câlin.
De Marie-Josée
Le monde de Dorius
L’eau envahissait peu à peu le fossé qui entourait le château de sable que Clément avait construit.
—Maman, regarde, maintenant c’est un vrai château fort, s’écria-t-il, lorsque une vague vint le renverser.
Une deuxième le submergea, une troisième l’emporta un peu plus loin du bord et le sable se déroba. La lumière diminua progressivement, les sons s’atténuaient et il se trouva plongé dans un monde sombre et silencieux. Instinctivement, il gesticula, ses bras et ses pieds remuaient l’eau mais il fut vite épuisé. Voyant sa détresse, un petit animal qu’il ne connaissait pas s’approcha de lui :
—N’aie pas peur, dit-il, tu es le bienvenu dans mon univers, je te ferai découvrir toutes les merveilles dont il recèle mais pour cela il faut que tu connaisses quelques règles élémentaires :
Premièrement : arrête de gigoter.
Deuxièmement : utilise tes bras comme des rames pour te diriger et tes pieds comme des palmes pour avancer.
Troisièmement : ouvre grand tes yeux, ils s’habitueront vite à la pénombre.
Quatrièmement : suis-moi impérativement et ne t’arrêtes pas de ton propre chef.
Reçu cinq sur cinq ?
—Oui, je crois, bredouilla-t-il. Mais qui es-tu, tu es un drôle de poisson.
—Pardon, tu as raison, j’ai oublié de me présenter. Je m’appelle Dorius et je suis le roi des hippocampes, je suis le seul à avoir la nageoire et la colonne vertébrale dorée.
—Moi je connais seulement les hippopotames, j’en ai vu au zoo et ils sont drôlement impressionnants.
—Ah bon ! Je n’en ai jamais entendu parler. On m’appelle aussi le cheval des océans si tu préfères.
—Oui, ça me va mieux. C’est vrai que tu ressembles à un cheval , dommage que tu sois tellement petit, si tu étais un vrai cheval, je pourrais monter sur ton dos et en deux temps trois mouvements nous serions à l’autre bout de l’océan.
—Ah ces humains ! Vite, toujours plus vite, toujours plus loin et neuf fois sur dix, ils passent à côté de l’essentiel. Mais assez parlé, j’ai un petit creux, pour le combler, quelques crustacés feront l’affaire .Suis-moi.
—Des crustacés, berk, répondit Clément, je n’ai pas faim, à moins que tu saches où on peut trouver des petits pains au chocolat.
—N’importe quoi ! Je peux te trouver des huitres mais il faudra te passer de citron, par contre, si tu es végétarien, tu n’auras que l’embarras du choix, il y a des algues à profusion.
Clément fit la moue mais s’empressa de suivre Dorius qui se dirigea vers un ensemble de rochers. Il picora le long des parois rugueuses et invita Clément à goûter à ces herbes qui ondulaient autour d’eux. Les brunes ne lui inspiraient guère confiance, il se laissa tenter par les rouges mais ne fut pas convaincu quant aux vertes. Il les testera un peu plus tard, pour l’instant il n’y avait pas urgence.
Dorius changea subitement de couleur, s’accrocha aux herbes marines et ordonna à Clément de se cacher derrière le rocher. Il s’exécuta sans comprendre .Il se rendit seulement compte de la menace lorsque des gros poissons s’approchaient d’eux mais à son grand soulagement, ils poursuivirent leur trajectoire sans les voir. Une fois le danger écarté, Dorius reprit ses belles couleurs et ils traversèrent des récifs de corail pour aboutir dans une prairie.
Clément n’en croyait pas ses yeux, un bateau était posé là, prêt à partir comme s’il n’attendait que le capitaine pour lever l’ancre. Il accéda sans difficulté au pont et descendit l’escalier quatre à quatre sans attendre son guide pour l’explorer. Il ouvrit une à une les portes qui donnaient sur les cabines. Tout était intact sauf que les passagers et les marins avaient disparu et avaient été remplacés par de nouveaux habitants.
Une tortue avait élu domicile sur un lit et n’appréciait guère la visite de cet intrus, sans parler des petits poissons effarouchés qui se planquèrent derrière le mobilier. Seuls, les crabes n’étaient pas impressionnés et continuaient leur marche sur le plancher. Il atteignit enfin la salle à manger, les tables étaient encore dressées, seuls des verres renversés et de la vaisselle cassée témoignaient du naufrage.
—Alors, que penses-tu de mon monde ? lui demanda Dorius.
—Fantastique, répondit Clément, dommage que ce ne soit pas un bateau de pirates. J’aurais tellement aimé trouver un trésor.
—Des bateaux, il y en a plein ici. C’est comment un bateau de pirates ? Un voilier, une galère, un catamaran, un navire ? lui demanda-t-il.
—Un voilier avec un drapeau noir avec une tête de mort accroché au mat.
—Pas de problème, je sais où il y en a un.
Ils quittèrent le navire et Dorius le conduisit à un voilier dont les mats gisaient au sol, la coque éventrée, des gobelets, des bouteilles répandus sur le sable. L’accès était plus difficile. Il se glissa à travers une brèche et accéda à ce qui semblait être la cale. Il y avait des caisses remplies de bouteilles de rhum, des vides où séjournaient des éponges, des araignées et des étoiles de mers. Il fouilla partout et constata avec regret :
—Hélas, pas de trésor ici non plus, dit-il à Dorius, quand il vit celui-ci changer en un clin d’œil de couleur et se blottir contre le bois de la coque.
Maintenant il savait que cela signifiait ‘danger’. Il repéra au-dessus de sa tête un dauphin qui évoluait majestueusement.
—N’aie pas peur Dorius, c’est un dauphin, il ne nous fera pas de mal, s’exclama-t-il.
Il recula pour mieux le voir, trébucha, tomba et cogna la tête contre l’une des caisses. Quand il ouvrit les yeux, il vit des visages penchés sur lui et entendit quelqu’un dire :
—Il était moins une.
Tout alla très vite. Il se retrouva dans une ambulance, sa maman à ses côtés qui tentait de le rassurer. Il lui demanda :
—On pourra visiter le grand aquarium demain ? Je n’ai pas eu le temps de dire au revoir à l’hippopotame des mers.
De Linda
Voilà ce que j’avais répondu à mon homme qui, pour un oubli de ma part concernant le paiement d’une facture, avait sauté une fois de plus sur l’occasion pour me jeter des paroles dévalorisantes à la figure.
—Un de ces quatre tu trouveras dans une librairie, non pas un, mais deux livres que j’aurais écrits. L’un sera un livre avec plein de conseils sur le mariage. Et l’autre traitera de la communication non violente dans le couple.
Et lui d’un ton un peu moqueur de répondre :
-Et comme jamais deux sans trois, le 3ème livre sera la superbe méthode de Linda pour organiser sa maison en deux trois mouvements. Désormais je devrais t’appeler coach Linda !
Je commençais à en avoir horreur de cet homme qui ne fait plus attention à moi et sous-estime mes capacités. J’ai ce désir profond d’écrire des livres, je ne sais pas d’où il me vient, mais j’ai la ferme intention de me mettre en quatre pour réaliser ce rêve. Je crois en effet que l’écriture est la meilleure façon de laisser une trace sur Terre. Je n’ai pas l’intention de le faire à la six quatre deux, je vais prendre mon temps, me documenter sur les sujets que je souhaite aborder dans mes livres, participer à des coachings d’écriture, pour développer ce muscle. Oui, l’écriture est un muscle qu’il faut sans cesse entraîner. Pour l’instant, j’écris dans mon journal intime, mais un jour je prendrais mon courage à deux mains et je commencerais ce livre. Ce livre, je veux l’écrire pour mes Filles, je voudrais qu’elles abordent le mariage avec une vision lucide plutôt qu’idéaliste. Je voudrais qu’elles reçoivent cinq sur cinq que le bonheur se construit en allant explorer les profondeurs de son identité et en pratiquant l’amour de soi.
De Laurence D
Il était moins une que l’on ne repêche la voiture dans le canal ! C’est encore une fois une idée géniale de ton père. J’aurai deux mots à lui dire lorsqu’il rentrera du travail. Tu l’as encore supplié pour emprunter sa 207 et regarde comment s’est finie ton escapade de cette nuit. Tu t’es endormie au volant et heureusement que cette barrière providentielle se trouvait sur ton chemin… Je n’ose imaginer la suite sans elle.
Si ton père n’avait pas fait encore tes quatre volontés, rien de tout ceci ne serait arrivé. J’ai eu beau freiné des quatre fers, ça n’a pas suffi.
Et puis tu étais bien trop fatiguée pour sortir. Tu avais travaillé sept jours sur sept cette semaine. Tu aurais mieux fait d’aller te coucher et rattraper ton sommeil en retard.
Mais non ! Tu es montée quatre à quatre l’escalier qui mène à ta chambre pour te doucher, te mettre sur ton trente-et-un et filer ensuite retrouver ton amie Juliette. Décidément, toutes les deux, vous faites la paire, question tête de linottes et à faire les fofolles comme deux gamines de quinze ans que vous n’êtes plus !
Maintenant, tu as le moral à zéro. Tu crains la colère de ton père, à juste titre d’ailleurs. Il va encore te parler entre quatre z’yeux, te faire la leçon etc…etc…Et toi, tu lui répondras comme d’habitude que tu as compris, que tu as reçu son message cinq sur cinq.
Ah ! Charlotte ! C’est ton deuxième accident cette année et tu connais le proverbe qui dit « Jamais deux sans trois » !
Une mère aux quatre cents coups.
Poème de Julie Lombe, proposé par Françoise T (hors proposition d’écriture)
J’ai aimé ses mots avant de connaître son nom
J’ai aimé son âme avant de goûter sa peau
Nous voyageons sur des territoires inconnus
Route de l’inconscient, paysages de corps nus
Le dialogue blanc comme seule boussole
Quand mon cœur perd le Nord, ses bras seuls me consolent
Et les râles de plaisir plantent leur drapeau
Au sommet des cols d’amour que nous enchaînons.
Pour celles et ceux qui résident en France, j’espère que vous vous protégez bien de la canicule et de cette chaleur. C’est ça qui m’a retardée dans l’envoi des textes.
Chez moi, je suis au frais, ce n’est pas le problème.
Hier soir, au lieu de préparer la newsletter, j’ai squatté la piscine de mon fils aîné.
Cela m’a bien rafraîchie, certes, mais a fait fondre ensuite mes ardeur de travail.
Je vous souhaite une belle semaine créative et vous donne rendez-vous pour la dernière proposition d’écriture de la saison la semaine prochaine.
Portez-vous bien et prenez soin de vous.
Créativement vôtre,
Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE
