La proposition d’écriture N° 134 autour des bonnes actions vous a inspiré et je vous remercie pour vos textes ou réflexions touchants.

La bonne action fait partie de nous, de l’espèce humaine, il me semble. Alors, pourquoi peut-on observer tant de haine et d’agressivité parfois sur les réseaux sociaux? 

Je ne suis pas une aventurière, je ne cours pas le monde, mais ma bonne action la plus récente a été d’accompagner mes parents âgés à Lourdes, car ils ne peuvent plus conduire sur de longues distances. 

Sans parler des animaux abandonnés que j’ai recueillis, des heures que je donne parfois ans compter pour prodiguer des conseils de toutes sortes à mes élèves lycéens depuis presque 40 ans.

Pour moi, les bonnes actions au quotidien sont de protéger le plus possible la planète, trier ses déchets, cesser de s’acheter sans cesse de nouveaux vêtements, économiser l’eau et l’électricité, vivre simplement et aider mes enfants et mes parents. 

Ma bonne action, c’est aussi de vous faire profiter de mon blog et de l’atelier d’écriture gratuitement depuis 4 ans, parce que le savoir et la culture  devraient être accessibles sans rien débourser.

Je laisse les grands exploits aux autres. Je préfère la simplicité et l’anonymat de mes bonnes actions, qui font de moi une femme de coeur. Du moins, j’ose l’espérer.

Voici vos textes. Je vous en souhaite une belle lecture.

De Patricia

Les bonnes actions de ma vie…

Au cours d’un atelier d’écriture, j’ai reçu la consigne de « raconter les bonnes actions que j’ai réalisées dans ma vie ».
Encore faut-il se les rappeler, me direz-vous !
Mais, je pense que le chagrin s’estompe plus vite que la joie — vive l’inconstance de l’être humain ! — et que les mauvaises actions nous laissent moins de souvenirs que les bonnes. Alléluia !
Peu importe que vous soyez d’accord ou non avec ce que j’avance ci-dessus. Les faits sont là !
J’ai accouché — comme de nombreuses femmes — et j’ai souffert de ces enfantements. Mais lorsqu’on a mis sur mon ventre ces petits êtres joufflus et larmoyants, j’ai totalement et définitivement oublié ma douleur et encore aujourd’hui, je ne saurais plus dire à quoi elle ressemblait !

Enfin, revenons à nos moutons, ou plutôt à « mes bonnes actions ».

Ma vie se doit d’être une bonne action. Je ne me vante pas, je ne suis pas imbue, je dis juste que tout mon être n’est heureux que lorsqu’il se dévoue aux autres.
Quand j’ai rencontré mon mari, j’ai abandonné mes projets de transhumance vers le climat ensoleillé du sud de la France et j’ai raccourci de moitié la longueur de mes études — non pas de mes cheveux ! — pour vivre à ses côtés.
Quand mes parents ont vieilli, j’ai irrémédiablement enfoui au fond de mon esprit mes ambitions d’exil méditerranéen pour demeurer auprès d’eux.
Quand mes enfants ont grandi, je suis restée dans le village où nous avions élu domicile et dans lequel ma petite progéniture avait désormais toutes ses habitudes, ses amis, sa vie quoi ! « Maman, nous, on ne veut pas déménager. »
Quand j’ai évolué dans ma carrière professionnelle, mon objectif principal était de gagner plus d’argent pour offrir à ma famille une existence merveilleuse et emmener mon mari et mes enfants en voyage.
Quand j’ai décidé de me consacrer à ma passion — l’écriture, vous vous en doutez — je ne suis pas demeurée égoïste très longtemps puisque j’ai bien souvent œuvré bénévolement pour tous mes proches.

Mais quand je vois…
… mon mari épanoui jardiner dans la maison de nos trente ans
… mes enfants éblouis par la vue sur le grand canyon américain
… mes parents sereins de savoir leur fille à leurs côtés
… mes amis rassurés de pouvoir compter sur moi,

Alors je me dis que les bonnes actions, je les fais tous les jours.
Elles sont en chacun de mes pas, de mes gestes, de mes actes. Je suis heureuse quand mon entourage l’est. Sincèrement. Indubitablement. Je ne triche pas.

J’aime que mes proches soient surpris, étonnés, enchantés, satisfaits, paisibles, ravis, etc. Je me délecte de leur joie, je puise ma force dans leur bonheur, leur sérénité me réchauffe… dois-je continuer ?
Vous pensez que j’en fais trop, que j’exagère, mais en fait, pas besoin d’introspection. Je peux vous assurer que je ne saurais être épanouie moi-même si je n’avais pas l’opportunité quotidienne de faire plaisir aux personnes que je chéris.
Et les autres, me demanderez-vous ? Les inconnus qui gravitent autour de nous. Ceux qui ne sont ni ma famille ni mes amis ?
Il est vrai que je n’ai pas fait partie d’une ONG et que je n’ai pas milité pour la paix dans le monde. De temps en temps, j’offre quelques monnaies à un SDF, des boites de conserve pour « Les Restaurants du cœur », je suis bénévole dans des associations sportives et environnementales, j’adopte des chiens et des chats, je donne de mon temps et de mon énergie pour quelques bienveillantes causes… Et, depuis plus de trente ans, je trie mes déchets, j’utilise des produits « écolos » et nourris ma famille de « bio ».
Mais est-ce qu’aimer son prochain et ne lui souhaiter que du bien n’est pas déjà une bonne action en soi ?
Si oui, alors j’affirme et je confirme que je fais une bonne action tous les jours !
Et vous ?


De Dany

Août, en plein milieu de l’été, les voisins au seul jardin de la maison, déménagent.
Ils s’occupaient, depuis quelques courtes années, de 2 chats, devenus 3 chats errants qui logeaient jour et nuit, sur leur partie terrasse. Deux mâles et une femelle qui fut stérilisée.

-Pouvez-vous continuer à les nourrir ?
-Bien sûr, cela ne pose aucun problème, dis-je avec enthousiasme et naïveté.

Un lieu abrité de la pluie fut choisi pour nourrir les 3 félins agiles mais méfiants de toute approche, très méfiants. L’eau accompagnait le changement de gamelles, deux fois par jour.
Il faisait beau et les jardins voisins les accueillaient dans leurs périples quotidiens.
Septembre : la fraîcheur arrive. Prévoir d’autres caisses, des planchers isolés du sol, les mettre à l’abri des intempéries, sans déranger les locataires des autres appartements ni celui dont la terrasse du jardin n’est plus accessible.
Trois années s’écoulent au rythme des saisons et des repas garantis matin et soir. J’y pourvoie y compris lors de mes vacances pendant lesquels des amis sont de corvée.
Avec obligation, de me donner des nouvelles, par téléphone portable.
Et puis, premiers problèmes. Le plus jeune respire très mal. Lui, le Gourmand, ne mange plus.
Un vétérinaire vient littéralement le capturer, pour établir un verdict. Terrible celui-ci : le cœur ne fonctionne plus bien du tout. La décision est prise et Jordan s’endort pour ne plus souffrir.
Et je pleure à chaudes larmes…
Ce n’était pas qu’un chat errant!

Trois mois plus tard, un matin, le mâle qui ne ratait jamais un repas n’est pas là. Il était le plus téméraire qui traversait aussi la route. Je ne l’ai jamais revu.
Un Gamin, soucieux de ses copains, s’en est allé. Je l’entendais encore miauler, d’une façon particulière et unique, lorsque les repas étaient posés et que les deux autres ne m’avaient pas entendue!
Ce n’était pas qu’un chat errant !
La femelle resta seule et entre ses promenades et ses siestes dans les jardins, en toute liberté, elle apprit à s’entendre avec Garfield, un chat voisin.
Plats préférés de la demoiselle : steak, haché pur bœuf, mousse de saumon et sauces de barquettes. Oui, la sauce mais les bouchées alors, à la cuillère. C’est fatigant de pencher la tête pour manger et vider son assiette! Croquettes au saumon quand la voiture rentre au garage. S’assied parfois sur ce grand coffre à croquettes muni de roues et d’un volant! Friandises le matin aussi et coussins chauffants, l’hiver sous la couverture.
Eau propre tous les jours et des endroits pour choisir où dormir (caisse de bois, 2 caisses carton, couffin de poupée chaque lieu avec plaid et “chiffon” sur pull plié pour que ce soit plus doux). Je n’ai rien enlevé au décès des autres.
Elle profite un maximum de sa liberté …sans aller vers la rue nettement plus bruyante avec des voitures et des chiens énormes (= plus grands qu’elle) et qui miaulent bizarre, très bizarre et qui tirent sur une grosse ficelle qui les retient. Ouf, pas de ça pour elle qui fait ce qu’elle veut quand elle veut. Na !
Un jour, dans l’allée alors que la tête en l’air, j’observais l’état des barreaux des terrasses, elle s’est frottée contre mes jambes. Pour y déposer ses phéromones, diront les savants.
Moi, je sais que ce jour-là, elle m’a adoptée, avec certitude.
Nous avons fait un chemin de neuf ans et demi ensemble dont quelques années aussi, pour elle, à l’abri du froid extérieur.
Elle s’appelait Fifille.
Ce n’était pas qu’un chat errant!


De Gérard

Au feu !
Une lumière rougeoyante, une forte odeur de brûlé réveillèrent mon quartier bien avant le déclenchement de la sirène : la maison de notre voisine était en flammes.
Au sein du brasier se propageant à grande vitesse se trouvaient une mère célibataire et sa petite fille de quatre ans.
Les résidents angoissaient, rassemblés devant l’incendie, guettant l’arrivée rapide des sapeurs-pompiers.
Las, la caserne était à l’autre bout de la ville, nous étions en pleine nuit.
Chacun regardait l’autre, l’interrogeant du regard, certains priaient, rien ne se passait.

J’avais 17 ans.
J’ai regardé les spectateurs impuissants, fascinés et terrorisés à la fois, mis une couverture autour de moi, je me suis aspergé d’eau avec la dérisoire lance d’arrosage de notre jardin, puis j’ai foncé droit vers la porte de notre voisine.
Ma mère pleurait.
La jeune femme ouvrit sa fenêtre à l’étage, elle hurlait, les spectateurs aussi.
Je suis entré, l’appel d’air ainsi créé a ravivé les flammes, mais je n’en avais cure.
Je connaissais la maison, j’ai foncé vers l’escalier, grimpé les marches quatre à quatre, perçant le rideau de fumée.
Arrivé dans la chambre, j’arrachais la môme des bras de sa mère tétanisée, incapable du moindre geste.
Je lui criais de descendre, de sauter par la fenêtre.
Redescendant l’escalier enfumé, la petite enveloppée dans la couverture, je me ruais à l’air libre, projetant l’enfant dans les bras de ma mère avant de m’écrouler et de m’évanouir.
Réveillé dans l’ambulance des pompiers, brûlé au premier et deuxième degré sur différentes parties du corps, j’étais dans un état second, incroyablement serein.
La petite fille était sauve, la mère avait les deux jambes brisées après son saut par la fenêtre, tout le monde me traitait de héros.
C’était la première d’une longue série d’actions charitables car, je me le promis dès cette nuit-là, j’allais donner un sens à ma vie et ne pas m’arrêter en si bon chemin.

La seconde fois, quelques années plus tard, nous étions à Montalivet, au bord du grand océan, vers huit heures du soir.
Au mois de juillet, les soirées sont longues après l’arrêt de la surveillance de la plage.
Je lézardais tranquillement au soleil lorsque j’entendis des cris.
La mer descendante, les vagues fortes, trois jeunes avaient été emportés par une baïne.
J’ai couru vers un surfeur, l’enjoignant de venir avec moi muni de sa planche, nous avons nagé vers les trois enfants.
Les aider ne fut pas simple car ils s’épuisaient, se battant contre le courant, se vidant de leurs forces. Heureusement, nous réussîmes à les calmer en les accrochant à la planche.
Nous nous sommes laissé dériver tous ensemble, les vagues nous ramenant épuisés et saufs sur la rive, plusieurs centaines de mètres au Sud.
Les estivants nous guettaient en faisant de grands signes. Quand nous mîmes pied sur la plage, ils nous firent une haie d’honneur en applaudissant.
Le lendemain, nous faisions la Une de Sud-Ouest.

Ces deux premières, je m’en souviens comme si c’était hier.
Par la suite, devenu pompier de métier, j’ai délivré des personnes de véhicules accidentés, accouché une femme dans sa voiture devant son mari, calmé et arrêté un forcené armé d’un fusil chargé à balles réelles, exfiltré des familles ukrainiennes sous les bombardements russes… j’en passe mais cela ne compte pas puisque c’était devenu mon métier.

Mais…
Mais il faut vous avouer la vérité…

Ce que je viens d’écrire, de vous livrer, c’est ma vie rêvée.
Dans le monde réel, je ne suis qu’un scénariste de bandes dessinées populaires.
Je vis seul, me gave de bières et de pizzas dans un deux-pièces cuisine, y invente des histoires où de super-héros bardés de super-pouvoirs sauvent la planète de méchants tous plus cruels et malfaisants les uns que les autres.

C’est pathétique.
Suis-je schizophrène ?
Sans le moindre doute.
Ai-je eu raison de vous dire la vérité ?
Probablement pas, mais en tous cas cela m’a fait beaucoup de bien.
Pour cela, amis lecteurs, merci.


NICO, alias
SUPSPIDERBATMAN


De Claudine

BELLE RENCONTRE

La cloche retentit, c’est la récréation. Tous les loupiots qui sont venus à la bibliothèque scolaire se lèvent d’un bond pour aller dans la cour. Deux classes différentes chaque matin ; de la maternelle au CM2. Tous sont là pour lire, choisir un livre, discuter de littérature.
—Pas si vite, il faut ranger avant de partir et me dire quel livre vous avez choisi.
Bon gré, mal gré, ils se plient à la règle. L’espace se vide et je voie entrer un grand.
—Bonjour lui dis-je.
La réponse est longue à venir.
—Bonjour madame.
Il ne me connait pas ; il faut dire que je suis là bien que je n’ai aucun enfant scolarisé dans l’établissement. Il me fixe et doit supputer mon âge. Mais il me regarde aussi pour me jauger et voir jusqu’où il peut aller.
—Vous n’êtes pas jeune !
—Tu veux dire que je n’ai pas l’âge des mamans des enfants de l’école.
—Ben ouais, ça fait drôle. Je m’appelle Sébastien dit-il. J’ai onze ans.
—Je pourrais effectivement être ta grand-mère.
Je ne peux si bien dire car mon petit fils a presque son âge et il se prénomme lui aussi Sébastien.
—Ben non, ma grand-mère elle fait plus vieille. Elle est toujours devant la télé. C’est une vraie vieille.
—C’est l’heure de la récréation ; tu viens chercher un livre ?
—Non, je suis puni.
—Puni ?
—Ben ouais et ils ne savent pas où me mettre. Allez demander au dirlo.
Pas la peine de me déplacer, l’instit de Sébastien arrive. Il me brosse un tableau peu flatteur de ce pré ado. Il est clair qu’il n’éprouve aucune sympathie pour cet élève.
Ce dernier sourit, comme pour le narguer. Ce qui n’arrange pas la situation.

—Quel est mon rôle dans cette punition ?
—Aucun, vous n’avez qu’à le surveiller et me dire ensuite qu’il fait bien ses devoirs.

Me voilà promue gardienne d’un « cas difficile ». Je souris moi aussi mais intérieurement. Il ne sait pas le monsieur que des « cas difficiles », j’en ai vus et revus pendant ma carrière à l’hôpital. Et d’une autre ampleur.
Cet échange, courtois vis-à-vis de moi, agressif vis-à-vis de Sébastien crée d’emblée une connivence entre le garçon et moi.
C’est ainsi, j’ai toujours défendu la veuve et l’orphelin et surtout les maltraités.
Nous prenons les quelques instants qui nous restent ensemble pour faire connaissance. Les devoirs ? ce sera pour demain.
—Je vais te tutoyer, mais toi tu devras me vouvoyer, lui dis-je.
C’est ainsi que j’ai toujours fonctionné professionnellement et dans le cas présent, nous éviterons de montrer que je prends parti d’une certaine façon. Car, il s’agit bien de cela.
Certaines institutrices qui l’on eu dans leur classe me disent qu’elles ont perçu son désarroi et aussi son potentiel qu’il s’obstine à gâcher. Il prend manifestement plaisir à jouer au dur. Il est content de sa punition, car comme il dit : « c’est tous des cons, je suis mieux ici ».
Il a des devoirs à faire, et bien il les fera, avec mon aide. Ce sera notre petit secret.
Du français, des maths, et autres matières. C’est tout bon pour moi, ça me rappelle quand mon Seb à moi vient pendant les vacances.
Le peu de temps que laisse la récréation ne permet pas d’approfondir toutes les matières ; je le convie chez moi pour l’aider un peu plus, lui fils de parents divorcés et alcooliques. Paumé, arrogant, mais un brin sympa.
Nous passons de sacrés bons moments ensemble, quand il en a envie. Car il est vrai qu’il a une bande un peu chelou. A qui il donne souvent la priorité. Pas pour le meilleur à certains moments.
Nos rencontres produisent leurs effets.
Le « dirlo » comme il dit – homme fort charmant – n’en revient pas des petits progrès de cette forte tête. Qui arrive même à se comporter avec civilité au sein de l’établissement. Une belle surprise générale, dont je ne parle pas, préférant rester en dehors de la vie scolaire.
A la fin de cette année scolaire, il est admis en sixième ; donc je ne le verrai plus pendant les temps que je consacre bénévolement à l’école.
Mais la relation ne s’arrête pas. Mon mari est d’accord pour l’accueillir.

—A condition que tu arrêtes de faire pétarader ton scooter pendant dix minutes devant la villa.
—Ouais m’sieur.

Il a droit à un matheux de première en la personne de mon mari qui s’est pris de sympathie pour lui. Le français et le reste, c’est moi. L’anglais, c’est à trois, histoire de nous remettre au gout du jour.
Cette relation va durer quatre ans. Nous verrons évoluer ce garçon, avec grand intérêt. En l’aidant au maximum lorsque les crises chez lui sont difficiles à gérer.
Oh, il ne fera pas de longues études, il veut être mécano comme son père l’était avant que l’alcool ne le laisse sur le bas-côté. Il s’intéresse désormais aux autres, sans excès, mais avec un réel intérêt.
Il aura même une petite implication dans une autre de mes actions bénévoles : en tant que responsable pour le département où je vis d’une association aidant les personnes atteintes de sclérose en plaques, j’ai, pendant plusieurs années, organisé régulièrement des actions pour récolter des fonds. Lui et ses « potes » qui n’ont rien à faire, comme il me disait, s’investissaient pour m’aider. Avec plus ou moins de rigueur, mais bon, au moins, pendant ce temps leurs parents savaient où ils étaient. Et ils étaient contents.
Quelques années plus tard, je l’ai croisé dans une ville voisine ; il était accompagné d’une charmante jeune fille. L’un et l’autre, nous avons été heureux de cette rencontre.
Le tutoiement est de rigueur. Comme deux amis de longue date, nous évoquons notre vie. En fait lui évoque la sienne.
Il me remercie de l’aide que nous lui avons apportée et surtout de la gentillesse pour l’accueil qu’il a reçu.
Il se souvient des personnes, parfois en fauteuil roulant, qu’il a croisé lors des différentes manifestations que j’organisais. Il m’explique que ça lui a permis de mieux comprendre les autres et leur malheur. Il ne savait pas que des personnes pouvaient vivre avec joie, malgré leur handicap.
Ce souvenir me touche beaucoup, car il prouve son humanité.
Il a entrepris dès ses seize ans de faire une formation pour avoir un BEP de mécanicien qu’il a obtenu avec succès. Il a muri et pense qu’il peut faire mieux et envisage de continuer des études professionnelles. Ce que je l’ai vivement encouragé à faire.
Avant de nous quitter, Stéphanie son amie me fait la bise et me dit :

—Je voudrais faire le même métier que vous.
—Il te suffit de t’investir dans tes études avec une grande rigueur et tu pourras envisager de choisir un métier qui t’intéresse.
Elle m’a demandé des informations, ce que lui ai donné avec plaisir.

De Gérard (proposition d’écriture N° 133)


Éternité
21 Mai 2022

Du plus longtemps que je me souvienne, l’athéisme est ancré en moi depuis ma petite enfance.
Élève de l’école laïque, mes parents m’avaient inscrit aux cours facultatifs de catéchisme dispensés dans l’établissement par un aumônier.
Déjà, c’était louche.
Ni mon père ni ma mère ne fréquentaient les bancs de l’église en dehors des mariages et des enterrements.
Alors pourquoi m’infliger d’assister à ces cours qui ne me plaisaient pas du tout ?
Parce que ma grand-mère le voulait, parce que « ça se faisait », parce qu’il fallait avoir sa communion en poche pour qu’ensuite on nous fiche la paix.
Je détestais le catéchisme, je n’aimais pas cette religion dont l’idole était un crucifié, qui ne parlait que de péchés, que de mort.
Cette bonne blague, pour avoir droit au paradis, il fallait être mort !
Et si on n’était pas baptisé ou bon chrétien, hop, on disparaissait dans les limbes, condamné à errer sans fin.
J’avais 8 ou 9 ans, mais avais déjà compris que ce « Bon Dieu » ne l’était pas, bon, car les enfants non baptisés d’Afrique ou d’Asie, par exemple, tous ceux qui n’avaient pas eu la chance d’être évangélisés, pourquoi n’avaient-ils pas droit au paradis ?
Ils n’y étaient pour rien, c’était trop injuste.
Bref, je me posais beaucoup trop de questions, m’interrogeais sur les nombreuses incohérences, et attendais avec impatience le moment où je serais enfin débarrassé de la messe et de ces corvées de catéchisme.
Les prêtres avaient raté leur coup : voulant m’évangéliser, ils m’avaient conduit à l’athéisme qui m’accompagna durant toute mon existence terrestre.
Alors autant vous dire que quand je suis enfin mort de ma belle mort, je n’attendais rien d’autre que la lumière s’éteigne pour toujours.
Mais, surprise, si mon corps ne bougeait plus, mon esprit cavalait toujours !
Interloqué, je me demandais bien ce qui allait se passer, à quel moment tomberait la nuit éternelle…
J’attendis longtemps.
Jusqu’à ce qu’apparaissent devant moi deux anges qui me demandèrent fort aimablement de les suivre et me conduisirent en volant jusqu’à une grande porte devant laquelle je lus : « Paradis – Entrée réservée aux heureux élus ».
À droite se situait une pièce intitulée « Salle d’attente », dans laquelle on me pria de m’installer.
Heureusement, je ne prenais pas grand-place car nous étions très nombreux à y voleter en attendant la suite.
Au bout d’un temps qui me parut interminable, l’archange Michel apparut et nous expliqua les règles : nous allions devoir faire notre « examen de conscience », avec précision et honnêteté, aucune tricherie n’étant désormais possible, puis nous serions convoqués par Saint Pierre, qui statuerait sur notre sort.
J’entamais derechef ledit examen, espérant bien être convaincant en plaidant ma cause.
Saint Pierre me reçut quelque temps après, l’archange se tenant à sa droite, porteur d’une magnifique balance.

Jean Baptiste, nous allons peser ton âme, ou plutôt tes actions terrestres. Si le bien l’emporte sur le mal, tu entreras au paradis.
Merci Seigneur, euh merci Saint Pierre.
Ça commence mal !
Veuillez me pardonner, éminence, c’est le trac, vous comprenez, j’espère.
Passons. Alors, qu’a donné ton examen de conscience ?
Un bilan très positif, Grand Saint Pierre, certes je reconnais ne pas avoir beaucoup fréquenté les bancs de l’église.
Ça, nous le savons très bien.
Bien sûr, mais cela ne m’a pas empêché de respecter mon prochain, de ne pas lui faire ce que je n’aurais pas voulu qu’il me fasse à moi-même, et je déclare m’être fort bien comporté vis-à-vis de mes semblables, enfin de ceux de l’époque.
Es-tu bien sûr de ce que tu dis ?
Oui, enfin, il me semble.
Regarde donc cette petite vidéo !

À ce moment, Saint Pierre fit apparaître un grand écran virtuel dans lequel défilèrent dans un ordre chronologique tous les petits larcins, tous les mensonges, toutes les petites bassesses de mon existence, commises à tout âge, mes colères, mes péchés d’orgueil, d’avarice, de luxure, d’envie, de gourmandise, de paresse… il ne manquait rien à l’appel.
Le visionnage était interminable, je m’en inquiétais auprès du Saint :

Grand Saint-Pierre, ne pouvez-vous pas passer ces images en accéléré ?
J’ai tout mon temps…
Oui, enfin, bon, on a compris, mais j’ai aussi fait plein de belles et bonnes choses pendant ma vie terrestre.
Nous allons en tenir compte, nous pouvons les visionner ensemble maintenant, si tu veux.

Et, passant de la parole aux actes, étendant les mains, Saint Pierre fit apparaître mes « bonnes actions ». Il n’y en avait guère.

Grand Saint Pierre, on peut passer au ralenti, en arrêt sur image s’il vous plait, tenez, regardez là comme je me suis bien comporté…
Il suffit ! Archange Michel, il est temps de procéder à la pesée ! Qu’on mette les actions de Jean-Baptiste des deux côtés de la balance et que justice divine soit faite !

Et l’archange pesa, la balance penchant immédiatement et irrémédiablement à gauche, du côté obscur de la force.

Grand Saint Pierre, attendez, c’est injuste, je demande un avocat.
La justice divine est immanente, tu le sais bien.
Mes mauvaises actions n’étaient que des broutilles, je n’ai ni volé, ni violenté ni tué personne, que diable !
Que dis-tu ?
Oh pardon ! Je voulais juste dire que je n’ai rien fait de grave.
Oui, mais la quantité est là, cela suffit.
C’est une parodie de justice !
Tu savais dès ta petite enfance que l’injustice faisait partie de nos règles et principes.
Aurai-je droit au purgatoire quand même ???
Au quoi ?
Au purgatoire, pour me racheter le temps qu’il faudra.
Ce lieu et ce concept n’existent pas. Ce sont vous, les hommes, qui l’avez inventé durant le haut moyen-âge.
Alors, je vais en enfer ???
Ni l’enfer ni Satan n’existent non plus, seul existe notre Dieu tout-puissant et c’est bien suffisant
Mais alors, où vais-je aller ?
Comme tous les autres, tu erreras dans les limbes.
Combien de temps ?
Mais pour l’éternité, ne désirais-tu pas la vie éternelle ?
Est-ce à dire qu’aucun être humain ne peut entrer dans votre paradis ?
À ce jour, aucun n’a réussi. Vous êtes trop imparfaits, vous seriez capables de polluer notre paradis comme vous avez détruit le vôtre.
Même les papes ?
Allons ! Ce sont des hommes comme les autres !
C’est vous qui nous avez créé imparfaits et faibles. Vous êtes cyniques, horribles.
S’il te plait, garde ton ressentiment. Au revoir, Jean-Baptiste, je ne te dis pas Adieu…
Vendu, traître, Judaaaaas !!!….

Saint Pierre et l’archange Michel disparurent aussitôt, m’abandonnant à mon triste sort.
Depuis, sans fin, j’erre et je médite.
J’ai fini par comprendre ce que voulait dire Jean d’ORMESSON quand il s’était écrié à la télévision :
« La mort, vous croyez que c’est agréable ? C’est une malédiction. Mais ce qu’il y aurait de pire ? Ce serait de ne pas mourir ».


De Gisèle

Anne-Fleur était une enfant timide et très attachante. Elevée dans un milieu catholique auprès d’une mère très pratiquante qui ne s’autorisait aucun pas de côté, elle sut néanmoins, très jeune, se détacher de ce carcan dogmatique. En effet, très indépendante de caractère, elle rejoignait plutôt son père profondément laïc et proche des libres penseurs. D’un côté comme de l’autre, elle avait bien intégré l’importance des valeurs comme le RESPECT, l’AMOUR de son prochain et la CHARITE au sens noble du terme.
Toute sa vie, elle chercha à rendre service et à aider les autres. Sa mère, trop tôt décédée, lui avait insuffler son vœu le plus cher « Exercer le métier d’assistante sociale », ce qu’elle n’avait pas pu devenir. La jeune fille ne se posa pas de questions et, comme une évidence, elle allait obéir et faire plaisir à sa maman disparue, à titre posthume.
C’est ainsi qu’elle endossa la lourde tâche d’accompagner ses proches dans leurs démarches, dans leur parcours de santé, au lieu de vivre son adolescence avec l’insouciance qui va de pair.
Avant d’en faire son métier, maturée aux épreuves de la vie, elle ne manquait pas une occasion de rendre service et d’épauler ses camarades. C’est ainsi qu’à la demande d’une amie, victime d’un viol, et soignée en centre psychiatrique, elle accepta d’aller la voir régulièrement et de la soutenir moralement, alors qu’elle-même devait affronter les affres de la disparition de sa mère.
Néanmoins, sur le moment, cela ne lui pesait pas. Cela la rendait importante aux yeux des autres. Courageuse, elle s’épanouissait en donnant du sens à sa vie et ne rejetait aucune responsabilité, bien au contraire. Cela l’aidait à vivre et sa joie était là, ainsi que son sourire qui illuminait son environnement. Elle existait pour elle-même, pour sa mère et pour les autres, ce qui la faisait sentir terriblement vivante, voilà tout.

De Pascale (proposition d’écriture N° 133)


Prendre la plume pour t’écrire
Tenter de te parler, oser te dire
A l’heure de me reconstruire
Quel défi à accueillir !

Toi, objet de ma colère
Habitée de cette douleur délétère
Je t’ai affronté adversaire
Qui m’a anéantie, mise à terre.

Il m’a fallu parcourir du chemin
Et risquer tant d’après-demain
Pour pouvoir entrevoir enfin
Que jamais tu n’as lâché ma main.

Mais pour arriver à bon port
Il t’a fallu frapper encore
De nouveau, sans plus de remord
Tu as bouleversé le décor!

Mais cette fois pas de colère
Comme dans un souffle la lumière
Ouvre mon cœur à l’Univers,
M’invite à de nouveaux repères.

Je pense avoir entendu ton message
Ici nous sommes de passage
La vie sur terre est un voyage
Vers d’innombrables paysages

A moi d’en faire le coloriage…


De Françoise V


Thibaut est en classe de 3e au collège de son quartier. Très bon élève, assidu et empathique, il répond à la proposition d’un encadrement scolaire pour ses camarades. Samuel est choisi d’abord, puis ce sera le tour d’un autre camarade le trimestre suivant. Quatre tuteurs sont mis en place, les quatre meilleurs de la classe.
L’élève de Thibaut est en difficulté mathématique. Thibaut n’hésite pas à proposer ses services les mercredis après-midi ou pendant les heures d’études.
Samuel va pouvoir avancer dans ses exercices incompréhensibles et préparer avec plus de facilité et de souplesse son année du cycle 4.
A chaque cours de maths, Thibaut réunit les sujets et les formules d’algèbre sur un cahier. Il organise son cours particulier pour Samuel, et l’entraîne avec ses « propres expressions de collégien » dans un dialogue libre, souple et sympathique. Il cherche à transmettre ses compétences par des méthodes mnémotechniques et logiques.
Thibaut a confiance en lui-même. Il a cette qualité de pédagogue dont bénéficient peu de jeunes garçons. Tout d’abord, il questionne Samuel pour connaître ses motivations et son engouement à comprendre cette matière et à la maîtriser. Il s’intéresse à ses projets, ses souhaits d’études ou de métier. Depuis fort longtemps, Thibaut aime aider ses camarades. Durant son année en CM2, dans son village, il avait été volontaire pour aider Juliette à faire ses devoirs. L’instituteur lui avait donné cette responsabilité car il avait déjà compris combien cet élève brillant pouvait faire avancer une classe dans l’excellence.
Thibaut pourrait montrer de la fierté, de la hauteur vis-à-vis des autres collégiens. Mais ce jeune a cette fierté au fond de lui. Il n’en fait pas d’éclat. Pour lui, cette action d’entraide est toute naturelle. Une classe doit avancer. Il veut faire bénéficier les autres de son savoir, de ses techniques d’assimilation de cours et leur donner la même chance que lui pour réussir. Les jalousies, les rivalités rodent cependant autour de lui. C’est le collège ! Ses parents le soutiennent et admirent sa démarche. Il reconnaissent en lui son sens des responsabilités. C’est peut-être aussi pour cela que Thibaut a cette maturité.

Nous retrouvons ce même jeune homme 20 ans plus tard dans le domaine professionnel. Il est ingénieur, chef de projet. Il a lui-même progressé grâce au tutorat. Puis il a honoré le poste de tuteur pour former une jeune étudiante en troisième année d’école d’ingénieur. Mais sur un poste de travail, les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes. Thibaut rencontre des difficultés de reconnaissance, et de retour de travail délégué. L’expérience renforce son mental. Il doit prendre les évènements avec patience et bienveillance tout en restant ferme et décisif. A lui maintenant de montrer la réussite de son tutorat à sa hiérarchie. Il le veut, il le peut.


De Lisa

Élisa reçoit une lettre d’un membre d’une association qui est atteint d’une maladie rare et sans laisser son nom mais un pseudonyme. Alors elle lit le message en forme de courrier comme au bon vieux temps.

Chère Élisa,

Voudrais tu me voir, participer à mon histoire et m’aider sur Terre à avancer pour vivre ? Demain.
C’est toi qui choisis de m’aider ou me laisser ici dans ma solitude comme toi, alors je te tends la main.
Que veux-tu que je fasse ? M’effacer ou me faire remarquer pour être à tes côtés pour avancer et à deux réapprendre le verbe aimer.
Compose l’histoire pour que ta plume me fasse rire et que nos cœurs ne fassent qu’un.
Mais ton écriture me fera du bien si tu ne veux pas me voir sur ton chemin.
N’écris jamais la fin car on ne connaît pas le lendemain et je compte sur toi pour être là.

Quelques temps plus tard, Élisa lui répond :

Cher [Didi@eric]

Comme c’est rigolo comme pseudo !
Je ne connais pas ton prénom mais on s’en fout car le principal est que tu as une correspondance qui te fasse rire comme tu le soulignes.
J’apprends que tu es atteint d’une maladie rare et je veux bien t’écrire grâce au site à message privé.
Je tiens à préciser que ma présence est bénévole et sans ambigüité. Est-ce que je suis claire ?
Je te remercie de ta lettre et suis fortement touchée par ton courage.

A bientôt

Élisa


D’Amara

Je suis une personne altruiste qui aime partager, échanger, communiquer et faire plaisir aux autres et ce depuis des années. A mon actif, j’ai plusieurs passions que j’apprécie de partager. Je me suis même oubliée durant des années. Depuis 2020, j’ai pris conscience que j’étais la priorité dans ma vie.
Tout au long de ma vie, j’ai réalisé de belles actions autour de moi. En effet, j’ai été secrétaire bénévole au sein d’une association de femmes et puis présidente quelques mois de cette association avant de quitter la région pour d’autres projets. Cette association avait pour but d’assurer des ateliers d’alphabétisation et d’illettrisme. Ce fut une belle et riche expérience pour moi et pour tous les membres de l’association.
L’écriture étant une de mes passions, j’ai participé au projet « une lettre, un sourire » mis en place durant le premier confinement en mars 2020. J’ai rédigé et envoyé plus de 60 lettres aux personnes isolées dans les Ehpads de France. Je continue toujours à envoyer quelques missives quand j’ai du temps.
Les contenus des lettres sont différents. J’ai eu plaisir à écrire à tout moment de la journée à des personnes qui avaient besoin de mots doux et joyeux. Ma relation fusionnelle avec le papier le stylo se poursuit. J’écris toujours des courriers manuscrits à plusieurs amis de tout âge (enfants ou adultes ou seniors). Je suis la meilleure cliente de la poste.
Les timbres de collection ont toujours eu une place importante dans ma vie. J’écris depuis l’âge de 9 ans, cela fait plus de 40 ans que j’envoie des lettres ou des cartes d’anniversaire, de vacances ou autres cartes en fonction de mon humeur.
L’écriture est mon refuge mais la photographie également et donc je partage des photos chaque jour sur des réseaux sociaux. J’ai été sollicitée par mon entourage pour prendre des photos lors de divers évènements dont les anniversaires d’enfants et adultes ou mariages. Je réalise ensuite des diaporamas pour les familles et de temps en temps, je fais des montages photos pour créer des sets de table ou du scrapbooking. L’écriture et la photographie sont mes activités favorites mais la cuisine également.
J’apprécie de cuisiner et de pâtisser pour partager avec mon réseau familial ou amical. Je confectionne souvent des biscuits de Noël et je prépare des sachets que j’offre à mon entourage. Dernièrement, j’ai confectionné des pâtisseries orientales soit 5 kilos et j’ai offert des plateaux de gâteaux à de nombreuses personnes. J’ai mis 2 jours à pâtisser même si les ingrédients avaient connu l’inflation. Ce fut un grand plaisir pour moi de faire découvrir aux autres des goûts et saveurs orientaux. J’ai toujours offert des pâtisseries à mes collègues de travail.
Les bonnes actions dans ma vie ont eu une place importante et à ce jour, je continue à faire plaisir à mon réseau mais également à moi-même. Si je ne le fais pas pour moi, personne ne le fera. Ce matin j’ai pris un petit déjeuner dans un salon de thé et je suis allée déjeuner toute seule.


De Catherine

Une question de point de vue

Maurice déteste le vendredi, car c’est le jour de la rédaction et il n’aime pas écrire. Mettre la date à 5 carreaux de la marge, tirer les deux traits horizontaux qui encadrent le mot « rédaction » ne lui posent aucun problème. Mais découvrir en le recopiant le sujet du jour commence à activer ses freins : « Raconte une bonne action que tu as faite. »
Oh, non ! Pas ça ! Lui revient à l’esprit sa galère de la veille, jeudi, jour de catéchisme, où il avait tant peiné à trouver de nouvelles mauvaises actions à avouer… parce qu’il ne pouvait pas toujours redire les mêmes. En attendant son tour au confessionnal, il avait dû se creuser les méninges pour sortir du « j’ai été trop gourmand », ou du « j’ai tapé mon frère « ou encore du « j’ai volé le crayon de Lucien ».
Chaque mois, il fallait être inventif car Maurice était persuadé que le curé avait en mémoire tout ce qu’il avait dit les semaines précédentes.
Et voilà que ça recommence à l’école, pour la rédaction du vendredi ! Une bonne action, une bonne action… Il lève le doigt et la maîtresse l’autorise à prendre la parole.

— Madame, c’est quoi, une bonne action ?
— Voyons, Maurice, une bonne action , c’est le contraire d’une mauvaise action !
Les autres ricanent. Il est bien avancé avec cette réponse. Devant son air dépité, la maîtresse croit bon d’en rajouter :
— Une bonne action, c’est quand tu fais quelque chose que tout le monde juge bien, que tout le monde approuve favorablement. Maintenant, mets-toi au travail rapidement !
Le pauvre Maurice semble perdu. A t’il déjà fait une bonne action, finalement ? Parce que, à chaque fois qu’il essaie de faire quelque chose de bien, ça finit toujours en engueulade ou en punition…Tiens, ne serait-ce que hier soir, il avait décidé de mettre la table, pensant faire plaisir à sa mère, mais, dans la précipitation, il a cassé un verre, déclenché les hauts cris maternels … et fut traité de bon à rien. Alors, bonne ou mauvaise action
Et quand il a ramené un pauvre petit chaton abandonné à la maison, son père est entré dans une rogne terrible, a pris le chaton et Maurice n’a jamais su ce qu’il était devenu. Bonne ou mauvaise action ?
Quand il a plongé dans la rivière pour récupérer le sac de Louison que le Grand Dédé avait lancé du pont, il a été puni pendant deux jours pour être rentré mouillé et vaseux !
Alors, c’est quoi, une bonne action ? Pour qui, pour quoi ? Qui décide si c’est une bonne ou mauvaise action ? Si lui décrète que c’est bien ce qu’il fait, n’y aura-t-il personne pour arguer le contraire ? Décidément, le bien et le mal sont un bien grand mystère… Et pendant ce temps-là, la pendule tourne et sa plume ne gratte pas le papier. Puisqu’il est capable d’invention le jeudi pour le mal, il lui faut sauver la face pour le bien. Alors, il se lance :
« Un jour, mon père s’est cassé les deux jambes en sautant du tracteur. Comme il avait très mal, je l’ai mis sur mon dos et l’ai porté jusqu’à la maison. Puis j’ai pris mon vélo pour aller chercher le docteur que j’ai ramené sur mon porte-bagages. Pendant qu’il auscultait et soignait mon père, j’ai labouré les deux champs pour que papa soit content. »
Et voilà, le tour est joué ! Si ça ce n’est pas de la bonne action !
Même qu’il a fait d’une pierre deux coups, car jeudi prochain, à confesse, il pourra expier de nouveaux mensonges plus gros que lui!


De Michèle

La bonne action ! C’est une phrase qui parle au miroir de la société, puisque les autres nous regardent d’après ce que nous faisons, et non d’après ce que nous sommes au plus profond.
Alors parlons-en. Pour moi une bonne action me semble être un acte bénévole, sans retour, non monnayable.
Aidez-les autres, tendre la main, faire un geste gratuit, tout le monde a déjà eu ce style d’action. Souvent c’est un geste, ou une action éphémère, qui dure de quelques secondes à quelques heures.
J’ai souvent offert un sandwich à une personne assise sur le trottoir, été la marraine d’une petite péruvienne pour sa scolarité, emmené quelqu’un en voiture pour une course, un déplacement quelconque. J’ai aussi recueilli un chat tout petit, endormi sous la voiture, qui a vécu 17 ans avec nous, ainsi qu’un jeune chien, abandonné, aux poils tout noués qui s’est avéré être une caniche de 18 mois, qui est restée dans la famille, 16 ans.
Mais si tout cela s’apparente à la bonne action, comme un bon point judéo-chrétien, alors que pour moi ce sont de simples gestes d’amour gratuits. Alors je parlerai de mes parents.

J’ai cessé mon emploi d’aide-soignante, pour m’occuper de mon père durant les 2 dernières années de sa vie, 2015 à 2017. J’habitais à 450km et j’y allais chaque mois 18 à 20 jours, les quelques derniers étant répartis entre mes 2 sœurs et une auxiliaire de vie. J’ai accompagné mon père jusqu’au bout pour l’aider au mieux et le rassurer sur son départ à presque 96 ans. Cela a été une thérapie pour moi, et une présence aidante aussi pour maman.
Le départ de papa l’a secouée et j’ai trouvé des paroles réconfortantes pour adoucir la situation. Il est décédé le 17/07/2017. Ils se sont mariés le 7 avril 1947. Ils venaient de fêter leur 70 ans de mariage. Comme ils avaient décidé de donner leur corps à la science, c’est moi qui suis allée annoncer son décès à la mairie et figurez-vous qu’on lui a attribué le N° 7.
J’ai expliqué tous ces 7 à maman en lui disant que c’était un chiffre spirituel et qu’il y en avait 7. 7 FOIS 7 correspond au nombre parfait. Elle m’a répondu « Il aimait ce qui était parfait » et moi « Il est près de toi pour te dire par ces coïncidences que tout est parfait, là où il est, et qu’elle ne devait pas s’inquiéter pour lui ». J’ai vu une lueur de bien-être dans ses yeux.
Ma mère ne pouvant vivre seule, est partie chez une de mes sœurs pendant 1 an 1/2. Sa présence quotidienne pesant tellement sur la vie de mon beau-frère qu’il a eu l’envie de lui trouver une place en maison de retraite. Pourtant, je faisais les 400km pour les soulager pendant quelques jours afin de leur permettre une croisière ou un voyage.
L’Epadh ? Inconcevable pour moi.
J’ai fait la proposition à ma sœur de prendre maman chez moi. Ce qui a été adopté.
Depuis, maman me remercie chaque jour, non qu’elle ait été malheureuse chez ma sœur, mais elle sentait les problèmes entre les époux dont elle savait en être la raison.
Mon ex gendre est venue m’aider à aménager la chambre qui allait être dédiée à maman. J’ai fait poser un fauteuil électrique, un monte-escalier pour 4 marches, car dans cette ancienne maison en pierre, rien n’est de plain-pied, et aucune chambre en rez-de-chaussée.
Depuis juin 2019, voilà bientôt 3 ans que notre couple Maman/Fille fonctionne à merveille, même si je ne bouge plus que pour les courses.
Je me félicite chaque jour, d’avoir fait ce choix, car en maison de retraite avec cette pseudo pandémie, ces vaccins-poisons et le Rivotril utilisé, elle ne serait sûrement plus de ce monde.
En Août, elle fêtera ses 95 ans !!
Je t’aime maman.

De Nicole

Les bonnes actions


Les bonnes actions sont-elles l’apparence de l’altruisme afin d’éviter les sentiments d’anxiété ?
Sont-elles une façon d’échapper aux condamnations de notre conscience ?
Un désir de bénéfice moral pour soi ?
Parfois, c’est vouloir le bien des autres, qu’ils ne désirent peut-être pas…
Un peu comme ces bourgeoises qui « s’embigotent » et qui gagnent leurs grâces.
Quelques actions « anonymes » : donner son sang, donner des livres dans une boite à livres.
Sourire à un clochard, apporter des habits à la Croix-Rouge.
Le bénévolat qui m’a donné le plus de plaisir : je suis raconteuse d’histoires aux enfants de maternelles (avant le Covid).
Je les emmène à la découverte de livres, de personnages, de réflexions…
Un échange parfois chahuté, un si bel accueil, sourires, rires, petites confidences.
Que du bonheur.


De Lucette


Combien ai-je fait de bonnes actions dans ma vie ?
Au quotidien, je suis le pilier de mon mari âgé, qui ne serait plus là, enfin plus avec moi dans notre maison si je n’étais pas apte à prendre et à faire tout ce qui incombe à un aidant aussi bien matériellement que physiquement. Tout, tout, tout passait par moi jusqu’à maintenant. Avec l’âge avançant, nos enfants sont de plus en plus proches pour nous aider. Avant, nous étions toujours été présents pour eux en toutes circonstances, maintenant, la roue a tourné, ce sont eux qui viennent à nous…
Ça suppose beaucoup de sacrifices, mais c’est impensable pour moi de l’éloigner de son foyer, de ses enfants et petits- enfants qui sont les belles joies qui lui reste quand il les voit…Voilà ma belle action, mon investissement pour lui depuis des années, ce dont je suis très fière.
Au-delà de ça, je suis très proche des gens qui sont déprimés ou malheureux. J’essaie toujours de les réconforter, de leur montrer qu’on finit toujours par rebondir positivement. Dernièrement, j’ai écrit un long message à une jeune fille qui a eu de gros problèmes dans son enfance et qui par moments retombe dès qu’un écueil fait face à elle. J’essaie de trouver les mots justes qui lui feront remonter le moral. Et quand, cette jeune femme me dit qu’elle a été émue et touchée, et bien c’est ma récompense.
D’ailleurs, on ne fait pas une bonne action pour avoir un remerciement, c’est avant tout le cœur qui parle. Et quand notre petite voix nous interpelle, il ne faut pas hésiter à le faire.
Ou simplement parler à un S.D.F. Tout de suite son regard me fixe, et ne comprend pas pourquoi quelqu’un s’intéresse à lui. Je tends la main pour lui déposer mon obole. Il me l’attrape et me la serre de toutes ses forces. Il était ému et moi aussi…
Acheter de la nourriture pour la Croix Rouge, et tout déposer dans leurs caddys sans se faire remarquer. Là aussi ce n’est que du bonheur de savoir que j’apporte du bien –être à des miséreux qui n’ont plus rien.
Partager un repas avec des personnes en position de faiblesse ou vulnérables. Ou aider « une mise sous tutelle » complètement abandonnée par sa famille, en lui permettant de s’acheter de la nourriture qu’elle ne plus s’offrir. Et quand elle me dit « j’ai envie d’une belle tranche de jambon, ou d’un rumsteak », sous peu elle pourra satisfaire son désir par mon intermédiaire.
Avoir recueilli un chien maltraité par des maîtres très égoïstes. Il l’avait relégué dans un endroit où il ne voyait jamais personne, il était interdit de pénétrer dans la maison. La maîtresse de maison ne supportait pas la moindre salissure sur son sol luisant…
Pendant des années, nous l’avons aimé comme un roi, il nous l’a rendu au centuple. A sa mort, nous avons repris une petite chienne à la S.P.A. tellement le vide était grand à sa perte. Elle aussi, nous l’avons choyée, aimée et respectée. Elle aussi était une chienne pleine de gratitude. Jamais la moindre bêtise, toujours prête à nous montrer sa reconnaissance. Un jour, elle est devenue « maman » à notre insu. Nous avons gardé un de ses chiots, (encore une petite chienne). Elle était le contraire de sa mère, aussi indépendante et désobéissante que sa mère était sage et pleine de sentiments à notre égard. Pourtant, ce petit chiot n’avait connu que notre foyer, mais nous l’avions trop gâtée, trop chérie, elle nous aimait de façon exclusive, elle avait sa mère et nous, et personne n’avait le droit d’entrer dans notre cercle.
Mais sans doute que oui, c’est une bonne action pour nos chiens. En principe « qui donne reçoit » encore plus. Nous, nous leur avons beaucoup donné d’affection, et eux une gratitude éternelle. Comment peut-on abandonner un animal sans défense dans la nature, le laisser divaguer ou l’attacher à un arbre ? C’est absolument scandaleux.
Je pense et milite pour que les sanctions soient sévères pour ces gens-là. Que feront- ils à leurs parents quand ils seront vieux, devenus gênants ? Eux, ne pensent pas qu’ils deviendront vieux un jour ? Personne n’y échappe, nous serons tous vieux un jour, si Dieu nous prête vie…
Voilà, mes bonnes actions au quotidien. On les fait sans s’en rendre compte. Ça fait partie de nous, de moi. J’aime voir les gens le moins malheureux possible.
A vous tous lecteurs, je souhaite toujours le meilleur dans votre vie…

De Joëlle


BA, bonne action, parole de scout, une bonne action par jour…
Le scout semble se faire plus rare de nos jours. En tout cas, cela fait longtemps que je n’en ai pas croisé.
Ah oui, j’oubliais, il y a eu la pandémie…
BA, au fait, c’est quoi une BA ?
Alors que les années s’ajoutent inéluctablement, me faisant passer dans la tranche des séniors « troisième âge », quel bilan puis-je faire sur mes BA ? Et ai-je envie, besoin de les passer en revue?
Pour cela, il me faut d’abord définir ce qu’est une bonne action (pour moi, en tout cas).
Bonne action pour l’un (donc acte hors du commun), acte ordinaire pour l’autre, tout n’est-il que question de perception ?
Bonne action. En quoi une action est-elle bonne ? Et d’abord, quelle est la limite à l’action ? Dans quel cas, un acte peut-il espérer entrer dans la catégorie labellisée « Bonne Action ».
Il y a dans cette idée de bonne action quelque chose qui me dérange, le côté bonne conscience, l’aspect classement. En quoi une action est-elle meilleure qu’une autre ? Qu’est-ce qui lui donne cette étiquette ?
Faites un don, il y a la journée de la Croix Rouge, la journée du cancer, celle du SIDA, le téléthon etc.
Est-ce faire une bonne action que de faire un don ? C’est en tout cas le sentiment que l’on veut nous donner en échange de notre participation financière. La Bonne Action aurait-elle un prix ??
Alors le bénévolat ? Qu’en est-il du bénévolat ? Bonne action ou action motivée par son ego ? De telle heure à telle heure, tel jour, je donne mon temps aux autres. On approche sans doute de la bonne action mais quand on enlève ceux qui le font pour la bonne conscience que cela procure, quand on élimine ceux qui le font pour occuper le mieux possible leur temps, où est-elle la Bonne Action ??
Ne voyez pas dans mes propos de cynisme ; je ne fais pas mieux que le commun des mortels. Et j’ai bien conscience de l’importance des dons et du temps consacré aux autres. Mais ce côté programmé me dérange dans la définition de la BA. Il me plaît de penser qu’un acte doit avoir un côté spontané et désintéressé pour accéder à la BA. Les quelques minutes de bavardages partagés ou provoqués avec la voisine qui vit seule et rencontrée au marché alors qu’on ne rêve que de rentrer chez soi. Le coup de fil à une personne qui vit un moment compliqué et dont on ressortira épuisé. Le temps donné sans contrepartie « réfléchie ». Oui, le plongeon que fait une personne pour en sauver une autre en difficulté me semble mériter le terme de BA.
Alors, en ai-je fait beaucoup de BA, selon ma définition ? Je n’en ai pas fait le compte. Je ne les ai pas répertoriées mais je sais que certains de mes actes me permettent de dire oui, de temps en temps, mes actes ont été et j’espère seront encore des BA, de bonnes actions.


De Dominique

Main dans la main.

Quel bonheur de naître sain de corps et d’esprit pour vivre au maximum les capacités physiques de la jeunesse.
Enfant, Je courrais dans les champs et les bois en toute liberté. Si l’envie me prenait de grimper dans un arbre pour aller à la “Marotte” à poires, en quelques secondes, je remplissais mon panier de délicieux fruits.
Parfois, le vieux Paul, propriétaire du verger, s’apercevant de ma présence, faisait mine d’épauler son fusil à gros sel pour m’effrayer. Tous les sens en alerte, je prenais “mes jambes à mon cou” et en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, je disparaissais.
Le garnement que j’ai été aimait faire les quatre cents coups en entraînant dans son sillage les copains.
En grandissant, je me suis forgé une réputation de meneur au statut d’organisateur que j’utilisais pour encourager les jeunes aux joies de l’activité physique. Partie de foot à n’en plus finir, balade à vélo ou longues randonnées pédestres de découvertes.
Cette vie sportive m’a tellement passionnée qu’elle en est devenue mon métier, voire un sacerdoce tant sont riches les situations humaines rencontrées. C’est ainsi que le plaisir personnel de la pratique sportive s’est peu à peu transformé en devoir de partage social grâce aux valeurs qu’elle représente.
La première de mes réussites fut gagnée avec Christophe, toxicomane notoire qui s’est reconstruit pour pouvoir participer à cette randonnée du défi qui est de parcourir les 100 derniers kilomètres de la course cycliste “Paris Roubaix”.
Citons aussi le cas d’Amir, abandonné par sa famille et complètement laissé à lui-même. Il s’est relevé de son état précaire en participant au même projet.
Bien sûr, ces petites victoires n’auraient pas pu être gagnées sans la bonne volonté des acteurs eux-mêmes mais, elles ont été encourageantes.
J’évoquais plus haut mon enfance heureuse et harmonieuse grâce au privilège d’être né sain de corps et d’esprit.
Hélas, la nature n’est pas toujours équitable avec tous ses enfants.
C’est une de ces situations difficiles que j’ai eue à gérer un jour :
Un mercredi de septembre, j’encadre un petit groupe de débutants à l’école de gymnastique de ma ville. Les consignes sont données et le travail commence. Je remarque assez vite un gamin au comportement différent. Les autres élèves n’en perçoivent rien ou n’en parlent pas.
Après le cours, je vais voir la personne chargée des inscriptions pour lui demander des précisions sur le petit garçon un peu “bizarre”.
Elle me répond :
— Oui Jérôme est différent, il a un syndrome d’autisme et sa mère m’a demandé de le cacher car elle a peur d’un refus de notre part.
Me voilà prévenu, le jeune a été diagnostiqué “autiste”.
En le voyant ainsi défavorisé par la vie, il me revient mes longues parties de foot, mes quatre cents coups à sillonner la nature libre de toute entrave physique et tous ces plaisirs simples passés à grimper, à gambader, à sauter. Toutes ces choses que Jérôme aura bien du mal à expérimenter en raison de cette injustice que la science ne sait toujours pas expliquer.

La tête pleine de mes souvenirs de gamin heureux, j’accepte en cours cet enfant “différent”.
Tout se passe bien, à tel point que Jérôme devient le “chouchou” des autres participants.
Devant ce bon retour, un autre élève nous arrive, c’est Vincent. Son attention est moins soutenue et il est plus difficile de l’impliquer aux séances. Des progrès sont toutefois perceptibles et c’est une autre aventure sportive qui nous attend.
Le centre où sont scolarisés les enfants s’intéresse à notre action, une étroite coopération en naîtra.
Des cadres bénévoles collaborent avec des professionnels et vont assurer des cours de découvertes sportives directement dans l’établissement. Des échanges d’expériences et de savoir-faire sont confrontés.
Cet étroit partenariat aboutira à l’organisation d’un dimanche festif organisé dans notre gymnase.
Les parents des jeunes “autistes” sont invités à découvrir leurs enfants sous un nouveau jour, ils sont ravis. Les jeunes enfants repartent avec des cadeaux et des médailles.
Le succès de la manifestation nous encourage à persévérer. Nous contactons la fédération des sports adaptés et avec eux nous organisons dans le cadre du sport scolaire, une journée départementale d’initiation à la gymnastique.
La foi déplace des montagnes dit-on, nous réussissons à impliquer l’Education Nationale qui autorise une classe d’élèves “valides” à parrainer un enfant handicapé. Ils constitueront des duos qui, main dans la main, réaliseront ensemble des parcours sportifs.
La journée remporte un franc succès et le public présent sera sensibilisé au handicap de l’autisme.
SENNY, la dernière compagne de l’acteur décédé Jacques VILLERET et amie de la maman de Jérôme, accepte de parrainer notre manifestation. Elle offrira au club l’affiche dédicacée par la troupe du “Splendid” qui salue notre initiative. La télé régionale déplace ses caméras et consacrera une colonne de son journal à notre action. Notre bulletin fédéral “Le gymnaste”, en fera son article phare.
La presse écrite “La Voix du Nord” titrera : Le sport comme trait d’union :
“Hier dans le gymnase du club de gymnastique, s’est tenue une journée départementale de sport qui a réuni plus de cinquante enfants. Signe particulier, la moitié était des handicapés mentaux, qui ont affiché leur joie de vivre”.

Aujourd’hui, loin de tout “battage” médiatique l’équipe du club perpétue l’activité en accueillant chaque lundi des jeunes autistes affichant toujours leur joie de vivre.
À l’heure où j’écris ces mots, je n’ai plus de nouvelles ni de Jérôme ni de Vincent, mais je pense souvent à eux ; les précurseurs de cette belle aventure.
Il me revient encore l’image de ce petit garçon difficile et fragile, fuyant le contact affectif, muré dans son mutisme entêté et qui pourtant, un jour a murmuré mon prénom.
C’est peut-être ma plus belle des victoires.
Merci à vous Jérôme et Vincent pour la leçon de vie que vous nous avez donnée.


De Marie-Josée


Des fleurs pour Elise

L’église était pleine à craquer. C’était le dernier adieu à Paul, il était aussi connu que le loup blanc, aimé et estimé par tous. Au fil des années, beaucoup avaient oublié son prénom et ne l’appelaient plus que ’’ le bénévole.’’ C’est vrai qu’il ne ménageait pas sa peine, il était sur tous les fronts et cumulait les bonnes actions. Je l’ai vu maintes fois tondre la pelouse du terrain de foot, tailler les haies des personnes trop âgées pour les entretenir, organiser les équipes de nettoyage des berges de la rivière, griller des saucisses lors des fêtes de village, tant et si bien qu’on envisageait de rebaptiser la place du tilleul en son honneur. Finalement, la place fut épargnée et l’on décida d’un commun accord qu’une rue du nouveau lotissement porterait son nom.
La chorale était au grand complet gratifiant l’assistance des plus beaux chants et une soliste avait été invitée pour interpréter l’Ave Maria de Gounod.
Maman avait eu raison quand elle m’a dit que je ne regretterai pas, vu que je ne voulais pas y aller. C’était important pour elle que la famille soit représentée, elle-même étant clouée au lit, j’étais la seule qui pouvait se libérer. Elle m’a dit en plaisantant :
—Ce sera ta bonne action de la journée et si tu pouvais prendre du pain après l’office ce sera ta deuxième.

Les orateurs se sont succédé tenant des discours truffés de propos dithyrambiques à souhait couverts par moment par les coups de tonnerre d’un orage qui avait éclaté.
La pluie battant contre les vitraux me ramena des années en arrière où je me suis retrouvée à marcher sous la pluie. Le bus scolaire m’était passé sous le nez, il ne me restait plus qu’à rentrer à pied. Les 7 kilomètres à parcourir n’étaient pas non plus la mer à boire et peut-être qu’une voiture s’arrêterait pour m’emmener même si la route n’était pas très fréquentée. Il faisait très chaud et les nuages noirs qui s’accumulaient ne laissaient rien présager de bon. Un orage éclata et je me suis retrouvée trempée au bout de quelques minutes. J’entendis une voiture qui s’approchait, elle a ralenti quand elle est arrivée à ma hauteur et a continué m’éclaboussant à son passage.
J’ai eu le temps de reconnaître le conducteur, c’était Paul, craignait-il que je salirais sa belle voiture toute neuve ? Je ne devais pas être douée pour faire de l’auto-stop, une deuxième ne s’est pas arrêtée, tant pis, il ne restait plus que 5 kilomètres et j’ai accéléré le pas. Au bout d’un kilomètre, contre toute attente, une voiture s’est arrêtée sans que je fasse le moindre geste et la conductrice m’a invitée à monter. J’étais trempée, j’allais mouiller son siège mais cela lui était égal, elle allait quand même pas me laisser là alors que l’orage redoublait d’intensité. Elle m’a demandé où j’allais et il s’est avéré qu’elle n’avait pas la même destination que moi. Je lui ai proposé de me laisser au carrefour, cela m’avançait déjà pas mal et peut-être que le soleil reviendrait pour le reste du trajet. Il n’en était pas question, elle me ramènerait chez moi, il suffirait que je lui indique le chemin. Elle m’a dit qu’elle s’appelait Elise Rouget et qu’elle était nouvellement installée dans la région.
Elle avait repris une boulangerie avec son mari dans un village à une dizaine de kilomètres d’ici et cela ne la dérangeait pas de faire un détour, au contraire cela lui permettrait de connaître un peu mieux les alentours. Elle m’a gratifiée d’un grand sourire en me déposant devant chez moi sans rien accepter en guise de remerciement, c’était naturel pour elle. Je lui ai dit que je passerais à sa boulangerie si l’occasion se présenterait mais elle ne s’est pas présentée et je n’y suis jamais allée.
L’office se terminait, la famille avait invité l’assistance à partager le verre de l’amitié. Tout le monde a pris la direction de la salle des fêtes, sauf moi. Je me suis rappelée que je devais prendre du pain. Tout compte fait, au-lieu de l’acheter à la boulangerie du village , si j’allais faire un détour et le prendre chez Elise ?
J’ai trouvé la boulangerie sans problèmes et j’ai demandé à la serveuse de ses nouvelles. Elle m’a dit qu’elle ne l’a pas bien connue, que c’était l‘ancienne propriétaire et qu’elle a été enterrée l’année dernière. Je suis sortie du magasin un peu sonnée. J’ai acheté des fleurs et j’ai pris la direction du cimetière. La tombe se trouvait dans la dernière rangée, une pierre avec deux noms et une plaque : à nos cousins. L’orage a repris, j’ai déposé mon bouquet et me suis dépêchée de regagner ma voiture. Cette fois, je ne vais pas être pas trempée.


De Marie-Laure


J’ai grandi dans un petit village, dans une famille aimante et ouverte sur l’extérieur. Papa était adjoint au maire, maman participait å l’animation de la salle patronale, via les œuvres catholiques. Elle était femme au foyer, mais avait rêvé devenir enseignante ; c’est sûrement pour cela que mon frère et moi étions régulièrement accompagnés de nos camarades de classe pour faire les devoirs tous ensemble. Maman avait à cœur d’expliquer les problèmes de robinets qui fuient et de reprendre les règles du «Bled ». Nous finissions nos exercices par une frise de cocottes ou de moulins, tracés à la règle, avant d’aller gambader dans la campagne environnante.
J’ai 11 ans, nous venons de déménager dans une grosse bourgade, en banlieue d’une ville de province. J’entre au collège, à la ZUP (zone à urbaniser en priorité, avec son lot de barres d’immeubles). J’ai l’impression de découvrir un nouveau monde, mes nouvelles amies s’appellent Angelina, Bojena, Samya, Aminata et Brigitte. Je saisis chaque occasion pour les accompagner chez elles car j’aime les entendre parler avec leur famille. Même si je n’y comprends rien, ces langues sonnent comme la mélodie d’ un voyage.
Brigitte habite tout près de chez moi, nous rentrons souvent ensemble, mais elle me laisse toujours au coin de la rue et file à la sauvette. Au fond, de mes nouvelles amies, c’est Brigitte qui m’intrigue le plus. Elle est assez réservée, souriante et à rire de nos bêtises mais toujours avec une certaine retenue. Elle parle peu de sa maison, elle a quatre frères et sœurs en bas âge, alors de retour du collège, elle doit aider sa maman. Son papa ne travaille pas, il est aveugle. Autant de bonnes raisons pour préparer les exposés chez moi, ce qui d’ailleurs ne posait aucun souci à maman, au contraire !
Un jour sur le chemin, elle me parle de sa grande sœur qui lui manque, elle est partie pour plusieurs mois aider une tante, dans le Nord, dont ils sont originaires. Effectivement, je la trouve très triste ces derniers temps. Je lui propose de venir réviser les leçons avec moi et après nous pourrons écouter nos tubes préférés. Elle semble ravie de cette proposition et va demander la permission à sa mère, en me précisant toutefois que ce n’est pas nécessaire que j’aille jusque chez elle au fond de l’impasse, elle me retrouvera chez moi tout à l’heure !
J’ai préparé un petit goûter, j’ai attendu, mais elle n’est pas venue. Je me suis dit que sûrement sa mère l’avait embauchée pour des tâches ménagères. Le lendemain, ma copine me dit que son père n’avait pas voulu qu’elle sorte de la maison, car ce n’était pas bien de s’imposer chez les gens, cela ne se faisait pas. Je ne sais dire pourquoi, mais je sens que cette explication doit me satisfaire et que le débat n’aura pas lieu.
Le soir, j’en parle autour du repas, maman me promet que lorsqu’elle croisera la maman de Brigitte sur le marché, elle essaiera de lui en reparler, lui certifiant qu’il n’y avait là aucun dérangement. Cet appui me fait du bien, mais entendre mes parents poursuivre la conversation en allemand ne me plaît guère. Je sais bien que lorsqu’ils parlent allemand, c’est pour que nous ne puissions comprendre de quoi il s’agit !
Notre petite bande reste soudée et joyeuse, mais Brigitte n’a plus l’autorisation de venir préparer les exposés à la maison. Après les cours, elle doit directement rentrer chez elle. Certains jours, nous finissons à 17 h 30, d’autres fois à 16 h, nous percevons bien que Brigitte n’a pas envie de rentrer à de bonne heure chez elle. Alors toutes les six, nous décidons de rester ensemble en permanence tous les jours jusqu’à 17 h 30, prétextant un travail en commun à finir.
Bizarrement, je n’ai pas eu besoin de beaucoup me justifier auprès de mes parents. Simplement dire que nous faisions nos devoirs ensemble au collège a suffi. Maman ne voyait plus mes copines, mais elle demandait régulièrement des nouvelles de chacune et plus particulièrement de Brigitte. Je ne sais quoi lui répondre, si ce n’est qu’elle est contente que nous fassions nos devoirs ensemble et que ces derniers temps elle a eu plusieurs super bonnes notes.
L’année de sixième se passe et nous devenons des habituées de la permanence du soir, même si parfois nous nous faisons rappeler à l’ordre car trop bruyantes ! Durant tout l’été, nous n’avons plus de nouvelles de Brigitte, nous n’avions pas de moyens de la joindre autre que d’aller frapper à sa porte. Osera t’on y aller ? Brigitte s’est toujours arrangée pour que nous n’allions pas jusqu’au fond de l’impasse, lourd dilemme. J’accompagne régulièrement maman au marché, dans l’espoir de la croiser. Notre petite bande passe régulièrement au bout de son impasse, sans toutefois oser s’y aventurer plus. Un jour, de loin, nous entendons des pleurs de bébé, nous sommes surprises car Brigitte ne nous a pas dit que sa maman était enceinte !
En septembre, nous nous retrouvons toutes les six, chacune à raconter les évènements marquants de son été. Brigitte est contente, sa grande sœur est revenue et il y a un bébé de plus à la maison ! Elle nous prévient que dès que possible, elle quittera le collège pour aller en apprentissage. Elle a déjà redoublé deux fois et son père a déjà parlé avec le cafetier de la place, elle fera serveuse.
Lorsque je reparle le soir du destin programmé de Brigitte, maman me dit qu’il ne faut pas se mêler de la vie d’autrui, chacun sa vie, faut pas faire d’ histoire, c’est comme ça.
J’ai 40 ans, je retourne régulièrement rendre visite à mes parents qui habitent toujours au même endroit. Machinalement, je tourne toujours la tête vers le fond de l’impasse de Brigitte. Il n’y a pas plus d’animation extérieure qu’autrefois.
J’ai 50 ans, je travaille dans le secteur médico- social, j’ai été amenée à plusieurs reprises à faire des signalements. Je n’ai jamais revu Brigitte, je tourne toujours la tête au bout de sa rue…

Poème de Laura Vasquez, « Les mains bien noires », prposé par Françoise T (hors proposition d’écriture)


tu ne vas pas me laisser comme un arbre
tu ne peux pas me laisser comme un sac
je ne suis pas un arbre

mon ventre ne fait pas de miel, moi
mon ventre ne fait pas de bruit

quand tu viendras, tu pourras voir
je sais rouler les cigarettes
je sais m’endormir en bougeant

je m’ennuie quand je pense à tout
je voudrais être un château crevé
je voudrais être un cheval pourri

je voudrais être vraiment simple

je suis en train de me graver des tatouages partout sur les yeux
viens me toucher sur les yeux

Cette semaine, nous sommes gâtés à lire de si beaux textes. Merci à toutes et tous pour cette belle écriture.

La nature explose, les végétaux se développent à toute vitesse, le soleil brille, les oiseaux sont heureux, leurs nichées ont pris leur envol. Que demander de plus?

Je vous souhaite un beau weekend, peut-être orageux pour certains d’entre vous en France.

Je vous donnez rendez-vous la semaine prochaine pour de nouvelles histoires. Je les attends avec une grande impatience!

Portez-vous bien, profitez bien et prenez soin de vous!

Créativement vôtre,

Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE


Passionnée de lecture et d’écriture, de voyages et d’art, je partage mes conseils sur l’écriture. L'écriture est devenue ma passion: j'écris des livres pratiques et des romans.

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