La suite des aventures d’Amanda arrive un peu plus tardivement que d’habitude.
Les contraintes professionnelles m’obligent à retarder les envois.
Comme, de plus, je suis fatiguée, ça devient difficile!
Vivement les vacances vendredi!
Voici sans plus tarder le chapitre 14:
Des goûts, des couleurs et des problèmes
Ma mère et moi, nous avons toujours eu chacune nos émissions préférées à la radio ou à la télévision. Quand j’étais petite, j’adorais « Bonne nuit les petits ». J’acceptais d’aller me coucher seulement après l’émission quand Nounours prononçait les mots magiques. Je considérais le personnage de Nounours comme mon Papa qui m’intimait l’ordre d’aller sagement dormir. Puis, suivirent Babar, et surtout la série « Belle et Sébastien ». J’étais tombée amoureuse du personnage de Sébastien, créé par Cécile Aubry. J’avais pris l’habitude de m’identifier aux héros que je voyais sur l’écran de la télévision ou à ceux que je lisais dans les histoires des bibliothèques vertes et roses.
Petite, j’adorais les livres de la fringante Caroline dans ses péripéties avec ses animaux adorés. Je devenais Caroline et transfigurait ma vie terne, sans aventures avec mes amis de papier. C’étaient mes compagnons à moi. J’aimais aussi les aventures de Martine avec ses frères Jean et Alain, ses amis, son chien Patapouf et son chat Moustache. J’imaginais que c’était ma famille à moi et que je vivais par procuration.
Ma mère, quant à elle, aimait écouter la radio, habitude qu’elle avait prise pendant son adolescence. Elle avait suivi fidèlement SLC dans les années soixante, « Salut les copains » diffusé sur Europe N°1, qui s’arrêta à ma naissance. Les chanteurs de l’époque avaient accompagné toute sa jeunesse et toute sa grossesse. Ils étaient ses seuls compagnons, n’ayant plus de famille proche. Elle aimait bien écouter France Inter, avec José Artur, Jacques Chancel et Claude Villers. Elle avait l’impression de voyager, elle qui ne partait jamais en vacances. Cela lui permettait aussi d’acquérir un peu de culture générale.
J’adorais les animaux petite, surtout la petite chienne de ma mère, Kopi, toujours en vie, alors que j’approchais de mes douze ans. Elle me faisait office de confidente et de sœur avec laquelle j’adorais jouer. Jusqu’à la fin de sa vie, l’animal dormit moi et je lui racontais toutes mes petites misères passagères. C’était bien plus pratique que de tenir un journal intime. La gentille boule de poils jappait de plaisir à mes côtés.
Un soir de promenade dans mon quartier, seule, un berger allemand gambadait en laisse et voulut attaquer Kopi. J’eus le réflexe de soulever ma chienne et de la serrer dans mes bras. Le berger, en réaction, me mordit légèrement à la main quand je voulus le chasser. Quand j’aperçus un garçon, sans doute le maître du chien, qui déambulait tranquillement avec ses copains, je réagis violemment :
« Eh, dis donc, toi, tu peux pas attacher ton chien, espèce d’idiot ! Il m’a mordu à la main ! »
« C’est quoi ton problème, la boutonneuse ? Mon chien, il avait les crocs. J’peux pas te dire mieux. Fais pas ta chochotte, t’as pas si mal que ça, autrement tu gueulerais. »
La bande de potes rigolait haut et fort.
« Eh, Gilles, t’as vu ses cheveux à celle-là ? Pas trop à la mode la gonzesse ! Plate comme une limande, avec son cul en amande… », l’un des gars chantait à tue-tête dans la rue, hilare.
Je me sentis mortifiée et passai mon chemin. Je n’appréciais guère la compagnie des garçons. Au collège, je ne leur parlais guère et les dédaignais plutôt.
Depuis mon enfance, je souffrais d’un complexe de timidité vis-à-vis des garçons, qui s’accentua à l’adolescence. Je perdais facilement mes moyens à leur contact. Je trouvais mon physique ingrat. Une acné importante ruinait mon visage myope comme une taupe et j’arborais une grosse paire de lunettes façon Nana Mouskouri. Pour couronner le tout, je portais un appareil dentaire qui annihilait en moi toute envie de sourire ou de rouler un patin à un gars du collège. Je ne me vêtais pas à la dernière mode non plus. Ma mère gagnait peu et dépensait peu. Elle me tricotait des pulls, récupérait des vêtements que les filles de ses collègues ne pouvaient ou ne voulaient plus porter. Les moqueries de mes camarades de classe amenaient l’adolescente que j’étais à se focaliser encore plus sur certains de ces défauts et à leur accorder trop d’importance.
Du fait de mes complexes physiques et vestimentaires, j’avais honte de moi. Je craignais d’être mal considérée et de ne pas être digne d’amour. De ce fait, je préférais souvent rester en retrait dans un groupe pour ne pas attirer l’attention sur moi. Je paraissais un peu sauvage, à l’image de ma mère et je ne faisais aucun effort pour me mettre en valeur. Comme ma mère.
Je n’avais pas d’autre modèle.
Rendez-vous est pris vendredi pour le chapitre 15.Portez-vous bien d’ici là!
Créativement vôtre,
Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE