La proposition d’écriture N° 141 va vous permettre de visiter des régions, des villes et de voyager. C’est un pur bonheur!

Merci à vous toutes et tous de nous faire partir vers des ailleurs enchanteurs. Voici vos textes. Je vous en souhaite une belle lecture.

De Dolma

Ma région est riche en bons produits alimentaires mais aussi en espaces de nature magnifiques. Là-haut dans nos montagnes, nous avons de grandes forêts dont les rois sont le sapin et l’épicéa. Le sapin est mon arbre préféré. Dans chacune de nos forêts, il y a un « Sapin-Président ». Cette tradition typique de notre région remonte à la fin du 19ème siècle, c’est le plus majestueux de la forêt, élu officiellement au cours d’une cérémonie festive qui réunit les forestiers, les élus et les habitants locaux. Son emplacement est indiqué sur les sentiers et c’est souvent un but de promenade.
Le sapin nous offre aussi son délicieux parfum et son goût dans des huiles essentielles, des parfums d’ambiance, des savons, du miel, de la bière, du sirop, de la liqueur ou de la glace.
Son cousin l’épicéa n’est pas en reste. Dans les forêts, on peut voir des sangliers (pas des animaux mais des hommes ou des femmes) prélever son écorce pour fabriquer les sangles qui entourent un fromage emblématique : le Mont d’Or. Un régal saisonnier au lait cru qui se consomme du 10 septembre au 10 mai, affiné au minimum 21 jours sur des planches d’épicéa, cerclé d’une sangle et déposé dans une boîte de cette même essence qui lui confère son goût caractéristique. Il peut se manger tel quel ou chaud, passé au four dans sa boîte avec du vin blanc régional versé dans un trou creusé au milieu, accompagné de pommes de terre et de charcuteries.
Ces dernières sont traditionnellement fumées à l’épicéa dans un tuyé. C’est une grande pièce-cheminée au centre des fermes des montagnes, coiffée d’une cheminée pyramidale en planches de sapin pouvant atteindre 15 mètres de hauteur. Dans mon enfance, il y avait encore beaucoup de ces fermes. J’ai passé quelques étés dans l’une d’elle, aujourd’hui elles disparaissent.
Parmi les charcuteries de chez nous, la plus connue est une saucisse qui porte le nom d’une ville, protégée par une IGP et un label rouge. C’est un produit de grande qualité, issu d’un savoir-faire ancestral dans le respect du terroir qui lui donne son goût si délicieux. Il existe mille façons de la consommer, chaudes ou froides selon la saison.
Le Mont d’Or, c’est aussi le nom d’un sommet, point culminant du département avec 1463 mètres. Il présente deux versants très différents : d’un côté, une pente relativement douce, de l’autre une impressionnante falaise rocheuse et abrupte. Lorsque le temps est dégagé, il offre une vue imprenable sur toute la chaîne des Alpes. C’est une destination idéale et magnifique pour tous les randonneurs, à pied l’été, en raquettes ou ski de fond l’hiver.
Voilà, c’est avec un grand bonheur que j’ai évoqué ma région où tout est lié, la montagne, la forêt, le patrimoine bâti, qui nous donnent le goût d’un terroir authentique et riche qu’il nous faut défendre et préserver et que nous aimons faire découvrir et partager avec tous ceux qui le voudront.

De Luc

Colin Bintus vit au rythme des saisons. Dans ces montagnes loin de la ville, bien que la modernité y soit arrivée depuis longtemps, les éléments de la Terre conditionnent sa vie. Ecologie et écologiste sont des mots qu’il ne connaît pas, mais comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, rien de ce qui a trait à la nature ne lui est étranger. Il la connaît autrement mieux que nos technocrates verts qui ont peur des araignées et des tiques.
Bien évidemment, on n’est pas très riches par chez lui. Autrefois, le textile apportait un peu de prospérité et les habitants de sa vallée étaient employés dans les usines qui fleurirent et perdurèrent au cours des XIXème et XXème siècles. Mais voilà, la mondialisation et les délocalisations ont bouleversé la vie par ici et ont emporté la richesse par-delà les mers. Les dix entreprises de son village ont disparu, la dernière au tournant des années 2000. Les retraites sont minuscules, donc tout ce que l’on peut tirer de la nature, soit de son jardin ou de la forêt est le bienvenu.
Nous allons justement nous intéresser à ce que Colin Bintus va faire en forêt. Bien évidemment, les conditions climatiques, qui ont beaucoup évolué, ont changé la vie de sa montagne. C’est pour cela qu’il est d’autant plus attentif à la sécheresse, au manque d’enneigement, à la chaleur et au froid. Cette année, sont même apparus les premiers incendies à la consternation générale.
Durant ses balades en montagne, il y trouve de quoi améliorer son ordinaire et aussi arrondir sa maigre retraite.
Tout d’abord, les ruisseaux et les gouttes sont une mine qui recèle le plus pur des diamants, la truite fario. Dès l’ouverture de la pêche en mars et jusqu’à la fin de l’été, il traque les salmonidés. Mais, il y apporte une attention particulière pour ne pas tuer les poissons qui ne font pas la taille réglementaire. En effet, un poisson qui a avalé a toutes les chances de mourir. Pour cela, il pêche à la mouche, technique difficile, mais l’animal survit toujours, étant juste pris au bord de la gueule. Une fois la fermeture actée, il éprouve un grand plaisir à suivre les truites qui remontent en couple le plus haut possible, par de minuscules filets d’eau, pour déposer leur fraie presque au sommet des ballons. En effet, plus les œufs sont laissés haut en altitude, et plus leur chance de ne pas être arrachés par les crues est grande.
Outre la truite, l’automne recèle un autre trésor dans ces grandes forêts de sapins, le cèpe. Là aussi, Colin Bintus est aux aguets, à attendre la conjonction des conditions favorables. Il n’est pas toujours évident qu’elles soient réunies en une bonne conjoncture. Il y faut un printemps pluvieux, un été sec et chaud, un automne arrosé, des fluctuations de température, un bon coup de chaud en journée et un coup de froid la nuit, donc une belle amplitude, voire un choc thermique et si possible, cela en concordance avec la phase adéquate de la lune. Ouf ! cela fait beaucoup. Alors, le miracle peut se produire, et bien souvent, il se produit. Il est impératif de se dépêcher car ce phénomène ne dure jamais bien longtemps. Le boletus edulis est un produit rapidement périssable. Donc, il est nécessaire d’être bien organisé dans cette région granitique très propice à cette espèce de champignons lorsque la pousse est massive. Sans que l’on puisse parler de braconnage, il y a une règle à respecter : les fameux cinq litres par personne et par jour. Les agents des eaux et forêts ainsi que la gendarmerie rodent en ces périodes. Colin Bintus, qui profite de cette générosité de la nature pour se faire des sommes rondelettes, doit déjouer la vigilance des gabelous, et tout particulièrement se méfier des « tauniats » qui ne demandent qu’à le dénoncer. Sa technique est rôdée. Un sac à dos, deux sacs de supermarché. En une fois, il transporte jusqu’à vingt kilos à travers bois jusqu’à sa maison, construite par ses ancêtres il y a plusieurs siècles. Les journées propices, il effectue jusqu’à trois voyages. Il en vend un peu de la main à la main, mais pas trop, craignant la dénonciation. La majeure partie de sa cueillette, il l’amène avec sa camionnette au marchand de champignons en gros trois villages plus loin. Mais, dans ces immenses forêts à l’accès difficile, on a beau en ramasser, on en laisse toujours des quantités insoupçonnées.
La perle de ses montagnes, la brimbelle, elle aussi a besoin de conditions favorables pour donner un bon rendement. Elle apparaît plus tôt en saison, de juin à juillet. Elle va aussi se négocier un bon prix. Ce qui est important pour qu’elle produise bien, c’est qu’elle ne subisse pas de gelées tardives, qui brûlent irrémédiablement les bourgeons ou le fruit juste formé. Il y a quelques petits secrets à connaître. Dans les montagnes de Colin, il se produit un phénomène météorologique étrange, l’inversion de température. Il va geler à 700 mètres d’altitude, avec pour conséquence l’anéantissement de la pousse. Par contre, la température sera plus clémente à 1000 m et, à cette altitude, les conditions resteront d’autant plus convenables que les buissons à brimbelles seront encore protégés par une couche de neige au mois de mars.
Ce fruit de quelques grammes, ce n’est pas le cèpe, la cueillette nécessite de longues heures pour en ramasser suffisamment. Les normes et les règles imposent leur loi. Les parcs naturels couvrent une partie de ses montagnes, le ramassage y est interdit ou strictement encadré. Ces zones sont immenses et s’étendent dans le massif sur 26 communes. D’autre part, la rifle (espèce de peigne avec un réservoir) est interdite, la cueillette à la main est obligatoire. Du temps de ses parents et grands-parents, il n’y avait pas tous ces technocrates pour traquer les villageois. De ce fait, il tient de ses ancêtres de magnifiques outils centenaires bien adaptés au ramassage efficace. Mais voilà, il doit rester aux aguets, les contrôleurs pouvant lui tomber sur le dos sans prévenir. Il s’est fait prendre la semaine dernière. Le forestier, qui lui a mis une contravention de 135 euros, était particulièrement heureux de l’avoir coincé en flagrant délit. Il le guettait depuis longtemps. Il savait qu’un jour il le coincerait. Il voulut lui confisquer sa récolte. Il refusa de la lui donner et, devant lui il engloutit les 500 grammes qu’il avait déjà ramassés, au grand dam du forestier qui tentait de lui arracher son panier. Colin Bintus, en grandes poignées, engloutissait ses brimbelles, et il en était tout tâché, ça lui dégoulinait même sur le menton, jusqu’à sa chemise, qui se constellait de grosses taches foncées. Une fois qu’il eut fini, il éclata d’un grand rire, montrant sa langue et ses dents violettes au garde forestier, rouge de colère.
Voilà la vie de Colin Bintus au rythme du temps dans ses montagnes d ……….


De Pascale

Sur les plaines marécageuses, la brume ne s’est pas dissipée.
La nature sommeille encore tout comme le chien, gardien de l’airial.
Derrière la grange, fébrile, un chevreuil tente une approche. Il voudrait traverser la clairière, rejoindre en forêt ses comparses et se mettre à l’abri. Son instinct lui souffle que bientôt, les chiens seront de retour et avec eux le sifflement des balles qu’il faudra éviter.
Le soleil, qui ose à peine pointer ses rayons rougeoyants entre le feuillage des chênes, effraye déjà toute gouttelette frémissant sur les fougères. D’ici quelque moment, elles ne seront que souvenir !
A la maison, dans le silence de la nuit à peine achevée, derrière la fenêtre entrouverte, l’homme, encore plongé dans un demi sommeil, perçoit au loin SON grondement. A chaque aube naissante, l’homme sait qu’il est vivant par la chaleur du corps endormi contre lui et par ce grondement plus ou moins intense qui l’accompagne depuis le premier jour. Il le connaît si bien qu’à son intensité, il devine déjà quelle sera son humeur. Mais qu’importe, qu’il annonce la quiétude ou le tumulte, lui ne manquera aucun de leurs rendez-vous matinaux. Discrètement, il s’échappe des bras de sa douce pour aller le rejoindre, enfile un jogging, réveille le chien qu’il entraîne aussitôt avec lui vers la dune. Ce moment-là leur appartient! Une communion sans égal s’établit immanquablement entre eux . Ils sont seuls au monde, seuls face à Lui, seul avec Lui… Lui, cet Océan si vaste, si puissant, si majestueux qu’il rend à l’humain son humilité.
Aujourd’hui encore, sur la plage déserte, l’homme et son chien déambulent sans autre but que celui de puiser dans la profondeur océane l’énergie indispensable à leur équilibre. Qu’importe les événements à venir, maintenant ils sont prêts à rejoindre leur quotidien. Sereins, ancrés, ils regagnent alors l’airial où le chien dévore sa gamelle tandis qu’à l’intérieur, flotte une délicate odeur de café et de pain grillé.
La brume s’est dissipée, le soleil commence à réchauffer l’herbe encore humide. La vie peut reprendre son cours.
Plus tard, l’homme , transformé en échassier « tchanqué » quitte la maison pour rejoindre en forêt un groupe de touristes qu’il achemine, au fil de ses contes et légendes, au temps du gemmage et autres traditions dont il est si fier !
Car sa vie aujourd’hui est ici, dans cette région qui berce ses souvenirs depuis son premier souffle. Jamais, au fil de ses vagabondes pérégrinations, il n’a envisagé de la quitter définitivement tant ils sont en symbiose. Elle est son port d’attache, le lieu où il se sent à sa juste place !


De Marie-Josée


La cigogne, l’aigle et le coq

Après les côtes africaines, quel plaisir de survoler enfin le Haut Koenigsbourg, château sentinelle qui veille depuis des centaines d’années sur mon territoire. Une petite halte au sommet du donjon, même si l’aigle en fer me fustige du regard, me permet d’apprécier la vue en toute quiétude. Des villages blottis contre les flancs des collines entourés de vignes, des maisons à colombages, des géraniums aux balcons, des plaines fertiles, des cours d’eau en abondance, pas étonnant que cette terre fut l’objet de toutes les convoitises. Le coq s’y est installé à grands cris de cocorico , se pavanant sur ses ergots sans se rendre compte que l’aigle suivait ce manège de loin, prêt à se l’approprier à la moindre défaillance qui ne tarderait pas à venir. Il l’a arraché au coq et moi, j’assistais impuissant à ces prises de bec, allant et venant au gré des saisons et des années. Les habitants subissaient ces va-et vient avec résignation, baragouinant tantôt comme l’un, tantôt comme l’autre , ignorant mes claquements de bec qui avaient de plus en plus de mal à s’imposer. Aujourd’hui, tout ceci n’est plus d’actualité. Le coq et l’aigle se sont réconciliés et marchent ensemble sous la bannière étoilée, ils ont même choisi mon territoire pour y implanter leur soi-disant capitale, mais tout ceci n’est que de la poudre aux yeux. Les cocoricos sont de plus en plus inaudibles et les coups de griffe de plus en plus visibles. Qu’à cela ne tienne , du haut de mon nid, tout ceci me laisse de marbre et je reste hermétique aux jacasseries de mes amies les oies dont les commentaires vont bon train.
Encore un petit effort et j’aperçois mon nid que je réintègre avec grand plaisir. Chacun ses priorités, je ne suis que l’observateur des péripéties des humains, la mienne est d’améliorer mon nid pour le rendre plus douillet pour la saison à venir.
Le coq est bien installé, il a décidé de dissoudre mon territoire dans une de ses basses-cour, mais cette décision est loin de faire l’unanimité. Quoi qu’il en soit, moi je remplis ma mission, j’apporte les bébés et je fais le bonheur des photographes et des communes dans lesquelles j’ai élu domicile ou leur malheur (certains se plaignent de mes déjections !) Ah ces humains, jamais contents, mais je ne m’attarderai pas sur si peu de choses.
Et ça jacasse, il faut dire que les oies n’ont pas la chance comme moi de migrer vers d’autres cieux en hiver. Elles subissent de plein fouet les assauts du froid et la bêtise des humains. La dernière polémique tourne autour du marché de Noël. J’ai failli oublier, la capitale de la bannière étoilée est aussi devenue la Capitale de Noël. L’invasion annuelle de la ville par des marchands de tout acabit a fait de notre ‘’Christkindelsmärik ‘’ (marché de l’enfant Jésus) un bazar sans âme. Après avoir tout saccagé, voilà que les élus prônent un retour à l’authenticité. Je ne suis pas sûre que ce soit à ce niveau-là qu’on y parviendra, mais nul doute cela fera couler de l’encre et jaser dans les chaumières.
Moi, je serai loin à ce moment-là, je me dorerai au soleil d’Afrique, mais mon cœur de bretzel battra à l’unisson avec celui de ceux qui ne se résignent pas à perdre leur culture et leur langue et qui se battent quotidiennement pour les préserver, pas seulement à la période de Noël et à coups de polémiques stériles.


De Nicole


Ma région

Ma région, ma ville de naissance (actuellement 197.000 habitants) se situe dans le Nord. Elle a été longtemps été un centre commercial, grâce à son port fluvial, et culturel important.
Elle est souvent surnommée « La Cité ardente ».
De ses habitants on dit aussi qu’ils sont principautaires, qu’ils ont les cheveux tout près de la tête.
Son emblème gastronomique pourrait être « les boulets à la sauce lapin », frites et sa spécialité sucrée hivernale, les lettres farcies au massepain.
Un large fleuve la traverse et différents ponts sont les points de suture entre les rives.
Le « Pont des Anges » de 1905, tout en dorures, aux pylônes surmontés de renommées.
Une passerelle récente en mémoire d’une héroïne de la Révolution française.
Située sur la rive droite du fleuve, une île, un quartier qui se nomme depuis 1927,
République libre…inspirée par le République Libre de Montmartre.
Son héros est une marionnette emblématique issue du folklore, pantalon à carreaux noirs et blancs, sarrau bleu, foulard rouge à pois blancs et casquette noire, le costume typique des ouvriers du XIXe siècle. Il arbore un nez rouge d’amateur de genièvre. Un personnage frondeur, il a son musée.
Sur une place, un banc de pierre où est assis la réplique d’un romancier né en 1903, habitant du quartier devenu très célèbre ; 197 romans, 158 nouvelles… Parti vivre à Paris, puis en Suisse.
Une fête foraine en octobre.
C’était une ville où il faisait bon vivre, se promener dans les nombreux parcs.
Cela change un peu aujourd’hui.
Qui suis-je ?

De Francoise V


Dans son caisson décoré de mille fleurs et arabesques colorés, elle dit oui, elle dit non, elle tient debout dans l’entrée de la ferme. Elle sonne toutes les heures et résonne dans tout l’habitat. Sa présence est immense, magnifique, magique. Amandine est habituée à l’entendre, à la voir. Elle a toujours vécu dans cette ferme aux odeurs de foin, de litière à vache. Elle entend le tic – tac régulier qui rythme sa vie d’agricultrice et qui marque le temps.
Dans sa cuisine, Amandine tient beaucoup à décorer son mur de rouages et d’engrenages métalliques typiques, évoquant les mécanismes de précision de la capitale. Ces mêmes mécanismes font la fierté des entreprises locales, des usines innovant la micromécanique. Amandine est tout aussi fière d’exposer les pièces fabriquées dans l’usine de son frère qu’elle chérit tant.
Dans un coin de cette même pièce, sur une table rustique, une cloche en verre couvre une part de fromage, produit issu de l’agriculture biologique acheté à la fruitière de son village. Dans sa dégustation, elle aime l’accompagner d’un verre de vin jaune au délicat parfum. C’est un fromage goûteux, à la pâte ferme, fruité, jaune en été, blanc en hiver. Il est affiné dans une des caves de la région dont l’activité salariée de son époux est la salaison ainsi que le contrôle qualité.
Vous qui êtes de la région… vous avez certainement deviné de quels produits et de quel lieu il s’agit.
Ah ! J’entends à l’instant une cloche qui vient de sonner au clocher de mon village… elle fait partie des produits fabriqués chez nous… savez-vous où ? Et de quelle usine vient-elle ?
Réponse : Franche-Comté, usine Obertino à Morteau.

De Martine

—Mathis ! Tu as encore tes pantoufles aux pieds ! Dépêche-toi un peu ! Vous avez vos gourdes ? Un vêtement de rechange ? Vous avez pris vos précautions ? Allez, c’est parti
La petite troupe dévala les escaliers en bondissant de marche en marche. Les sacs tressautaient sur le dos des enfants. Difficile de croire que quelques minutes plus tôt, il avait fallu déployer des trésors de patience pour les convaincre de faire cette dernière randonnée.
Les aînés, Mathis et Estelle, boudaient d’avoir été tirés du lit, Louise ne voulait pas lâcher son livre, le plus petit, Basile, avait renversé son bol de chocolat sur son tee-shirt et son short revêtus juste avant de se mettre à table. Les sacs à dos, préparés la veille au soir, avaient été vidés depuis et bien sûr, il n’y avait pas de coupable. Il avait fallu retrouver les chapeaux et les lunettes de soleil. Et pour que tout soit parfaitement pénible, le contenu du tube de crème solaire mal rebouché s’était en grande partie répandu sur les maillots de bain.
Les parents en étaient à se demander s’ils n’étaient pas plus fatigués en cette fin de vacances qu’à leur arrivée dans le gîte.
Le ciel était d’un bleu intense, sans une rayure, sans une tache. Le soleil allait encore darder ses implacables rayons comme il le faisait tous les jours depuis trois semaines. La sécheresse s’était installée, la végétation souffrait. La joie de jouir d’un beau temps commençait à se transformer en une lassitude de toute cette chaleur. Pas un endroit qui n’y échappe. Le soleil couché, les murs en grès, les ardoises qui couvraient les murets diffusaient la chaleur accumulée, la maison ne fraîchissait pas davantage, pas de répit même au creux de la nuit.
La vue de leurs enfants, pépiant, sautillant, le petit donnant la main à son aîné, effaça la fatigue des parents et leur rendit toute leur bonne humeur.
Ils avaient adopté un pas tranquille, ce qui leur évitait de se retrouver d’emblée en sueur. Les premiers mûriers furent salués de cris enthousiastes. Basile, trop petit pour attraper les fruits, tirait sur les bras de ses aînés pour obtenir qu’ils lui en cueillent. Ils se lassèrent vite de son avidité, détachèrent de leurs bras la petite main quémandeuse. Pour éviter des pleurs, le père déposa des mûres dans la petite bouche, qui rapidement, fut toute rouge et toute poisseuse. La marche se poursuivit en chansons, les enfants reprenaient les refrains à tue-tête. Estelle prit un malin plaisir à chanter faux, ce qui mit Louise en colère. Une petite halte permit d’apaiser le conflit naissant. Les enfants burent à grandes goulées l’eau fraîche de leur gourde et grignotèrent des petits-beurre.
—J’ai mangé l’automne et l’hiver, dit Louise en montrant son biscuit amputé de deux angles. —Eh bien, moi j’ai mangé toutes les semaines, lui répondit Mathis, le contour de son petit-beurre entièrement rogné.
—Moi, dit le père, avalant une dernière bouchée, j’ai mangé la journée tout entière ! Allez ! Au lit, la rando est terminée !
—Non, non ! Et le pique-nique et la baignade ? La petite famille se remit en route, joyeuse, revigorée.
Le lac était, à cette heure matinale, tout à eux, son appel irrésistible. Les enfants enfilèrent leurs maillots, s’aidant mutuellement pour être au plus vite dans l’eau. Estelle, tel un chien fou, courut jusqu’au lac et s’y jeta. Elle se releva aussitôt, crachant : « Maman tu aurais dû apporter ta fleur de sel, c’est même pas salé, c’est trop beurk ! ».
La petite famille rafraîchie s’installa pour le pique-nique sous un pin aux parfums exaltés par la chaleur.
Les enfants affamés engloutissaient leur sandwich, parlaient et riaient la bouche pleine. Les jambes nues et bronzées furent rapidement tachées de jus de tomates, maculées de miettes de chips. Basile, en aplatissant son pain aux dimensions de sa petite bouche, avait fait tomber des rillettes sur son maillot de bains. Et tout cela n’avait aucune importance, seule comptait cette joie d’être ensemble. Les parents, échangeant un regard complice, levèrent leur verre de gros plant : « À nous ! ».

De Dominique

Le drone

Je suis un drone et je vole, sous mes ailes s’affairent des gens qui courent laborieux comme des fourmis ; industries, artisans, services, agriculteurs tous travaillent et contribuent à faire vivre les gens d’ici et d’ailleurs.
Je suis un drone et je survole cette terre aux multiples paysages. Ici, quelques surélévations accidentelles de terrain que l’on nomme les trois “monts”. Le cycliste du dimanche s’y frotte en s’imaginant devenir le roi de la montagne puis, à l’issue de son exploit, s’arrête à l’estaminet pour se régaler d’une bonne bière fraîche et d’un bon plat de “moules frites.” On se “requinque” en se calant l’estomac, “on verra plus tard “pour la diététique sportive.
Je suis un drone et je survole presque à les toucher les clochers trapus des “hallekerk” de nos villages.
Sous les yeux de “ch’tio Gus”, les géants ; “Gambrinus et Guimauve” ou “Chope le brasseur et Adolphine la cafus” sont de sortie. Ils dansent, animés par d’infatigables porteurs, qui ne laisseraient pour rien au monde leur place de passeurs de tradition.
C’est la fête au village, la ducasse à Pierrot où chacun et chacune se retrouve dans la convivialité et le Pantagruel, qui pour cette rare occasion, est permis.
Je suis un drone et de ma hauteur, j’admire la ville aux couleurs “hispanisante” bariolée de rouge et de jaune doré.
Sur la “Grand-place “, une vieille Deudeuche embarque quelques touristes avides d’histoire locale. Elle roule vers les quartiers fortifiés de l’incontournable “Vauban”.
La mythique voiture aux deux chevrons s’arrête pour une pause gourmande devant la maison spécialisée depuis 1849 dans la gaufre, cette délicieuse pâtisserie locale “briochée à la vanille de Madagascar”. Un plaisir plein de saveur et de “Chuck à gogo” comme dans la chanson d’Alexandre DESROUSSEAUX.
Les plus gourmands d’entre eux pourront, s’ils le veulent, prolonger la promenade jusqu’à la fabrique de l’exquis carambar, ce bonbon de caramel qui colle obstinément aux dents.
Je suis un drone et c’est vers la mer que le vent me pousse à présent.
Entre les côtes, la grande bleue aux couleurs changeantes se nuance de vert et de gris selon les fantaisies de notre ciel, souvent trop bas. Elle s’agite en vagues moutonnantes contrariées par le vent capricieux.
Je suis un drone et de ma hauteur, je survole les sept bourgeois de pierre ; Eustache de Saint-Pierre, Jean d’Aire, les frères Pierre et Jacques, Jean de Fiennes et Andrieu d’Andres qui sont les gardiens des clefs de la cité de la dentelle et de la broderie. Là, des méticuleuses fileuses aux mains expertes du savoir ancestral, tissent avec passion des pièces d’une transparence remarquable.
Je vole et je survole encore des champs pleins de ressources, à la terre argileuse et lourde qui donne ici le houblon, là-bas la chicorée ou le chicon (endive) à l’amertume recherchée.
Je suis un drone et tout en bas, ma région s’amuse
Au bout du couloir de vingt-cinq mètres se trouve “l’étaque”, cible où la “bourle” (sans faute d’orthographe) de six kilos doit pouvoir se loger à la fin de son parcours sinueux. Des vieux, des jeunes, des femmes et des hommes rivalisent d’adresse pour éviter les pièges de la piste concave et incertaine. Ca tonitrue, ça rit et ça charrie en patois… Comme avant.
Je suis un drone et en dépassant le canal, je dépasse mes frontières…
Suis-je chez vous ? Racontez-nous.

De Jacques

Le trio

Arrivée en premier
La terre de l’ours
De froid en glaciale hostilité
Peur de faim
Dans la saison d’après l’hiver
Encore de neige,
Du gel au noir, au lyrisme du jour
Regarder les arbres naguère rouges d’automne
Entre l’arbre et l’écorce, la survie
Et du sang dans les veines
Comme l’eau,
Et le fer pour cuire et se sucrer

Carence maladie
Rouge fruit, d’humide en petit lac
L’automne, cette saison des arbres rouges
Quête contre squirrhes et infections

Sucre, sucrant comme un chant
Durant 1929, recette comme le peuple
Gâteau blanc tel la neige
Entoilé de caramel tel l’été
Mais le sucre du printemps vient le sacré
La modernité

De Catherine G

A la foire

Quand René part de bon matin tout endimanché et tiré à quatre épingles, à coup sûr, on est le 29 du mois. Et le 29, c’est sacré pour lui. Car, immanquablement, les 29 de chaque mois, c’est la fameuse foire aux Hérolles. Et rien ne pourrait empêcher René de manquer ce rendez-vous.
Cette foire est une vraie institution qui perdure depuis 500ans et qui garde son esprit d’antan. Une vraie effervescence agite cette petite bourgade à cheval sur trois régions, dont chacune s’en approprie la légitimité. C’est bien simple : l’été, il y a tant de monde qu’on est « emporté par la foule » comme disait la chanson. On y trouve de tout sur plusieurs hectares: des bestiaux avec le célèbre marché au cadran, des volailles et autres animaux de basse-cour, des produits maraîchers et charcutiers, de la quincaillerie, de l’outillage, des vêtements… vraiment de tout.
Si René reste fidèle au rendez-vous, ce n’est pas toujours parce qu’il a des poules ou un nouvel outil à acheter. Hé non ! C’est sa gourmandise qui le guide ! Car ce jour -là, la tête de veau et sa sauce gribiche sont à l’honneur dans tous les restaurants à 50 kilomètres à la ronde. La tête de veau, partagée avec les copains et arrosée d’un bon coup de Sancerre ou de Valençay, met en joie les longues tablées séculaires. Point besoin d’entrée, le plat du jour fait bonne ventrée. Les joues prennent des couleurs à mesure que le vin coule, ce bon vin rouge qui accompagne merveilleusement bien le délicieux fromage de « chieuvre » dont la pyramide tronquée ne fait jamais long feu.
Et si jamais il reste une place pour le dessert, le poirât fait toujours l’affaire. Les papilles frétillent de plaisir en dégustant cette tourte de poires fondantes relevées d’un bon tour de moulin à poivre. A ce moment du repas, le verbe prend une belle hauteur sonore, les esprits s’échauffent un tantinet, et on termine avec le rituel du café, pris dans un mazagran, récipient typiquement local. Sa forme en double coquetier inversé a une double fonction que tout le monde, hormis les initiés, ne connaît pas : d’un côté, le plus grand, on boit le caf, puis quand on le retourne , le petit côté permet de se rincer le gosier avec la goutte de prune que le René n’aura pas manqué d’apporter avec lui.
La voiture connaît bien le chemin du retour et René reviendra de son périple le cœur en joie, ou bien rendu bougon par ses abus de boisson, mais le ventre en avant bien rebondi de ces ripailles mensuelles, en attendant le prochain numéro 29 sur le calendrier accroché au mur de la cuisine.

De Catherine M

Ma ville

Ah, cette Dame métallique
Tellement emblématique
Qui brille de mille feux
Et rend les passants heureux
La Statue de la Liberté
A côté ?
Sûrement jalouse et verte de rage
Normal qu’elle prenne ombrage
De tant de beauté !

Je peux également vous parler
D’une autre Dame récemment brûlée
Qui, de cette ville, fait également la fierté
Pour l’instant silencieuse
Mais pour mieux ressusciter
Dans quelques années
Telle une belle dormeuse
Qui saura, un jour, nous consoler

D’autres Dames parcourent cette cité
Élégantes et raffinées
Parfois gantées et chapeautées
Toujours l’air décidé
Souvent croquées par Faizant et Sempé
Mais bien sûr vous avez deviné
De quelle ville il s’agissait …

De Lisa

Un couple de retraité est impatient d’arriver le jeudi pour aller voir la proposition de Laurence.
Marcel dit à Georgette : « Tiens ! Elle nous demande de parler de notre région mais sans citer le nom.
-Hein !
-C’est sûr qu’à la première ligne, tout le monde va comprendre.
-Hein !
-Je démarre ! Si je te dis carnaval ?
-Nice !
-Mais non ! Il ne faut pas dire la région.
-Et bein ! J’ai parlé d’une ville.
-Je peux dire par exemple la tarte au chuc
-Ça, c’est sûr qu’ils vont le deviner à la seconde près.
-Il vaut mieux dire la tarte aux sucres !
-Oui ! Mais c’est réputé !
-Pas comme le Maroilles qui est un petit village, pas connu.
-Non mais sans blaggue!
-Il faut savoir Che nin mi (je ne sais pas).
-Tu m’énerves ! Je vais le faire tout seul. Alors les copains, on passe à la devinette !
Si je parle d’Estaminet où l’on joue aux cartes, parle de beffroi…
Tout à coup, Georgette passe derrière et prononce
-…C’EST LE NORD….
-Loupé car on ne parle pas d’une région administrative…
-C’est quoi !
-On ne peut pas le dire car Laurence nous a demandé de donner l’envie d’y aller…
-Dans LE NORD …
-Tu m’énerves… Allez je vais faire un tour

De Gérard

Déambulant sur les quais de l’immense fleuve qui donnait l’impression que ma Charente natale n’était qu’un petit ru de rien du tout, tout était tiguidou (parfait), nous étions aux petits oiseaux (être aux anges). Pas question d’être vite sur nos patins (être patient), nous pouvions attendre que le curé se mouche (attendre le bon moment pour faire quelque chose).
Nous prîmes la direction de la basilique Notre Dame, flanquée de ses deux tours. Passée la place d’Armes, laissant le quartier chinois sur notre gauche, nous arrivâmes au début de la grande rue piétonne Sainte Catherine. Autour de nous, les gens se saluaient en souriant, les boutiques étaient pleines de « Bon matin ! Ça va bien ? ».
—Tire-toi une buche (prendre une chaise) » me dit Gabriel quand nous entrâmes au « Allô mon coco ! », et commande-toi un pudding chômeur, cela devrait te caler pour notre déjeuner. Il faut que tu tiennes jusqu’au souper. A midi, pour dîner, on se contentera d’un sandwich dans la rue. »
Le pudding chômeur, inventé lors de la grave crise économique de 1929, gros gâteau bourratif qui porte bien son nom en référence à ses ingrédients bon marché, remplit sa fonction et me combla l’estomac pour la journée. Quant à Gabriel, il se sustenta avec le traditionnel pain doré accompagné de bleuets.
La visite reprit, passage par le musée des beaux-arts, nous retournant pour admirer la gigantesque frise du grand Léonard Cohen dont le regard bienveillant planait sur la cité.
Puis, le plateau, la montagne, ses sentiers et son belvédère qui offre une vue « royale» sur la ville et le fleuve, au loin.
—Gabriel, dis-moi pourquoi on se sent ici à la fois comme chez nous et en même temps en pays étranger ?
—Ici, tu es dans une province hédoniste, on y privilégie l’humour et la fête, la joie de vivre est la valeur première. Te rends-tu compte que 90% des gens s’y disent heureux ? Les habitants recherchent obstinément le consensus, fuient les opinions tranchées : « Pas de chicane dans la cabane ! ». Quand tu as compris ça…
—Dis-moi, tu ne regrettes jamais l’hexagone ?
—Parfois si, bien sûr, mais la qualité de la vie et des contacts humains fait accepter les contraintes du pays. Tu n’imagines pas le bien que ça fait de vivre dans un endroit où les gens sont gais et ne râlent jamais !
—Je peux comprendre…
Nous soupâmes dans un restaurant traditionnel de soupe aux pois, fèves au lard et ragoût de pattes de porc.
Je me sentais serein, apaisé.
J’avais retrouvé mes racines poitevines, elles avaient traversé l’Atlantique, un peu plus de trois cents ans auparavant.

De Tavana

Art de vivre ici est de rigueur.
Que tu sois de là ou même d’ailleurs
Un seul mot d’ordre est le savoir-vivre
Ici, entre l’océan et les Pyrénées, tu respires
Tu ne peux échapper aux odeurs du terroir.
Aussi bon que nos canards, il n’y a pas d’échappatoire
Impossible de ne pas goûter ses coquilles salées
N’oublie jamais le verre de l’amitié ici, c’est sacré.
Et quoi qu’en disent certains, le gascon n’est pas chauvin.

De Danièle

Vacances en région Charentes

De belles vacances pas très organisées, mais qui se veulent d’être agréables pour les parents
comme les enfants, les vacances ont été choisies dans un but de faire découvrir aux enfants tout ce qui était spécialités de la région. Bien sûr avec leur père, ils sont déjà allés bottes aux pieds, gilet, et épuisette pour voir la pêche. Ils en entendaient parler par moi-même, qui passait beaucoup de temps à la mer quand j’étais jeune….
Alors ils ont fait la découverte des crabes, il y a les petits que l’on dit : vert et les autres que l’on trouve du côté des rochers autour du Phare de Cordouan, les crabes appelés Tourteaux, gros, calmes, à la chair savoureuse, que la mère fera cuire et qui une fois refroidis, iront dans les assiettes pour en manger l’intérieur, une belle chair blanche, qui se mangera avec du pain, et du beurre charentais.
Mais dans la région, nous avons aussi de bonnes moules bien garnies qui se feront un plaisir de se retrouver en marmite, soit simplement avec un peu de vin blanc d’ail, d’oignon, ou bien en modifiant et y mettant une fois cuites, du bleu. Le goût en devient parfait. Mais il y a aussi ceux qui les préfèrent à la campagnarde avec : échalotes, petits lardons…..et crème (charentaise).
Puis quelques jours après, il ne faisait pas très beau, et nous décidions d’aller chercher des escargots appelés ici des cagouilles….Fossés humides, nous en avons trouvés. Ils étaient une fois cuits, bien charnus, gouteux, bien relevés en beurre persillé. La mère de famille étant en vacances, elle a dit : j’ai fait quelques escargots pour vous faire plaisir, mais maintenant nous irons en déguster dans un restaurant spécialisé en cette denrée.
Et là, une fois arrivés, on leur a proposé de gouter des escargots à la barigoude, des escargots à la bordelaise, et à la normande avec de la crème et des champignons écrasés finement.
Les vacances se passaient formidablement bien, le matin nous faisions les marchés locaux, et l’après-midi un peu de plage, et nous apprécions la pêche où le père de famille leur a appris à ramasser des bigorneaux (petits escargots accrochés au rocher). Il y avait aussi, à ramasser sur les rochers, un coquillage que seul le père pouvait ramasser car il fallait un couteau, ou un outil blessant pour les décoller du rocher : les chapeaux de gendarmes ou berniques.
Les enfants étaient heureux, ils apprenaient beaucoup de choses, ils appelaient cela : les sciences de la vie.
On savait qu’ils en parleraient à l’école en rentrant en septembre : la cueillette en bord de mer. Mais le père et la mère ont dit : ce n’est pas tout, ici nous allons fouiller le sable mouillé, juste où la mer vient de se retirer, et vous regarderez un petit trou, une petite bulle, et vous gratterez et vous trouverez soit une coque, soit une palourde.
Mais, le père a expliqué à ses enfants, que l’an prochain, ils loueraient une maison avec un très bon équipement et que la maman pourrait faire réellement de la cuisine locale….Car ne pas oublier que le 17 est aussi un lieu où les huîtres sont très bonnes, et qu’un beau plateau avec quelques citrons, avec du vinaigre et de l’échalotte pour ceux qui aiment ces mélanges, sans parler de ceux qui les mangent chaudes à la persillade ou comme à Bordeaux avec un petit bout de saucisse ! j’avoue ne pas avoir essayé.
Mais, cette famille ne finira pas son séjour dans notre belle région, sans passer par St Georges de Didonne pour aller goûter chez la Mère Prune…….La spécialiste de tartes du littoral.
Et puis, si vous louez un bateau équipé pour quelque peu de pêche, vous irez sur l’embouchure de la Gironde, et vous attraperez dans votre filet, de magnifiques crevettes, dites roses, de belles tailles et très savoureuses à déguster, encore un repas typique du secteur….
Notre séjour se termine, les enfants ont eu plein les yeux de nouveautés, des produits de la mer, et il faut reconnaitre que dans le 17, il y a de quoi faire, mais sans être chauvin, il faut dire que les spécialités sont nombreuses…Mais n’oublions pas les poissons, et oui, là aussi il y aurait à dire sur les espèces du secteur.
Les vacanciers bouclent leurs valises, les enfants sont tristes, mais ils savent qu’ils reviendront, et qu’ils chercheront encore dans les rochers, sous les algues (certaines se mangent aussi), et que les vacances seront fortes en iode, donc en vitamines aussi.
Bon voyage chère famille, qui avez su découvrir les spécialités de la mer, mais qui avez inculqué à vos enfants le respect de celle-ci, ne pas prendre un coquillage pour s’amuser, mais uniquement pour, avec d’autres, le manger.
Bon retour et la mer vous attendra l’an prochain….

De Gérard

Nous marchions depuis plus de deux heures déjà, nous fiant aux traces de peinture blanche qui seules marquaient le chemin à suivre dans cet univers minéral où pas une plante ne poussait. Un paysage lunaire, grandiose, impressionnant, qu’il valait mieux franchir avec de solides baskets plutôt qu’en chaussures goni (chaussure traditionnelle en toile de jute).
Dans le ciel, nulle trace de pailles en queue (oiseau de mer) qui préféraient la côte.
Le car courant d’air (ancien autobus de l’île ouvert sur les côtés) nous avait pris tôt le matin, traversant la plaine des palmistes pour nous mener au Pas de Bellecombe.
Les cafres (Noir originaire de l’Afrique de l’Est) et les zoreilles (Français métropolitain installé sur l’île) descendus à Bourg Murat, seuls quelques touristes partaient à l’assaut du Piton pour une randonnée grandiose et éprouvante de près de six heures.
Tout à coup, notre chauffeur avait crié « Oté ! Volcan la pété ! » (le volcan est entré en irruption) avant de partir dans un fou-rire bienvenu devant nos mines effrayées.
Sous la varangue (véranda créole) du bazardier (marchand de primeurs ou de poissons, ambulant ou sédentaire) , dernière halte avant la randonnée, nous avions fait provision de bouchons (bouchée à base de viande et d’herbes aromatiques), bonbons piments (amuse-bouche d’origine indienne) , zéfs (œufs) , et de plats cuisinés : cari (ou carry, plat traditionnel servi avec du riz), rougail saucisse (plat complet du type carry -le rougail est une sauce pimentée accompagnant le plat), gratin chouchou (chouchou = christophine, chayotte) que nous réchaufferions une fois arrivés grâce à nos réchauds à gaz.
Tout à coup, nous entrâmes dans un épais brouillard qui masquait le sommet, provoquant la consternation dans notre petit groupe.
Verrions-nous le cratère Dolomieu, symbole de l’île, perché à 2632 mètres d’altitude, point cuminant d’un des volcans les plus actifs du monde ?
Alors que d’aucuns pensaient déjà à rebrousser chemin, le vent se mit à souffler, écartant le vilain nuage qui masquait le cratère.
Le spectacle était fantastique, nous étions en haut du Piton de la Fournaise, joyau de l’île, désormais ma région, mon île, puisque moi aussi j’étais devenue zoreille, nommée enseignante à Saint-Leu dans les Hauts (villages situés en hauteur, les distinguant des villages ou quartiers côtiers) pour la rentrée.


De Ghislaine

Omaha

La mer est forte, le ciel mouillé, pisseux. Trop sombre à cette heure du jour naissant. Le vent tempétueux a failli compromettre l’embarquement. Maintenant, ils s’entassent sur des barges. Le cœur serré, le ventre noué, les mains tremblantes.
Des jeunes. Certains n’ont pas dix-huit ans.
Lewis est à peine plus âgé. Il a fêté ses vingt ans en Angleterre, il y a trois jours. Une accolade avec les copains, un verre de scotch, des chansons de blues. Une pensée pour sa mère au pays, là-bas en Alabama. Elle a vu partir deux de ses fils. Harold et lui. Les trois autres sont restés à Cleveland. Ils s’occupent de la ferme en métayage, sauf Johnny qui est encore un enfant, à trente ans passé.
Lewis se gratte le dessus de la main. A l’entrainement, il s’est entaillé la chair. Une cicatrice rose, sur sa peau noire, est en train de se former. Ça le démange un peu.
Un air de jazz lui traverse la tête et reste accroché au lobe temporal. « In the Mood » de Glen Miller.
Ça sautille, c’est entrainant, ça dénoue les tripes, agite les jambes. C’est gai, dansant. Lewis danse à l’intérieur de lui-même. Il fait froid et humide. Mais dedans, son corps est bouillant. Chaud de gnôle bon marché et de trouille. De sons et de silence. D’inconnu et de terreur. Il se serre contre les autres. Ils sont une centaine dans ce conteneur qui tangue sous le roulis de la mer. La côte est si proche et si lointaine. Des hommes pleurent silencieusement, d’autres se souillent. Certains sont secoués de rires nerveux, incontrôlables.
Lewis se raccroche à la musique. Tout est là dans sa capacité à résister. Il tape sur l’épaule de Jarret. Amorce un pas, un mouvement d’épaule, un rythme cadencé en hochant la tête. Jarret sourit. Marque les temps. Pousse de la voix. C’est beau. Les hommes oublient un cours instant leur destinée. D’autres se joignent à eux. La barge semble se balancer sur la mer haute, suivre le tempo des chansons.
En fermant les yeux, on pourrait se croire dans un champ de coton, ou dans une rue américaine, au pied d’un immeuble décrépi, autour d’un piano déglingué.
La réalité est toute autre. Bientôt, les soldats seront jetés sur la plage et le combat fera rage.
Déjà ils entendent, déchirant la mélodie, le bruit des obus et de la mitraille. La grande symphonie de la guerre. D’autres gars ont débarqué. On les fauche à même le ressac, à moitié immergés. Les vagues se teintent de rouge. L’écume rosit.
Lewis a la gorge sèche et le cœur battant. Comme tous à présent, il s’adresse à Dieu. Le chant de sa prière monte lentement, en silence, vers le ciel où l’aube commence à poindre.
Il serre son fusil d’assaut contre son torse, comme pour se protéger, en faire un bouclier.
Puis voilà. Le temps vient de se figer. Il faut sauter.
Les yeux fous, hurlant, lui et ses copains marchent dans l’eau, vers le sable truffé de mines, de barbelés et d’obstacles antichars.
Lewis avance. Jarret s’effondre à ses côtés, dans les dernières vagues qui lèchent le rivage. Empêtré dans son barda de munitions, Lewis veut le relever, le tire sur la plage dans une trainée de sang. Lewis ne veut pas ramper en abandonnant son ami comme il voit certains soldats le faire.
Le silence soudain, autour. Partout. Dans son corps qui s’épanche en longues cascades visqueuses et brillantes.
Un trompettiste joue un petit air pour lui seul : « Ghost of a chance ». Dizzy Gillepsie.

« I need your love so badly, I love you, oh, so madly
But I don’t stand a ghost of a chance with you!
I thought at last I’d found you, but other lovers surround you
And “I don’t stand a ghost of a chance with you!”
If you’d surrender just for a tender kiss or two
You might discover, that I’m the lover meant for you
And I’d be true, but what’s the good of scheming
I know I must be dreaming… »

Poème de Nadia Anjuman, « Afghane » proposé par Françoise T (hors proposition d’écriture)

Aucun élan, aucun désir
Que pourrais-je bien dire ?
Que je chante ou ne chante pas, qu’importe
Moi, rejetée du monde, niée
Parler du sucre, pourquoi ?
Avec le poison dans ma bouche
Les coups de l’oppresseur
Ont mis ma bouche en sang
Personne à qui parler
A qui me confier ?
Que je pleure, que je rie
Que je meure ou que je reste
Me voilà au creux de cette prison
Espoirs envolés, désirs non exaucés
Je suis née en vain, c’est vrai
Et ma bouche doit rester scellée
Je sais, ô mon cœur qu’il existe un printemps
Une saison pour la joie
Mais que faire ? Mes ailes sont attachées
Et je ne peux m’envoler
Mon silence perdure, je sais
Et pourtant, je n’oublie pas les chants
Puisque mon cœur chaque instant
Tant de plaintes sont exhalées
En souvenir du jour glorieux
Où ma cage enfin brisée
Relevant la tête hors la solitude
Ivre je me remettrai à chanter
Je ne suis pas le faible saule
Qui tremble à tous les vents
Je suis afghane, il est donc légitime
Que sans cesse je parle en cris.


J’ai eu quelques difficultés à faire un copié/collé sur certains des textes. Pendant la manipulation, cela m’a supprimé certains des textes. Je les ai récupérés, mais si j’en ai oublié un, veuillez m’excuser. Ecrivez moi un mail avec le texte en pièce jointe pour que je le publie la semaine prochaine.

J’ai dû m’y reprendre à 3 fois. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas….

Pour celles et ceux qui normalement recevaient les lettres d’envoi pour les articles du blog le mardi, la proposition d’écriture le jeudi et les textes reçus le samedi, pas de panique.

Regardez dans les spams, si par hasard, le courrier ne s’y trouve pas.

Je ne peux pas maîtriser ce genre de choses et c’est indépendant de ma volonté.

Autrement, rendez vous directement sur le site du blog LA PLUME DE LAURENCE:

https://laurencesmits.com

Tout se trouve sur le site du blog. N’hésitez pas à le consulter. Il y a des centaines d’articles à votre disposition gratuitement, abordant différents thèmes autour de l’écriture.

Je vous souhaite une belle semaine créative.

Et pour celles et ceux qui sont en vacances en France ou qui partent, je vous souhaite de belles vacances. 

Portez-vous bien et prenez soin de vous!

A la semaine prochaine.

Créativement vôtre,

Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE


Passionnée de lecture et d’écriture, de voyages et d’art, je partage mes conseils sur l’écriture. L'écriture est devenue ma passion: j'écris des livres pratiques et des romans.

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