La rentrée scolaire pour la proposition d’écriture N° 171 a permis de vous connecter à vos souvenirs ou d’en inventer. Certains textes sont vraiment émouvants. 

Voici vos textes:

De Sandra (proposition d’écriture N° 170)

QUEL BEAU RÊVE VENU RÉALITÉ !

Mon père et mon oncle possédaient la ferme familiale, un gros producteur laitier de la région, puis quelques canards, des chèvres, des moutons et des poules.
Pour commencer, je me suis joint à eux, car j’aime la ferme ainsi que les animaux. C’est du bonheur pour moi de partager du temps de qualité ensemble. Ensuite, je me lève tôt chaque matin pour faire ma routine matinale. Ensuite, après avoir analysé la situation, j’ai augmenté le troupeau, j’ai fait bâtir un nouveau bâtiment de sorte que les bêtes peuvent respirer mieux l’hiver et j’ai aussi fait glisser tout doucement vers la technologie, le temps de s’habituer. Cela demandait de la patience. Également, comme chaque matin, le camion-citerne s’arrête pour ramasse le lait, donc tout est prêt pour le lendemain matin.
Deuxièmement, depuis quelques années le frère de mon épouse, Denis, est un employé de la ferme et il a une vision mondiale. À l’occasion, il voyage ou fait des excursions en montagne. Il parraine aussi un enfant, surnommé Miguel, âgé de 16 ans. D’ailleurs, le mois dernier, Denis est parti lui rendre visite en Indonésie pour quelques semaines. Ils ne s’étaient jamais rencontrés en présentiel, sauf parler au téléphone et échanger des courriels. Une fois arrivé là-bas, le paysage est époustouflant ! Les îles, la couleur de l’eau, les temples, les bâtiments sont étonnants et magnifique à la fois. Par un soir plutôt tranquille, Denis et Miguel ont été voir wayang, un spectacle de marionnettes, très impressionnant avec leurs couleurs, le décor et l’animation de la scène. Le lendemain, accompagné de Miguel, ils partent faire une promenade dans le fort. Tout à coup, ils voient des singes se balader de branche en branche, de couleur rouille appelés les orangs-outans.
Troisièmement, un de mes passe-temps favoris, c’est de prendre le microphone et d’animer le karaoké au bar de mon meilleur ami. Après dix ans, c’est toujours un grand plaisir chaque samedi soir d’aller avec mon épouse chez Daniel Show. Malheureusement, dimanche passé le bar a été saccagé et certains items ont été volés. Grâce aux caméras de surveillance, la police a pu attraper ces personnes.
Mes grands-parents ont possédé une Cadillac ainsi que mes parents. Mais moi, je possède une Jeep quatre quatre, de couleur bleue royale avec toutes les options, même le GPS. Puis ma femme conduit une Toyota.
Évidemment il faut faire un travail titanesque chaque jour, car l’horloge fait tic-tac continuellement, nous rappelant qu’il faut mettre la main à la pâte. Oui, mes amies, c’est une roue qui tourne, parfois un peu trop vite.

De Jacques

L’horreur

J’ai cinq ans. C’est ma première journée d’école. Ma mère est là. Ça me rassure. Lorsque la directrice annonce que les mères doivent partir, j’éclate. L’arme des larmes ne marche pas. Je pleure tellement. Des gouttes salées tombent sur le sol. En ce lundi matin de septembre, c’est la marée haute et il me semble que la classe est pleine de mes larmes. On implore le concierge de venir éponger les ravages du ressac des vagues de mes larmes sur le parquet de la classe. Nous sommes deux à pleurer l’un à côté de l’autre. Étrange non ? Ma mère quitte et là je ne me souviens plus du reste.
C’est une lourde responsabilité la rentrée : apprendre à faire du vélo, apprendre à écrire, apprendre à épeler les mots qu’on écrit, apprendre à compter, faire des boucles à ses souliers.
Le vélo, sur un terrain asphalté, j’emprunte le vélo de mon frère… je me lance, je ne sais comment arrêter cette machine infernale. Je bouscule des garçons qui après coup veulent me briser en deux. Mon frère intervient pour calmer le molosse. Au souper, il raconte l’événement. Voilà que mon père veut poursuivre la leçon. La pédagogie de mon pater est de me lancer vers la rue la plus passante du voisinage. J’ai peur, pas plus capable d’arrêter cette épouvantable engin. La rue m’obsède et me jette par terre. J’apprendrai tout seul.
L’écriture et l’épellation n’ont pas été un problème : papa, maman, oncle, tante, etc. Facile! Épeler devant les cousins, les oncles et les tantes n’était pas un problème. Je maîtrisais bien le rôle. Un jour, lors d’une dictée, j’ai flanché sur le mot « caoutchouc». Je n’ai pas eu honte, que se sert de ce mot-là dans la vie ?
Compter par exemple n’a pas été une mince affaire. Faire des deux ? Incapable. Un soir, au souper, j’en dessine un sur la nappe de la cuisine. Mon père décide de poursuivre mon apprentissage. Sa pédagogie n’a pas évolué. Aucun deux. D’ailleurs, aucun de nous n’est capable de comprendre le désarroi de l’autre. Montre-moi un dessin et je te dirai lequel des deux peut faire un deux, pas de deux. Pas plus que celui du danseur, je ne le suis pas, pas de deux. Pas de deux, beaucoup de nœuds et la session se termine en larmes. Enfin, l’heure de dormir. Dans un pas de deux, je me jette sous la couette. J’apprendrai tout seul, car à deux ça ne marche pas.
Lacer ses chaussures. Ce n’est pas simple. Ça prend une dextérité que je n’ai pas. Il faut faire un nœud, former deux oreilles de lapin avec les lacets. Faire passer une oreille par-dessus l’autre oreille et bien tirer sur les deux oreilles pour terminer la boucle. Quel travail ingrat pour un parent. Je suis timide et me donner en spectacle ne m’attire pas. Pas de nœuds, pas de deux (pas plus que celui du danseur). J’apprendrai tout seul.
Aujourd’hui, à l’aube de mes 68 ans, je sais faire des deux (pas ceux du danseur), des nœuds (pas ceux de la cravate), des œufs (pas comme dans : « Il ne faut pas mettre la charrue devant les œufs » parce que, pour faire une omelette, il faut casser des œufs). Et je sais lire ! Pendant toute mon primaire, l’autre pleureur a été mon ami, le premier… nous étions 2 contre tous.

De Gérard

Échec et Maternelle

1er octobre 1957, j’ai quatre ans.
Je vis heureux comme un coq en pâte avec mes deux grandes sœurs à la maison, gardé par ma jeune nounou, que j’adore, et avec qui je souhaite convoler : « Dis, tu m’attendras, Micheline ? ».
Ce matin-là, heureuse et divine surprise !
Je n’en reviens pas, ma si belle maman m’annonce qu’elle m’emmène faire des courses avec elle, ce qui n’arrivait jamais. Il faut dire qu’à cette époque, maman est mère inaccessible, très peu disponible. Mes deux parents sont absents toute la journée, absorbés par leur commerce, je ne les vois que le soir. Maman est donc à mes yeux de petit garçon une splendide et impressionnante créature féminine. Elle est une beauté froide, un peu lointaine, mais si belle…Et donc, ce matin-là, elle m’emmène faire des courses en ville en me tenant par la main.
Je suis fier et heureux.
Nous traversons la grande place, contournons la grande mairie sur la gauche, descendons la rue où demeure ma délicieuse vieille tante Cécile et sa chienne Follette. Ce n’est certes pas une rue commerçante, mais je n’y prends pas garde. Arrivé en bas sur la droite, nous descendons trois marches et je me retrouve dans l’entrée d’un bâtiment plein d’enfants de mon âge dont beaucoup pleurent. Et tout d’un coup, maman lâche ma main et disparait, me laissant seul dans cet univers que je ne connais pas.
Elle m’abandonne à l’école maternelle, sans se retourner. Cette scène, je ne l’ai jamais oubliée. La suite, si, mais on me l’a racontée.
Pendant trois mois, je vais être un enfant ingérable pour les maîtresses et autres aides maternelles. Je terrorisais les autres petits, refusant tout ce qu’on me propose, rien n’y fera.
Il parait même que je mordis certains de mes camarades !
Ces dames essayaient de m’initier au picotage et je trouvais cela ridicule, bon pour les petites filles et pas intéressant du tout. Au bout de trois mois, mes parents ont dû faire face à cet imprévu problème : leur petit garçon était viré de la maternelle à la fin du premier trimestre!
Ils obtinrent alors, je ne sais comment, que je puisse rentrer début janvier à la grande école, en cours préparatoire, bien qu’ayant manqué les trois premiers mois de l’année scolaire.
La maîtresse, épouse du principal du collège, m’installa dans la classe, au premier rang.
Je redevins immédiatement enfant sage, ne disant rien, observant les autres élèves, et le résultat fût qu’à la fin du second trimestre, je savais lire comme les grands, prenant ainsi un an d’avance.
En 1957, Françoise DOLTO n’avait pas encore sévi dans les chaumières. Maman l’aurait-elle écouté, je ne sais. Mais, je dois reconnaître que lorsque beaucoup plus tard je commençais ma crise d’adolescence, elle se montra mère très présente et attentive.
Je la respectais et l’adorais.
J’ai grandi libre, avec des parents toujours très occupés. Dix ans plus tard, je fis une autre rentrée des classes que je n’ai pas non plus oublié. Papa m’envoyait en pension :
Cela te fera du bien et ainsi, « Tu seras un homme, mon fils ! »

De Gérard

Une rentrée en prison (nom inventé, mais histoire véridique)

Le dimanche 17 septembre 1967, je rentrais en prison. En classe de seconde, j’avais 14 ans.
Pour être précis, la prison s’appelait Lycée Nicolas Copernic, réputé meilleur lycée de garçons de cette grande ville de l’Ouest de la France.
Entrant dans la cour d’entrée, l’établissement impressionnait par son style et l’ambiance froide de ses bâtiments de pierre. Le lycée avait été installé sous Napoléon Ier, suite à la loi Prairial de 1802 dans d’anciens bâtiments des frères des écoles chrétiennes agrandis et rénovés. J’entrais sans le savoir dans un lycée « impérial » laïc qui fleurait bon l’ordre et les institutions républicaines.
Pourquoi rentrer un dimanche ? Parce que j’y étais reçu comme pensionnaire – on disait alors interne – et qu’à ce titre, moi et mes collègues devions arriver la veille de la rentrée pour installer nos affaires dans nos casiers de la salle d’études, puis dans notre petit placard du dortoir collectif. Pour finir la pré-rentrée, nous enfilions notre uniforme, une blouse grise que nous porterions en permanence toute l’année scolaire, dont la couleur voulait déjà tout dire : notre condition serait triste comparée aux « externes » ou « demi-pensionnaires » qui eux pouvaient s’habiller en couleur. Stigmatisant, notre uniforme gris, discriminatoire même.
Le surveillant général expliquait que c’était le moyen de nous reconnaître et de nous repérer instantanément dans la cour.
Car chaque soir, à 17 heures, les grilles du lycée se refermaient sur les blouses grises interdites de sortie. Quel était notre crime ? Celui de ne pas habiter la ville. Tous les internes – internés devrais-je dire – venaient de petites villes ou villages situés trop loin du lycée pour pouvoir y venir quotidiennement en transport en commun.
Les matons, les surveillants, c’étaient les pions. Certains étaient humains, compréhensifs, d’autres franchement « peau-de-vache ». Dans ce domaine, Pédro, notre pion principal, celui qui nous gardait pendant nos séances d’étude entre 17 et 19 heures, et après dîner avant l’heure de monter au dortoir, surclassait toute la concurrence. D’où lui venait ce surnom que lui avaient donné les générations de potaches qui nous avaient précédé ? De sa ressemblance physique avec le sergent Garcia.
Pédro était gros, obèse, moustachu, mal habillé, pas toujours très propre, mais hélas beaucoup plus malin et vicieux que le personnage de la série. Il était pion professionnel, reconduit d’année en année pour s’occuper des internes, alors que les autres surveillants n’étaient qu’étudiants, faisant le métier pour payer leurs études. Son grand plaisir : nous faire respecter l’alignement dans la cour avant de monter au dortoir en hiver.
Nous étions alors en blouse, sans manteaux, et lorsque la température tombait en-dessous de zéro, ce qui à l’époque n’était pas rare, Pédro, chaudement habillé en pardessus, nous faisait faire plusieurs tours de cour dans le froid glacial si l’alignement n’était pas parfait à son goût ou s’il jugeait qu’il y avait du bruit dans le rang…
Comment en étais-je arrivé là ? Par ma faute. Livré à moi-même, mes parents étant toujours occupés par leur commerce, mes notes de classe dégringolaient chaque année depuis la cinquième. Mon père m’avait – à juste titre – catalogué de « fumiste ». Quelques années de pensionnat sévère devaient remettre le jeune adolescent dans le droit chemin et faire de moi un homme, telle était la volonté paternelle.
Pédro régnait donc toujours sur nous, lorsqu’un évènement externe improbable vint interrompre brutalement notre scolarité au printemps de l’année suivante : Mai 1968 !
Quand nous reprîmes le chemin de la rentrée en septembre suivant, nous avions gagné un nouveau droit, celui de fumer, et nous n’en sommes pas privés. Il faut dire que le premier ministre de l’époque donnait l’exemple avec ses cigarettes Winston.
En tant qu’élèves de première, nous avions également la possibilité de boire de la bière au réfectoire, de la Valstar légère étiquette verte, les terminales ayant droit à la Valstar classique, la rouge, et aussi au vin, une infâme piquette. Ce droit de s’alcooliser était en réalité fictif, car nous n’apprécions pas du tout ces breuvages gratuits, et les bouteilles et pichets repartaient vides à la fin de nos repas. Il n’empêche, ces droits semblent aujourd’hui très surprenants et incongrus.
L’année scolaire 1969-70, une énorme surprise nous attendait le jour de la rentrée :
plus de surveillants ! Fruit de l’époque, nous allions expérimenter l’autogestion…
Comment une idée aussi farfelue avait-elle pu naître dans l’esprit de nos décideurs, je ne comprends toujours pas. Car, après des années d’une discipline aussi sévère, passer du tout au rien ne pouvait qu’aboutir à une joyeuse anarchie dont nous ne sommes pas privés : nous avons joué toute l’année au Monopoly – rebaptisé par nos soins « Le petit capitaliste », au bridge même, et avons usé jusqu’à la corde quelques microsillons dans notre salle de repos. Je me souviens encore de chaque disque, de la classique Symphonie du Nouveau Monde d’Anton Dvorak au psychédélique « Ummagumma » des Pink Floyd.
Inutile de préciser que j’ai brillamment raté mon bac.
L’année suivante, l’expérience autogestionnaire ayant été jugée « peu concluante », nous avons à mon grand dam retrouvé nos surveillants. Et j’ai fait le mur du lycée la nuit, plusieurs fois avant de me faire prendre. Mais ceci est une autre histoire.
Je n’en ai jamais voulu, ni à mon père ni à quiconque, de cette expérience de pensionnaire prisonnier en blouse grise. Certes, j’ai été malheureux, pleurant même ma liberté perdue. Mais dans ce lycée, l’enseignement était de grande qualité, et j’en étais conscient.
En blouse grise, j’ai appris à me défendre, à me protéger, à m’affirmer, je suis devenu autonome et cela m’a servi toute ma vie d’adulte.
On ne grandit pas dans la facilité.
Merci papa !

De Catherine M

Un sursis

Ça y est, c’est la rentrée !
Dans l’appartement du 8ème étage, escalier B, de la Résidence des Chênes, elles sont trois filles. Pour deux d’entre elles, c’est le grand jour. La blondinette entre au CE1, la brunette au CE2. La troisième va profiter encore un peu des jupons de sa mère.
Hier soir dimanche, elles ont pris ensemble le dernier bain des vacances, enfilé le pyjama d’automne en flanelle jaune, vérifié le contenu de la trousse et du cartable, embrassé leurs parents un peu plus tôt que d’habitude. Les volets ont été fermés en laissant derrière eux la joyeuse lumière de l’été.
Et ce matin dans la cuisine familiale, c’est l’effervescence des grands jours. Les tartines sont généreuses, les bols fument, les conversations s’emmêlent et s’affolent au rythme de la pendule. Hop ! Les gilets enfilés à la va-vite sentent bon le neuf, une barrette fixée au tout dernier moment pour discipliner l’épi de la blondinette.
Suivons-la justement la cadette. On dirait qu’elle traîne un peu sur le trottoir. Elle est bien pâlotte. Le réveil trop matinal sans doute.
La cloche sonne, dernières bises claquées sur la joue parfumée de sa mère qui disparaît derrière la grille. Il faut se mettre en rang. L’aînée disparaît à son tour et la cadette se glisse dans le rang de sa maîtresse de l’année dernière. Sa maîtresse de CP adorée ! Personne n’a rien vu. Elle retrouve SA classe, son odeur de bois ciré, ses pots de crayons multicolores. Elle aussi a retrouvé des couleurs, elle se sent bien, elle n’a plus peur … jusqu’à l’arrivée de Madame la directrice :
– Il manque une élève en CE1 !
La maîtresse fait l’appel. La blondinette est repérée.
– Ah, c’est donc toi ! Tu t’es trompée de classe ma petite, tonne la directrice.
Dix minutes. Le sursis a duré dix minutes, pas plus, mais dix minutes dont elle se souviendra toujours.


De Fabrice

La cloche a sonné. C’était le début de l’enfer annuel pour ce pauvre Jimmy. Rentrée des classes de pacotille. L’été était foutu. Plus de bières chaudes à la piscine, plus de filles en bikini à reluquer. Juste des manuels scolaires d’un autre âge et un professeur de maths encore plus vieux.
Jimmy a traîné ses culottes courtes à l’école, les pieds traînant dans la poussière comme un condamné à mort se dirigeant vers l’échafaud. Il a croisé des visages familiers, des losers comme lui, tous portant cette expression de résignation, cette haine silencieuse pour le système. C’était ça, le cercle vicieux de l’Education Nationale.
En classe, le prof de maths, un vieux avec une barbe blanche crasseuse, a commencé son charabia sur les équations et les racines carrées. Jimmy, lui, pensait aux racines carrées de la bière dans le frigo et aux équations qui lui permettraient de planifier sa prochaine fête clandestine.
La journée s’est écoulée comme un cauchemar. Des heures de cours, des heures de purgatoire. Rien n’a changé depuis l’année dernière, et rien ne changerait jamais. Les mêmes profs ennuyeux, les mêmes gosses prétentieux, les mêmes règles inutiles.
La cloche a finalement sonné à la fin de la journée, libérant les élèves comme les rats d’un laboratoire de torture. Jimmy a foutu le camp, se promettant de tout foutre en l’air à la première occasion. Parce que c’était ça, la rentrée des classes : une foutue prison pour les esprits libres, une corvée sans fin pour les âmes en perdition. Et Jimmy, il était prêt à foutre tout ça en l’air, une bière à la fois.


De Jean-Claude

Il y a bien longtemps, quand j’avais 10 ans, ma rentrée à l’école du village m’émerveillait, me donnait une grande joie au cœur. C’était un événement radieux, presque comme si j’allais assister à un magnifique spectacle. Je me souviens de ce jour comme si c’était hier.
Le matin de la rentrée, j’enfilais mon pantalon court noir et ma blouse grise, la tenue réglementaire pour les garçons. Les filles, quant à elles, arboraient fièrement leurs robes noires et leurs chemisiers blancs. C’était une tradition qui perdurait depuis des générations, perpétuée par nos parents et nos grands-parents.
Mon cartable était prêt, quelques cahiers à peine froissés, des livres un peu usagers, ils avaient servi aux aînés, des crayons neufs qui sentaient bon le bois frais, toutes les fournitures n’attendaient que nos histoires à écrire. Dans ma poche, je glissais ma boîte de craie aux bâtons de couleurs, impatience d’écrire l’arithmétique, des verbes, et de dessiner des mondes imaginaires sur le tableau noir.
Le trajet vers l’école était une aventure à part entière. Le soleil du début de l’automne baignait les rues du village, et les feuilles des arbres commençaient à prendre des teintes dorées. Je marchais aux côtés de mes camarades, nos pas résonnant sur les pavés, dès fois un coup de pied dans une boite de conserve qui était là dans le caniveau. Les conversations des vacances étaient animées ainsi que les rires en pensant aux journées de découvertes, sans oublier le jardin de la maîtresse pour y cueillir les pommes et les croquer.
Enfin, nous arrivâmes à l’école, un bâtiment en pierre au charme rustique. Les bancs et les tables de la salle de classe sentaient la cire fraîche. Les grandes fenêtres laissaient entrer la lumière du jour, créant un éclairage doux et chaleureux. L’estrade, le bureau, la chaise, le grand tableau noir trônait, accompagnant les premières leçons qui allaient s’y inscrire.
La maîtresse, Mme Louise Lambert, était une femme élégante, vêtue d’une robe sobre et parfumée délicatement à l’eau de toilette. Son sourire bienveillant et ses yeux pétillants reflétaient sa passion pour l’enseignement. Elle nous a accueillis chaleureusement d’une voix douce en nous nommant tous par notre prénom, nous rappelant à quel point la connaissance était une aventure merveilleuse, pour être plus tard des adultes responsables de leur savoir et de leurs actes.
Tout au long de cette année scolaire, nous avons appris, grandi et tissé des liens d’amitié qui durent encore aujourd’hui. Les jours de pluie où les gouttes tambourinaient sur le toit de l’école. Les après-midis ensoleillés, nous pouvions jouer dans la cour, ou nous étions autorisés d’aller au jardin.
Les leçons passionnantes sur l’histoire de notre village, surtout la période de la Seconde Guerre, tout cela a contribué à faire de cette année l’une des plus mémorables de ma vie.
Ma rentrée à l’école du village en 1951, j’avais 10 ans, était bien plus qu’un simple événement. C’était le début d’un voyage fait de découvertes, d’amitiés et de souvenirs qui allaient me marquer pour toujours, un spectacle magique que je garderai précieusement dans mon cœur.

De Francis

Le souvenir, c’est la présence invisible

Nous sortions de la guerre, tout était à reconstruire, le matériel, mais aussi la société, les habitudes, tout était fait sans ostentation et nous ne pensions qu’à vivre tranquillement, sans tapage, simplement, très simplement.
Aussi, la rentrée des classes, « rentrée scolaire » dans notre vie d’enfant, faisait partie du déroulement normal de l’année. Enfants d’hier ou d’aujourd’hui, nous avons tous connu, à des degrés différents selon la période où nous vivions, les mêmes sensations, les mêmes inquiétudes qui nous ont formés, aidés, à affronter la vie.
Les rentrées des classes se sont suivies et je ne peux pas dire qu’elles m’ont laissé des souvenirs impérissables. Il me reste de vagues souvenirs des toutes premières.
Cependant, je me rappelle que le 1er octobre, après de longues vacances où nous nous étions occupés du mieux que nous pouvions, nous vivions la rentrée scolaire comme un événement spécial de notre enfance. La nuit précédant la journée de rentrée, nous éprouvions une certaine appréhension.
C’était toujours les mêmes questions : j’aurais un maître ou une maîtresse ? Comment sera-il-elle ? J’ai toujours été impatient de le découvrir et très influencé par les avis des grands jusqu’à ce que je me fasse le mien. Qui sera dans ma classe? Mes copains seront-ils là? Combien de nouveaux? Je brûlais d’impatience.
J’éprouvais une grande excitation à retrouver mes amis d’école, à raconter mes aventures estivales et à me préparer pour une nouvelle année d’apprentissage. Nos parents n’étaient pas riches. Ils accordaient une grande importance à l’école, savoir lire, écrire, compter, avoir son Certificat d’Études primaire était le tremplin qui devait nous aider à nous lancer dans la vie.
Je ne me souviens pas qu’ils m’aient accompagné à chaque rentrée. L’inscription effectuée, il était logique dans leur esprit que je me présente seul à l’école. C’était un lieu respecté où je serais en sécurité. Je garde l’impression qu’ils étaient peu soucieux de ce que je pouvais ressentir, ils avaient tellement d’autres contraintes que la rentrée; c’était une formalité évidente pour eux.
Je me souviens de la blouse grise, neuve, qui dépassait de ma veste, des chaussures neuves, parfois. A cette époque, on ne parlait pas de liste de rentrée scolaire. L’instituteur nous distribuait un porte-plume en bois rouge avec une plume sergent major et le cahier du jour, le reste nous l’acquérions au fur et à mesure de nos besoins, de nos moyens.
Pas de cartable bariolé, généralement, on récupérait une musette qui avait déjà servi. Dedans, rien ou presque rien, certainement pas de calculette, mais au C.P quelques bûchettes qui devraient servir à apprendre à compter, au CM1 et suivant le cahier de devoirs, le livre de lecture et un flacon d’encre violette.
La rentrée c’était le temps de faire connaissance, de se choisir, de se faire un bon copain. Le temps passe très vite, la routine s’installe, on attend les petites vacances, l’orange et le petit pain à deux têtes pour Noël et autres petits plaisirs de l’année scolaire jusqu’au temps du passage de classe ou d’examen de fin d’année.
J’ai certainement éprouvé des sensations différentes avec l’âge, mais maintenant tout cela est bien loin.

De Philippe

Le 17 septembre 1962

Avec ma mère, nous venions d’arriver à Nice. Nous habitions avenue Buenos Ayres, au numéro 32, immeuble le Cordoba. C’est le 9 juin 1962, jour de mon anniversaire, que nous avons posé nos valises dans ce trois pièces au deuxième étage. Je n’avais plus de copain pour jouer à la guerre. Fin août, ma mère m’annonce ma prochaine rentrée scolaire et que nous avons rendez-vous avec le directeur de l’école primaire rue Vernier.
J’avais 9 ans, et très peu de mois d’école derrière moi. Mes débuts en maternelle se sont faits en Algérie, à Bordj-Bou-Arreridj ; je devais avoir 5 ou 6 ans. Dans la réalité, mes deux sœurs, Colette et Jeanne, étaient mes maîtresses particulières et j’en étais très fier. L’école, j’y allais en pointillé, en fonction des événements.
Fin 1960, ma mère décide de rejoindre Alger et moi, je fais ma grande rentrée à l’école de la rue Duc des Cars ; une vraie école, de vrais copains. Mais un matin, plus d’école, juste de la fumée, des flammes et un grand trou. Ma mère a juste prononcé le mot « bombe ». Mais moi, j’avais toujours mes copains pour jouer à la guerre dans les marches du Forum.
C’est pour cela que le directeur de l’école Vernier voulait me voir pour vérifier mon niveau. Quand nous sommes sortis de son bureau, j’ai eu l’impression que ma mère était fière, son fils allait faire son entrée en cours moyen première année.
Le 17 septembre 1962, il faisait beau. Ma mère et moi quittions notre immeuble, pour descendre l’avenue Buenos Ayres, prendre les escaliers débouchant sur la rue du Rocher, couper le boulevard Gambetta et continuer sur la rue Vernier, jusqu’à l’école. Dans ma tête, je me disais « tiens, pas de militaires » et surtout pas d’angoisse dans les yeux de ma mère.
J’étais content, j’allais me faire de nouveaux copains. Le directeur, quelques jours plus tôt, avait été très gentil, je pressais le pas sans lâcher la main de ma mère. La matinée se passe bien. Le maître, un homme petit, un peu enveloppé, de son sourire permanent nous demanda de nous présenter, de raconter nos vacances. Quand vint mon tour, c’est lui qui prit la parole, qui me confisqua ma parole. Moi aussi je voulais me présenter, parler de mes vacances, en inventer. À onze heures et demie, la sonnerie marqua la fin de la première journée. Pas de classe cet après-midi. Ma mère m’attendait, perdue au milieu des autres mères, me prit la main, et une vingtaine de minutes plus tard, nous étions à la maison. Je lui racontais ma matinée, et ma colère de ne pas avoir pu me présenter comme les autres. Elle me répondit par un sourire et un « ça ira mieux demain, ton maître a bien fait, on n’est pas d’ici ». Je n’avais pas bien compris, mais le lendemain, à la première récréation du matin, j’allais comprendre le sens de « on n’est pas d’ici ».
Ma première rentrée scolaire s’est terminée par un jeté à terre, un arrachage de mes chaussures et de mes chaussettes, un maintien au sol et un cri « il n’a pas les pieds noirs ».
Je n’ai rien compris, pourquoi les pieds noirs ? J’ai juste pleuré en me relevant. La dizaine de garçons était partie. Je les avais déçus, ils avaient brisé ma joie. Mais, d’autres garçons sont venus me parler, me rendre chaussures et chaussettes. J’étais rassuré, j’avais des copains.
Dans la classe, au retour de la récréation, le maître et le directeur ont parlé de bêtises, d’humiliation, d’excuses, de pardon. Le soir, certains de mes arracheurs de chaussures étaient devenus des copains.
Ma mère et les parents ont été reçus par le directeur dès le lendemain. Ma mère m’a juste dit, « tu es d’ici maintenant ». Cette rentrée scolaire, jamais je ne l’oublierai, soixante ans plus tard, elle est toujours là, comme un souvenir « heureux ».

De Marie-Laure

Le 16 septembre 1966

Ce 16 septembre 1966 restera gravé dans ma mémoire à tout jamais et aura peut-être influencé mes convictions futures.
La veille, il avait fallu arrêter plus tôt les jeux avec les copines, pour revérifier pour la énième fois le cartable, la trousse et la taille bien régulière des crayons de couleur et des crayons de papier.
Cet instant avait quelque chose de solennel, toute la famille réunie autour de la table de la salle de séjour. Une espèce de joie et de fierté était censée nous animer surtout moi, car j’entrais au CP, la grande école !
Moi, j’étais plutôt d’une humeur maussade, je n’avais pas franchement envie d’y aller. Je savais quelle maîtresse j’allais avoir et cela ne prédisait rien de très folichon, sa sévérité n’était pas une légende au village, où elle sévissait depuis de nombreuses années déjà ! Je m’imaginais finir mes journées avec des tonnes de devoirs au détriment du temps passé dehors à jouer.
Ce soir-là, j’ai osé émettre mon souhait de tomber malade pour rester encore un peu avec maman à la maison ! Je passerai sous silence la leçon de morale qui s’en est suivie. Comment pouvais- je avoir de telles idées en tête ? Mes propos étaient juste inadmissibles, jamais on ne pouvait avoir envie d’être malade, c’était honteux !
Voilà, autant vous dire que mes quelques mots ont été carrément pris au premier degré. Il n’y a pas eu de décodage, de réassurance, tout le contraire ; l’éducation positive et bienveillante n’était pas de mise alors, même si maman écoutait Catherine Dolto à la radio.
Au petit matin du 16, nous sommes partis, tous les enfants du quartier ensemble vers l’école qui était au centre du village. Pour les parents, il n’était pas coutume d’accompagner l’enfant, encore moins de prendre congé.
On se retrouve dans la cour, on se demande si on sera assise à côté de la copine, comment va nous placer l’institutrice ? La règle était : les plus petits et ceux qui portent des lunettes devant, au plus près du tableau noir et les grands derrières. Étant dans la zone entre deux, le flou était de mise.
La cloche retentit, il faut se mettre en rang par deux devant sa salle de classe et faire silence. La maîtresse passe en revue la troupe, pas un bras ne doit bouger. Nous entrons dans la salle de classe, un à un et la maîtresse nous désigne la place qui nous a été affectée. Vient alors l’inspection du sac, tout son contenu doit être posé sur la table, le cartable doit être fermé et au crochet sur le côté de la table. C’est un silence lourd, pesant qui s’abat sur nos petites têtes. L’expression « on ne sait pas à quelle sauce on va être mangé » illustre à merveille ces quelques minutes interminables où l’institutrice déambule entre les rangs. Ouf, aucune réflexion devant ma table, une première étape de passée.
Vient le moment de la distribution des cahiers, avec les protèges cahiers de couleurs différentes, une pour le cahier du jour, une pour le mensuel et puis il y a la poésie, les mathématiques, ça ferait presque un arc en ciel !
Prenons le cahier du jour, notons la date, soulignons et puis écoutons tout ce que la maîtresse a à nous dire. Bref, la matinée se passe dans une sorte de morosité toute consacrée au savoir que nous devrons ingurgiter, dans l’ordre et la discipline.
A midi mon impression se confirme : il n’y a vraiment rien de drôle à entrer au CP ! Soit, il faut bien se faire à l’idée, mais je n’arrive quand même pas à faire preuve d’un enthousiasme fou devant mes parents. La pause de midi passe finalement très vite et il faut déjà y retourner, les copains appellent devant la porte.
« Papa, maman, je pars un peu en avance, pour avoir le temps de jouer avant d’entrer en classe ! »
Sitôt dit, toute notre petite bande s’en va guillerette jusque sur la place devant l’école. Nous jouons à « chat perché », éclats de rire, mais aussi bousculade, car il n’y a qu’un muret et une grille pour se percher.
J’ai 6 ans, je fais partie des petits dans la bande, mais il n’est pas question de se débiner, je veux suivre le rythme des grands. Était- ce une glissade, un salto arrière, je n’en ai jamais eu aucune idée ? Mais ça a été très vite et j’ai eu très mal, très mal au coude gauche. Alors que je restais tétanisée au sol, mon frère est allé chercher mon oncle qui habitait à deux pas de là. C’est lui qui m’a portée jusque chez le médecin du village, prévenant ma tante pour qu’elle monte informer maman. Allez ouste les bambins, le frère, les cousins, tout le monde en classe, pas question d’être en retard le premier jour !
Premier verdict du médecin, le bras cassé, un plâtre pour 6 semaines!
Deuxième verdict de maman : « le Bon Dieu t’a punie ! C’est toi qui voulais être malade hier et bien voilà c’est fait, mais demain matin tu seras quand même à l’école ! »
J’avais mal, j’avais grimpé trop haut, trop vite, bon ça je pouvais l’assumer. Mais concevoir que le Bon Dieu m’avait punie, ça je ne pouvais l’accepter. J’avais quand même bien saisi que l’heure n’était pas du tout à la remise en question d’une quelconque justice divine. Je me suis tue.
Depuis lors, mes rapports avec la religion ont été sérieusement mis à mal. C’est comme si, ce jour-là, j’avais compris que plus jamais il ne fallait exprimer le désir de rester auprès de sa mère, ça pouvait être dangereux ! J’avais 6 ans.

De Saxof

La 6eme

Demain c’est la rentrée des classes. Les vacances ont été plus que géniales avec notre voyage familial en Grèce. Sans les masques et sans confinement, je me suis sentie plus que libre. Je déteste respirer dans ce petit bout de papier bleu qui m’étouffe et maman m’avait dit que ça pouvait rendre malade d’absorber notre gaz carbonique au lieu de le rejeter à l’extérieur. Elle voulait que je le mette sous le nez à chaque fois que je le pouvais.
Maman et moi sommes très complices, elle me met toujours en garde suivant les situations. Je viens juste d’avoir 11 ans, même si je me sens une grande fille, je dois comprendre et apprendre encore beaucoup de choses.
Demain je rentre en 6eme, c’est important, et comble de bonheur, Estelle, ma meilleure amie, se retrouve dans la même classe que moi.
Je vide mes étagères à la recherche des vêtements que je veux choisir pour demain. Je m’arrête sur une robe bleue en dentelle, sans manche, à la ceinture qui se noue au dos. Je remplis mon sac à dos des affaires pour jeune étudiante, cahiers, calculette, trousse pleine de différents stylos, cahier de texte, classeur, etc.
Oh que j’ai mal dormi ! Un petit déjeuner fabuleux, copieux, de pancakes et jus de fruits me rend ma vitalité. Je regarde l’horloge qui me dit qu’il faut partir.
Maman m’attend déjà dans la voiture et devant le lycée, tout nouveau pour moi, un rapide bisou et je cours vers Estelle en pleine discussion avec un garçon, en entendant maman qui me crie « Bonne journée, à ce soir, 17h ».
C’est une journée découverte sur la façon de travailler, différente du collège, car ici nous changeons de classe à chaque nouveau cours. Ça permet de papoter et de se faire de nouveaux amis. Ces premières heures au lycée sont surtout pour se familiariser avec la nouvelle ambiance et repérer les différentes classes. J’ai adoré mon cours d’anglais, la prof est géniale. J’espère que demain au cours de maths, j’aurai le même enthousiasme. J’ai hâte aussi d’aborder la chimie dans le laboratoire qui m’a fait un clin d’œil lors de la visite. Nous avons eu une belle interactivité durant les 90 minutes de français. Déjà une étude de texte à rendre dans trois jours.
Je me sens déjà à l’aise dans ma nouvelle école.
Les repas de la cantine ne sont pas oufs, mais je les dirai « corrects »!
La journée se termine un peu plus tôt que prévu, et à 16H30, nous sommes libres. Je sors sur le trottoir avec Estelle. Je me retrouve seule après avoir répondu aux signes que mon amie m’a envoyés de la vitre de sa voiture paternelle. Alors que je scrute les automobiles qui arrivent, un homme s’approche de moi.
-Bonjour, ta mère m’a dit de te ramener chez toi, elle a une réunion et sera en retard.
Je le regarde, ne le reconnais pas. Une étincelle s’allume dans ma tête
– Quel est le mot de passe ?
– Quel mot de passe ? C’est quoi cette histoire ? me répond-t ’il en agrippant mon bras.
Je me secoue vigoureusement pour me libérer et je cours me réfugier dans le couloir de l’entrée du lycée où 10 minutes plus tard, maman est venue me chercher.
Merci Maman d’avoir mis en place un subterfuge avec ce mot de passe, pour éviter de me faire piéger par un de ces pédophiles qui hantent les sorties d’école.

De Nicole

Une rentrée scolaire dans les années 50

Alix, neuf ans, loge dans un hôtel de Vieilsalm dans la province du Luxembourg belge, tenu par une connaissance de sa mère, retenue dans une maison de repos, les nerfs en pelote.
Elle fait sa rentrée scolaire dans l’école du village, une classe filles, l’autre garçons.
Une classe pour les six années primaires. Elles sont douze. Alix est en 4ème.
Un immense tableau vert sert aux six années.
Les pupitres à deux places en bois ciré, un encrier de faïence empli d’encre bleue au milieu.
Dans son plumier : un crayon noir 2HB, une gomme, un taille crayon, un porte-plume ballon et quelques Caran d’Ache de couleurs. Les livres de cours restent sous la tablette du bureau.
Différents cahiers, lignés pour les cours de français, grammaire, rédactions, orthographe, quadrillés pour les calculs, la géographie et les sciences.
La maîtresse explique ses cours et donne du travail à chacune. A faire d’abord au brouillon, puis à recopier dans le cahier ad-hoc à la plume ballon sans faire de taches et c’est difficile.
Souvent, Alix, son travail terminé, écoute les cours de 5ème et 6ème et cela l’intéresse beaucoup. C’est une élève brillante qui vient de la ville. Elle reçoit des bons points, sorte de petits tickets bleus à conserver.
Souvent la maîtresse crie « silence, plus de bavardages », et elle est bavarde…
Alix aime l’odeur de la craie qui crisse sur le tableau, de la cire des pupitres.
Un poêle en fonte trône au milieu de la classe, un tuyau passe au-dessus des têtes, les hivers sont rudes là-bas.
A quatre heures, Alix rentre à l’hôtel avec son cartable de cuir brun. Elle prend son goûter, chocolat chaud et cramique et monte faire ses devoirs dans sa chambre.
Madame Morel, la tenancière, s’occupe bien d’elle et l’encourage à l’étude. Ses résultats sont bons, surtout en français. Sa mère lui manque un peu…

De Françoise V

Je me souviens de ma rentrée scolaire en 6è.

Après une préparation sérieuse en Cm2 dans mon école élémentaire, comprenant un examen de passage, des recommandations et tout le tralala, j’étais prête à affronter le collège. Je me sentais sûre de moi et pleine d’enthousiasme pour rencontrer le corps enseignant qui nous attendait avec son programme que j’espérais varié et intéressant. Ma grande sœur m’avait fait réviser tous les départements de France, comme si on allait m’interroger. Pour le comble de l’histoire je n’ai jamais appris les numéros des départements dans le cadre scolaire. On m’avait rempli le cerveau de chiffres et de noms comme on gave une oie à consommer.
Mon cartable était chargé de cahiers, crayons et d’un cahier de texte flambant neuf aux couleurs pastel pour chaque jour de la semaine. Ma grande sœur s’était occupée de moi, soucieuse de me protéger pour affronter les difficultés de ma nouvelle vie. C’est avec insistance qu’elle me forma des boucles anglaises grâce à mes cheveux longs. Ce n’était pas du tout mon style. Mais peu importe, il fallait que je sois belle à ses yeux, certaine que l’apparence était plus importante que n’importe quoi d’autre. Je fus obligée d’accepter pour avoir la paix.
Dans mon nouvel établissement scolaire, les immenses couloirs, les nombreuses salles de classe me donnaient le sentiment d’être quelqu’un d’important. J’étais fière de faire la « grande ». Je devais me souvenir des nombreuses salles de classes de 6è qui portaient des noms de couleur. La mienne se nommait « 6è verte » : verte comme les prés, comme les feuilles de salade, comme les feuilles des arbres. Nous ne changions pas d’étage excepté pour le cours de dessin qui se passait un étage en-dessous. C’était mon cours préféré, mais il n’était réservé que pour une heure par semaine. C’était peu pour moi et je m’en sentais frustrée. Notre programme comportait une heure de piscine. La chance s’offrait à nous car la piscine était dans les sous-sols du collège. Mais les jours de piscine ne m’enchantaient pas. Il fallait se dépêcher, se presser dans les couloirs pour être à l’heure au cours suivant, et s’habiller mal séchée pour ne pas être en retard au cours suivant. Tout ce que je n’aimais pas.
Le jour de la rentrée, ma mère m’avait amenée en voiture. Quelle chance j’ai eue. J’étais gâtée pour les transports, je l’avoue, nous n’habitions qu’à 2 ou 3 km du collège, et je ne mangeais pas à la cantine.
J’appréciais cette nouvelle vie car nous avions un professeur par matière. Adieu la maîtresse et ses humeurs changeantes, vêtue d’une blouse en nylon, toujours la même, et favorisant les bonnes notes à certaines de ses élèves. Il n’y avait pas de chahut en classe. Le rythme était agréable, je ne m’ennuyais plus comme à l’école élémentaire. J’étais attentive et passionnée par tout ce que j’apprenais. Le programme d’histoire me plaisait beaucoup : l’Égypte ! Des dessins, des histoires, tout ce que j’aimais. Je me régalais en décorant mes cahiers de pyramides et du Sphinx de Gizeh bien connu. Mon professeur de Français m’avait fait découvrir un peintre : Van Gogh. Et là je peux dire que j’étais aux anges !
Enfin apprendre des choses intéressantes ! Les maths me ravissaient. Moi qui n’étais pas douée pour les problèmes arithmétiques, je découvrais les maths modernes et les ensembles, sous forme de dessin, de ronds, de cloisonnements, d’intersections, de réunions, des lettres à la place des chiffres etc. Pour moi, c’était un peu plus concret et cela me rassurait, je devenais une bonne élève et j’aimais bien mes professeurs et vice-versa. J’aimais observer leur mimiques, leur tenue, leur langage, la richesse de leur vocabulaire, et leur regard que j’interprétais comme j’en avais envie. Je n’oublierai jamais les cours d’anglais, j’adorais cela ! C’était un véritable jeu pour moi. Ces cours m’aidaient à me dépasser devant les autres et j’osais parler devant toute la classe.
Avec le recul, je peux dire que j’ai beaucoup aimé ce changement de rythme, d’ouverture sur la vie, de mouvement de professeurs, d’organisation et de nouveauté. Finalement, aujourd’hui je réalise que j’ai toujours aimé écrire sans le savoir.
Je conservais ma timidité sans être dérangée en restant dans ma zone de confort. Je m’étais faite des copines en dehors de mon quartier… quel changement ! Une aventure aussi. C’était l’époque où il n’y avait pas de harcèlement, pas de violence entre les élèves de 6è, et la discipline permettait de nous concentrer et de nous respecter entre nous. J’adorais faire mes devoirs le soir et je n’en manquais aucun. Tout était noté sur mon cahier de texte que je soignais du mieux possible. Mon bulletin scolaire fut ensoleillé dès le premier trimestre… ce qui n’a pas toujours été le cas dans les classes suivantes.

Poème de Françoise V

MON ARBRE

Je voudrais être un arbre
Pour caresser le ciel aux couleurs de marbre
Enfiler mes branches au sein de ses nuages
Les écouter raconter leurs pensées sauvages
Et avec mon feuillage
Je déposerais tous leurs secrets sur une page
En dessinant des lettres aux arabesques argentées
Pendant que finiraient de danser
Les étoiles filantes dorées


De Monique

Une rentrée scolaire un peu spéciale

La journée s’annonçait ensoleillée. La fraicheur du matin invitait à mettre un vêtement un peu chaud. Les vignes autour de la maison se coloraient de rouge, d’orange, de brun qui annonçait l’automne… Les vendanges allaient bientôt commencer. Seul le vent ajoutait une note un peu maussade à cette journée de rentrée scolaire.
Céleste était prête. Elle avait enfilé son jean préféré, usé mais confortable et un sweat shirt rouge reçu en cadeau d’anniversaire le mois dernier. Cela allait fort bien avec sa courte chevelure brune et bouclée. Céleste aimait les rentrées scolaires mais là c’était une rentrée un peu spéciale. Elle passait en classe de seconde. Elle avait hâte de connaître ses professeurs, surtout celui de français. Elle aimait lire, écrire. Ses parents avaient acheté les livres de la liste remise par le lycée. Ils les voulaient neufs. Clémence s’en fichait un peu. Les livres d’occasion ne lui auraient pas déplu, bien au contraire. Les annotations écrites par les élèves précédents, à la marge, au-dessus des mots, en bas de la page, les ratures, les tâches d’un stylo, les pages un peu cornées, démontraient l’intérêt ou non de l’élève pour la matière enseignée. Le livre offrait de belles réflexions, tantôt intéressantes, tantôt comiques. Elle-même ne se privait d’inscrire ses propres commentaires. Mais là, cela serait à elle d’apporter, la première, sa touche personnelle.
Cette rentrée était excitante et en même temps elle éprouvait une certaine appréhension. Elle entrait dans la cour des grands. Bon, elle n’était pas la seule à vivre cette étape. Cela la rassurait un peu.
Céleste attendait sa sœur, qui, comme à son habitude, prenait son temps dans la salle de bain. Sa jumelle n’en finissait pas de se maquiller, de coiffer ses longs cheveux bruns. Elles se ressemblaient physiquement, mais leurs caractères étaient diamétralement opposés.
Caroline soignait son apparence, « son look ». « Pas question de sortir sans habiller mes yeux de noir », disait-elle. Elle était constamment dans la séduction et ce comportement énervait vraiment Céleste. Malgré cela, elle était là pour sa sœur quand elle était en difficulté pour réaliser un devoir de français, ou d’une autre matière. Les études ne préoccupaient pas Caroline. C’était une élève dans la moyenne. Céleste était une bonne élève et voulait atteindre l’excellence.
– Caro, dépêche-toi, cria Céleste, impatiente, à sa sœur, en tambourinant à la porte de la salle de bains. C’est le jour de la rentrée et pas question d’arriver en retard. Je ne tiens pas à me faire remarquer. Tu sais que j’ai horreur de ça !!!
Un bus scolaire desservait les communes environnantes pour conduire les élèves du collège et du lycée dans les établissements d’enseignement situés dans la petite ville voisine.
Céleste ne comptait plus les fois où elles avaient manqué le bus l’année dernière. Et à chaque fois, elles avaient eu recours à leur ancienne « nounou », Amélie qui acceptait toujours de les dépanner. Et elles arrivaient toujours en retard. Amélie conduisait avec une prudence extrême et les trajets s’allongeaient… Céleste s’impatientait et le faisait savoir en se tortillant sur le siège.
Les jumelles avaient eu plusieurs avertissements de la part du Directeur du collège, l’année passée, mais pas de véritable sanction, pas de renvoi. Un sentiment de honte s’emparait de Céleste quand elle arrivait en retard. Elle sentait le regard de la classe, qui, pensait -elle, la jugeait, la scrutait. Le silence qui s’installait quand elle s’avançait dans l’allée pour prendre sa place accentuait son malaise. Et il fallait faire face au regard réprobateur du professeur. Caroline allait s’installer, tout sourire, auprès de sa camarade, jetant un regard circulaire sur la classe. A la pensée que de tels évènements se reproduisent, Céleste sentit les battements de son coeur s’accélérer.
Il était hors de question d’être en retard le premier jour de la rentrée, cette année de seconde, une année vraiment spéciale.
– Caro, cria encore une fois Céleste.
– Oh ça va, je finis de me maquiller, répondit Caroline, un brin agacée. Deux minutes.
Quelques dix minutes plus tard, Caroline n’était toujours pas sortie de la salle de bains. Céleste, furieuse, hurla :
– Grouille toi ou je pars sans toi.
Céleste revivait le même scénario que l’année précédente.
« J’en ai assez, elle exagère. Je pars seule, c’est décidé, tant pis pour elle » maugréa Céleste.
Elle sortit de la maison et prit le chemin de la place du village. Le bus scolaire était déjà là, un peu en avance sur l’horaire.
– Ta sœur arrive ? demande le chauffeur à Céleste. Nous pouvons l’attendre quelques minutes.
– Non, elle est malade, répondit Céleste avec aplomb.
Et le bus démarra.

D’Aline

Premier jour d’école.

Mes parents, immigrés espagnols, n’avaient pas eu la chance d’aller à l’école. Ils étaient nés dans un tout petit village des Pyrénées. Enfants, ils gardaient les vaches et les moutons dans les hauts pâturages.
Mon père est né dans une fratrie de quatre enfants. Alors qu’il avait à peine 15 ans, après la mort du père, toute la famille s’est exilée en France avec leur mère.
Ma mère, avaient sept frères et sœurs. Son père a fait en sorte qu’elle fuit la guerre d’Espagne, à 18 ans. Elle est venue en France à pied, avec d’autres villageois, en franchissant la Brèche de Roland, dans la neige précoce du mois d’octobre 1936. Ne sachant ni lire ni écrire en français, à peine en espagnol, ils furent employés dans des fermes du sud-ouest, pendant des années.
Leur plus grand désir, pour ma sœur et pour moi, vous pouvez aisément l’imaginer, était que nous allions à l’école, apprendre ce dont ils souffraient : lire et écrire. Ils souhaitaient que nous ayons une meilleure vie que celle qu’ils connaissaient eux-mêmes.
Dès que j’ai eu l’âge d’entrer en maternelle, maman m’emmenait chaque jour sur son vélo jusqu’à l’école, à 5 km de la maison. Je ne me rappelle pas si j’étais contente à l’idée d’apprendre à lire, à écrire et d’avoir des petits camarades.
En revanche, je me souviens parfaitement du premier matin.
Affreux !
Maman m’accompagne jusque dans la cour de l’école : une dame et un monsieur viennent me chercher, me prennent par la main pour me conduire dans une salle de classe. Je vois maman partir et je commence à pleurer. J’essaie de courir après elle, mais je suis vite rattrapée par le monsieur. Il m’explique que maman reviendra me chercher le soir et qu’il est mon maître d’école. Je pleure de plus en plus, je m’agite, je hurle, je trépigne, je tape cet horrible bonhomme, qui me tient d’une main ferme. Nous entrons dans une salle où se trouvent beaucoup d’enfants assis sur des petites chaises autour de petites tables rondes. Le maître attend un peu que je sois plus calme, puis me dit de m’asseoir sur une chaise qu’il me désigne. J’allais m’asseoir, quand d’un geste vif, il a retiré ma chaise et… je suis tombée par terre, sur mon cul ! Tous les enfants riaient et moi, j’avais tellement honte ! Ils se moquaient tous de moi. J’ai recommencé à pleurer de plus belle. J’ai couru vers la porte et je voulais encore fuir. Je n’ai pas réussi, vous vous en doutez ! Le maître m’a repris par la main, s’est baissé à ma hauteur et m’a dit :
– C’était une farce ma petite Aline, je voulais te faire rire. Je n’aimais pas te voir pleurer.
Je ne m’en souviens pas, mais à ce moment-là, j’ai sûrement pensé qu’il était bête et que ses farces n’étaient pas rigolotes. Finalement, il a réussi à me faire asseoir à ma place. J’avais encore honte et je continuais à pleurer en silence. J’avais capitulé : je ne pouvais rien faire qu’obéir et faire comme les autres enfants.
Des dames avec des tabliers ont posé des bols devant nous. Tiens… elles sont gentilles ces dames, elles veulent sûrement nous consoler. Avec de grands brocs, elles ont servi à chaque enfant du lait chaud. Il fallait le boire et moi… je détestais le lait. Je détestais surtout la peau du lait. Ça me donnait envie de vomir !
Le supplice continuait et la bataille avec le maître recommençait : je devais boire le lait et je n’avais pas le choix. J’ai recommencé à pleurer. Cette fois, il m’a laissée tranquille… jusqu’au lendemain !
Voilà mon premier matin à l’école. Ce n’est pas un bon souvenir, vous l’aurez compris.
Bien des années plus tard, le jour est venu : j’accompagnais ma fille à l’école.
Très vite, elle s’est mêlée aux autres enfants dans la cour. J’ai fait un petit signe de la main, pour lui signifier que je partais. Elle a couru vers moi pour me faire un dernier bisou et là… elle a vu des larmes dans mes yeux.
– Tu pleures maman ?
– Ne t’inquiète pas ma chérie, ça va passer.
Je m’identifiais probablement à ma fille et le chagrin de mon premier jour de rentrée devait se réactiver. Si bien que les jours suivants, ma fille ne voulait plus aller à l’école. Elle pleurait tous les matins et me disait qu’elle avait mal au ventre.
J’ai bien compris qu’elle ne voulait pas me faire de la peine. Je ne l’ai pas obligée à retourner à l’école pendant trois ou quatre jours, d’autant que je me sentais quelque peu responsable.
La semaine suivante, nous nous sommes embrassées fort devant le portail de l’école et m’a fille a couru rejoindre ses petits camarades.
Finalement, pour l’une comme pour l’autre, l’école, le lycée, l’université sont devenus des lieux d’enrichissement et d’épanouissement, qui éveillaient notre curiosité. Nous aimons toujours apprendre, étudier, découvrir.
J’ai une pensée émue pour mes parents : ils n’auront jamais connu ce plaisir sans fin de la lecture et pour certains de l’écriture. Je les remercie de tout mon cœur.


De Marie-Josée

Souvenirs d’école

Un jour de septembre
Il y a bien longtemps déjà
Sans savoir à quoi m’attendre
J’ai découvert un étrange endroit.

Les yeux rougis, des enfants
Qui ne voulaient pas rester,
S’agrippaient aux jupes des mamans
Qui partaient le coeur serré.

Une silhouette en noir et blanc
M’empêcha de suivre Mamema,
Me fit asseoir sur un banc,
Qu’est- ce que je faisais là ?

Elle articulait des mots étranges
Je ne comprenais pas son charabia
Peut-être était-elle un ange
Comme moi, perdu ici-bas.

Mes larmes ne voulaient pas tarir
Une petite fille de de mon âge
Me prit la main avec un grand sourire
Essayait de me consoler dans mon langage.

J’ai appris les nouveaux mots
Je me suis intégrée tant bien que mal
Me suis soumise à des interdits idiots
On nous a inculqués que c’était normal.

Le dialecte était proscrit, même en récréation,
Seul le français avait droit de cité.
Parler ma langue entraînait des punitions,
J’en ai rempli tout un cahier.

Je fréquenté l’école bon nombre d’années
J’en ai gardé des bons et mauvais souvenirs
J’avais même songé y exercer,
Je croyais qu’elle serait mon avenir.

Les circonstances en ont décidé autrement,
Je l’ai quittée après l’obtention du Graal
De nouvelles générations usent ses bancs
Pour elles, avoir le bac est devenu banal.

L’école n’a pas fini de faire parler d’elle
On avance, on recule, on transforme
On présente des projets en kyrielle
On assène et on questionne.

A chaque rentrée, je me rappelle,
L’excitation qu’elle provoquait,
La nuit agitée que je passais la veille,
Le bonheur d’ouvrir les nouveaux livres et cahiers.

De Claude

ARÔME, C’EST LĂ QUE TOUS LES CHEMINS MÈNENT !

Bien que cela remonte à quelques années, non, soyons honnête, disons à un peu plus d’un demi-siècle, (tout de même), il me reste encore des souvenirs bien nets d’une certaine rentrée des classes.
Des effluves d’encre violette, de craie blanche et de bois ciré me ramènent dans cette classe de Cours Moyen où Madame B., notre institutrice et directrice d’école, officiait. La rentrée, c’était pour moi, avant tout, toutes ces odeurs : l’odeur du cuir de mon cartable neuf, celle du papier vierge des cahiers sans oublier celle de la colle Cléopâtre au parfum d’amande qu’il m’arrivait même de goûter ; quel délice ! De quoi être mis à l’amende !
Le poids des senteurs ! Le plein des sens ! C’était ça, ma rentrée ! On retrouvait notre école, comme si elle était nouvelle. On retrouvait aussi les copains On se racontait nos vacances… Et l’on prenait la photo de classe …que j’ai sous les yeux !
Je me revois au milieu de trente garçons (la mixité n’était pas encore entrée dans les mœurs, hélas !), tous impeccables dans nos blouses bleu marine, à écouter, le doigt sur la bouche, notre maîtresse faire l’appel, comme tous les jours de classe, nous rappeler les consignes et commencer son cours par la leçon de morale. C’était bon pour le moral !
D’autres souvenirs défilent devant moi, le rituel du matin par exemple, qui commençait par la distribution d’encre. Nous en étions tous chargés, à tour de rôle. Il fallait remplir d’encre violette de petits encriers blancs en porcelaine, deux par pupitre, à l’aide d’une grande bouteille au bec crochu. C’était une opération périlleuse car le moindre mouvement de ces étroits pupitres en bois foncé, souvent branlants, entraînait invariablement une catastrophe, ce qui mettait en fureur notre chère institutrice, une femme sévère, mais juste.
Elle menait son petit monde à la baguette, non qu’elle nous donnât des coups de règle sur les doigts, comme c’était la mode à l’époque, mais elle usait de son autorité naturelle pour nous imposer le silence. Ceux qui le brisaient s’exposaient au piquet ou, en cas de récidive, restaient après la fin des cours, à conjuguer par écrit, sur le cahier de brouillon, des verbes à tous les modes, à tous les temps et à toutes les personnes. C’est ainsi que je suis devenu très bon en conjugaison.
Un moment magique que je me rappelle avec émotion, c’était celui de la dictée : le silence studieux n’était rompu que par le crissement régulier de trente plumes Sergent-Major sur le papier, et, de temps à autre, par des soupirs de détresse, lorsqu’au hasard d’un « m » trop généreux, ou d’un « r » récalcitrant, des éclaboussures d’encre maculaient la page. Il fallait alors vite sortir la gomme du plumier, effacer délicatement, sans trouer la page, lisser en usant de son ongle pour mettre la dernière touche à ce travail de restauration, et parfois récrire un mot devenu illisible. Il était d’autre part impératif d’éviter les bavures grâce à l’indispensable buvard. Car les cahiers étaient notés !
Autre crissement, mais insupportable celui-là, celui de la craie sur le tableau noir. Il est vrai que ce tableau avait dû connaître des jours meilleurs ; lorsqu’on l’essuyait, c’était un nuage de poussière qui s’abattait sur le bureau de la maîtresse où piles de cahiers et de manuels, taille-crayon collectif et objets divers confisqués, se disputaient l’espace.
Je me souviens que le placard qui se trouvait au fond de la classe regorgeait de trésors. C’est là que la maîtresse stockait toutes les fournitures scolaires. Lorsqu’elle ouvrait cette vieille armoire en bois clair, un « oh » admiratif suivait aussitôt, et tous les regards convergeaient sur les merveilles qu’il renfermait : impressionnantes piles de cahiers aux couvertures colorées, rouleaux de papiers bleus pour couvrir les manuels, protège-cahiers de toutes les couleurs, crayons de bois par dizaines, gommes bicolores, double décimètres, compas, équerres, ciseaux et que sais-je encore ? La grande bouteille d’encre violette Waterman qui alimentait nos encriers trônait sur l’étagère centrale au milieu de boites de craies blanches et de couleur.
Lorsque j’avais le nez en l’air, mon regard se portait sur la carte de « La France et ses départements », ou encore sur l’affiche de l’« Anatomie de l’homme » (j’aurais préféré celle de la femme, qui m’était alors inconnue).
De ma place, je voyais la cour de récréation avec ses arbres majestueux autour desquels nous aimions jouer aux billes ou aux noyaux d’abricots. Ou encore nous livrer à de féroces bagarres.
Avec le recul, je remarque que les vieilles habitudes ont la vie dure. J’aime encore écrire au porte-plume ou au stylo-plume. Je n’ai jamais jeté l’encre. Tant de souvenirs sont restés encrés (en craie ?) en moi : les doigts tachés en permanence, la pierre ponce, les publicités sur les buvards…
Je regarde aujourd’hui avec nostalgie cette photo en teinte sépia.
Je dois vous avouer que j’ai tellement aimé l’école que je suis devenu professeur.
Vous voilà aussi au parfum, à présent !

De Lisa

Inspiré de la chanson de « l’école est finie » de Sheila

Donne-lui ta main et prendra la tienne
La cloche a sonné ça signifie
La rue attendra les vacances et le sourire
Mais oui mais oui la récré est finie

Nous irons écrire des dictées à la chaine
Ou bien faire des maths ou la géométrie
Rien d’y penser vive halloween !
Mais oui ! mais oui ! la récré est finie

Donne-lui ta main et prendra la tienne
La cloche a sonné ça signifie
La rue attendra les vacances et le sourire
Mais oui mais oui la récré est finie

La joie se dessine sur les visages des enfants
Aux yeux d’ange
Des pleurs et des rires se multiplient
Comme par hasard !

Donne-lui ta main et prendra la tienne
La cloche a sonné ça signifie
La rue attendra les vacances et le sourire
Mais oui mais oui la récré est finie

Donne-lui ta main et prendra la tienne
Nous aurons des devoirs, bonjour les cahiers vierges !
On s’amusera à notre manière
Mais oui ! Mais oui ! La récré est finie

Comme devant ce tableau qui nous le rappelle
Le retour des classes
Laissons aux autres nos dilemmes
Mais oui ! Mais oui ! La récré est finie

Donne-moi ta main et prends la mienne
La cloche a sonné ça signifie
La rue attendra les vacances et le sourire
Mais oui mais oui la récré est finie

La récré est finie, la récré est finie
La récré est finie, la récré est finie
La récré est finie, la récré est finie
La récré est finie, la récré est finie …


De Pierre

La rentrée scolaire est un évènement majeur dans l’année, que ce soit pour les parents, les enseignants et bien sûr pour les enfants. Elle rompt avec une certaine monotonie dans la vie de tous les jours et elle contribue à un nouveau « réveil » des activités humaines après une pause estivale.
J’ai des souvenirs de rentrées chez mes petits-enfants, rentrées qui furent quelquefois des moments difficiles pour eux comme « primo-écoliers » et pour leurs parents aussi, mais ces premiers contacts avec l’école se passaient généralement très bien. En ce qui me concerne, vu mon âge avancé, je n’ai que des souvenirs lointains de mes rentrées, que ce soit en école primaire ou après. Etant un autodidacte, appartenant à une catégorie en voie d’extension, je n’ai pas eu la chance de poursuivre, comme on disait, mes études au-delà d’un seuil minimum.
Jeune travailleur, garçon de bureau, j’étais condamné à suivre des cours du soir très éreintants après une journée de travail afin de maintenir et d’enrichir mon niveau de connaissances et de pouvoir rester « dans le coup ». Plus tard, les formations internes en milieu professionnel m’ont permis un déroulement de carrière plus qu’honorable.
Et maintenant, un peu de prospective autour de l’école dans les trente ans ou plus à venir. Sur le métier d’enseignant, il est clair que les évolutions technologiques déjà bien avancées remettent totalement en question les méthodes, les programmes, voire le fonctionnement. L’accès quasi libre à internet et aux réseaux dits sociaux permet d’ores et déjà à tous les jeunes d‘acquérir un niveau d’information considérable identique à celui reçu par les adultes quel que soit leur âge et le domaine.
Mais, cette information demande à être approfondie, critiquée, encadrée, intégrée dans un ensemble. Or, il n’est pas certain que les matières et programmes actuels en France comme ailleurs, prennent en compte ces évolutions technologiques qui sont incontournables.
L’IA ou l’intelligence artificielle par le biais de robots assistants devrait être un élément « clé » dans la transmission du savoir et la gestion de l’enseignement. La plupart des métiers du futur ne sont pas encore connus ou sont en gestation. L’école du futur devra s’adapter afin de maintenir les enfants et ados à un « top » niveau de connaissances acquises et d’assurer les besoins futurs en main-d’œuvre qualifiée. Que l’école soit en distanciel, en présentiel, ou qu’elle soit mobile, comme je le crois, les fondamentaux devraient subsister. Dans ces fondamentaux, il faudrait inclure la communication humaine, la sauvegarde de la planète, l’espace et j’en oublie.
Le monde est dorénavant un village global grâce aux moyens de transport et de télécommunication accessibles à tous aussi, les programmes scolaires doivent être en phase avec ces évolutions. Le maintien d’une identité culturelle propre à chacun et à son environnement, pour ne pas tomber dans un « magma » globalisé favorisant le nivellement par le bas est un défi majeur à relever. Les conditions climatiques qui entraîneront inexorablement des changements titanesques dans nos vies où que nous soyons, l’école devra du futur devra y faire face. N’oublions pas enfin les pauvres qui sont légion sur cette terre et qui implorent l’accès au savoir pour sortir de la misère. Tout cela, l’école devra également en tenir compte, sans doute y apporter des solutions sachant qu’elle doit rester ouverte à tous d’où qu’ils viennent, humainement, socialement.
Voilà ma perception des choses pour demain….

Nous voici déjà arrivés à mi-septembre. Le temps file au galop, l’été dans ma région résiste, il n’a pas dit son dernier mot. L’automne attendra encore un peu. 

Il y a celles et ceux qui peuvent partir en vacances, au calme, sans la masse des touristes qui courent partout. Les vacanciers de septembre ont leur temps. Je les envie! Dans 2 ans, ce sera mon tour! 

Il y a celles et ceux qui savourent une retraite bien méritée, qui savourent le temps présent aussi bien que leurs souvenirs et qui philosophent sur la vie. 

Il y a tous les autres, retournés au travail, qui espèrent une autre vie peut-être, qui réfléchissent sur leur destinée au détour d’un mot qui aura fait naître des espoirs en eux! 

Il y a celles et ceux qui deviennent grands-parents: ces personnes sont heureuses d’accueillir un nouveau né dans leur famille. Un petit apporte toujours de la joie. 

Il y a les potagers qui regorgent de légumes: à nous les courges de toutes sortes. Les vergers sont abondants et offrent leurs derniers fruits. Chez moi, ce sont les figues qui abondent, comme les mûres. Mon congélateur est rempli des fruits de cet été: abricots, mirabelles, figues. Les desserts seront succulents cet hiver! 

La nature nous offre tant de bienfaits et nous faisons si peu pour la remercier. Les jardins tirent peu à peu leur révérence et les feuilles, du moins chez moi, commencent à tomber à cause de la sécheresse. Je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour publier vos textes.Je vous remercie de participer à mon atelier d’écriture de mon blog  LA PLUME DE LAURENCE avec autant de fidélité. 

Portez-vous bien et prenez soin de vous!

Créativement vôtre,

Laurence Smits, LA PLUME DE LAURENCE


Passionnée de lecture et d’écriture, de voyages et d’art, je partage mes conseils sur l’écriture. L'écriture est devenue ma passion: j'écris des livres pratiques et des romans.

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